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"Pré-supposés des transferts d'organes", par A-C Masquelet, Université Paris-Diderot (Paris VII)

"Pré-supposés des transferts d'organes", par A-C Masquelet, Université Paris-Diderot (Paris VII) : cette étude est téléchargeable à partir du site internet du Centre Georges Canguilhem, Université Paris Diderot (Paris 7) :

centrecanguilhem.net


"Jusqu’où une société peut-elle permettre la manipulation instrumentale d’un donneur ou les modifications de la détermination de la mort pour le bien d’un receveur ?"
En France prévaut le consentement présumé sur le plan légal : si nous nous retrouvons un jour en état de "mort encéphalique", nos proches devront témoigner de notre "consentement présumé" au don de nos organes à notre mort : c'est-à-dire que nos proches devront soit confirmer notre consentement (si nous consentions à ce don de notre vivant), soit l'infirmer (si nous ne consentions pas à ce don de notre vivant). Mais nos proches ne sont pas censés donner leur opinion dans cette circonstance ! Cela vaut pour la question du don. Voyons maintenant l'autre versant qu'implique tout prélèvement d'organes : la question de la mort.

Quelle mort pour le donneur d'organes ?

La famille peut-elle faire le choix de la définition de la mort au nom d'un proche donneur potentiel ? Ce donneur se trouve soit en état de "mort encéphalique", donc à coeur battant, soit dans un état dit d'"arrêt cardio-respiratoire persistant" suite à un arrêt cardiaque réfractaire aux tentatives de réanimation. Notons que dans ce dernier état, distinct de la mort encéphalique, la preuve de la destruction du cerveau ne peut être apportée au préalable du prélèvement d'organes.

L'auteur de cette étude, M. Masquelet, répond :
"Non, la famille ne peut faire le choix de la définition de la mort au nom d’un proche."
Résumons ici l'analyse de M. Masquelet :

"En France, les traits saillants sont la délégation de la mort à l’instance médicale et hospitalière, une certaine hâte à accomplir le deuil, une instrumentalisation généralisée du corps, et une confusion entretenue entre altruisme et civisme."
Ce constat n'est pas brillant... Et si notre refus de réfléchir sur la fin de vie du potentiel donneur d'organes, nous le masquions par un idéal de Solidarité, s'exprimant forcément par le don d'organes, sous peine d'être accusé d'égoïsme et de repli sur soi ? Mais au fait : est-ce faire preuve d'égoïsme et de repli sur soi que d'accepter de réfléchir, sans pression idéologique, à la fin de vie d'un potentiel donneur d'organes ?...

M. Masquelet : "Au Japon, la mort est vécue comme un processus qui se déroule au sein d’une forte tradition familiale ; toutefois le sentiment communautaire très fort n’est pas forcément corrélé à une solidarité s’exprimant par le don d’organes."
Voilà qui ouvre des perspectives à une réflexion sur la fin de vie du donneur d'organes autrement que par un pur réflexe de la forme, n'engageant aucune réflexion personnelle (et signant un refus de réfléchir sur la définition de la mort ?) : "soyons généreux, donnons les organes de notre proche".

Le don ; le refus : ils ne devraient pas être des réflexes de la forme...

Par quoi remplacer ces réflexes de la forme, qu'on nous a si bien inculqués ? "En considérant que les conditions d’effectuation des transplantations d’organes n’obéissent pas exclusivement à des présupposés d’ordre médical et que toute réflexion éthique doit inclure une dimension critique susceptible de conduire à un réexamen des règles établies."

Quel est l'enjeu d'un réexamen des règles établies ? Etablir de belles constructions satisfaisantes pour l'esprit ? Montrer que l'on peut se piquer, à l'occasion, de philosophie ? Non, l'enjeu est d'ordre vital ; il ne s'agit pas de "peigner la girafe" : quelle société voulons-nous, pour nous-mêmes et nos enfants ?
"Jusqu’où une société peut-elle permettre la manipulation instrumentale d’un donneur ou les modifications de la détermination de la mort pour le bien d’un receveur ?"
L'étude d'A.- C. Masquelet propose un parcours en trois parties :

"- un survol historique et un état des lieux qui me semblent indispensables pour bien saisir la problématique entre les définitions médicales de la mort et les transplantations d'organes ;
- une analyse critique des deux grandes définitions de la mort : la mort encéphalique et la mort par arrêt cardio-respiratoire, ce qui nous permettra, au passage, de nous interroger sur la notion d'irréversibilité ; notion philosophique s'il en est.
- l'éclairage de ces deux étapes nous permettra peut-être de mieux appréhender l'évolution et la situation des transplantations d'organes au Japon (...)."

==> "Pré-supposés des transferts d'organes", par A-C Masquelet (lire).

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