Pourquoi répondre à ce questionnaire ?
Le discours public répète que "faute de greffe, X personnes décèdent chaque année". Quelles sont les réalités qui se cachent derrière le terme de "faute" ? Ce terme est-il consensuel, ou est-il relayé dans le discours public sur les greffes par les associations et institutions qui font de la promotion du don d'organes ? Dans ce cas, que dire pour informer ? L'information doit-elle parler de "faute", comme le fait la promotion ?
Régis Quéré, infirmier, coordinateur de prélèvements d'organes et de tissus, groupe hospitalier Necker-Enfants malades, Département de recherche en éthique, université Paris-Sud 11, Réseau de recherche en éthique médicale, INSERM, a écrit un article intitulé "Enjeux éthiques des prélèvements d'organes et de tissus : vers un utilitarisme de la mort ?" (lire).
Dans cet article, M. Quéré décrit le travail des coordinateurs des transplantations : information et accompagnement des familles confrontées au don :
==> Au sujet du questionnaire "Doona" : lire (PDF, 10 pages, 264 Ko)Une éthique de l'accompagnement
[p. 6-7 de l'article cité :] "Le débat relatif à la révision des lois de bioéthique prévue de manière régulière reprend et la question de la 'propriété' du corps se trouve à nouveau posée. Peut-on envisager, comme il fut proposé, que l'Etat puisse automatiquement en disposer pour le bien d'autrui ?
[Il s'agit du "concept de l'appropriation conditionnelle par la société", proposé par le Professeur Henri Kreis, chef du service de néphrologie, transplantation rénale à Necker-Enfants malades. (lire) ]
L'éthique appelle pourtant à assumer la contradiction et non à la fuir. La greffe n'est possible que grâce aux prélèvements et les besoins des malades doivent donc se conjuguer avant tout avec les représentations de cette atteinte au corps et la prise en compte de la douleur des proches face à la mort. Au-delà d'un simple corps-machine, réservoir d'organes, il s'agit de relier cette démarche à la singularité d'un individu dont l'acceptation ou le refus ne peut se comprendre qu'à la lecture de son existence. (...) [C]ette démarche ne saurait se concevoir autrement que selon une conception éthique de l'accompagnement des proches. Il en va de l'acceptabilité de cette activité par le grand public, mais aussi par les professionnels de santé.
On sait en effet que l'acceptation des prélèvements tient au niveau de confiance que l'on accorde aux soignants. L'accueil, la qualité de l'information délivrée, les conditions de l'annonce du décès, l'empathie et une loyauté dans les actions entreprises marquent les points essentiels de cette activité. Le concours de tous les membres de l'équipe participant à cette prise en charge est alors indispensable.
Entre ce qui est possible, légitime et acceptable, les coordinations hospitalières se doivent donc, plus que jamais, d'être les garants moraux d'une activité complexe. Exposées à deux demandes parfois contradictoires, elles constituent ce lien entre un donneur et des receveurs alors que la mort et la vie se trouvent inévitablement liées. Parfois perçues comme des oiseaux tournant autour de leurs 'proies', elles n'en sont pas pour autant que de simples passeurs anonymes. Conscients des problématiques soulevées, confrontés à la douleur des uns et à l'espoir des autres, ces professionnels témoignent de valeurs profondes au service de la vie.""Mort faute de greffe" : de quelle(s) faute(s) parlons-nous ? Greffes, pénurie, prothèses et organes artificiels, transplantations forcées et science-fiction. Le discours public entre promotion et tabou.
P.S. : vous avez jusqu'au 10 mai pour répondre à ce questionnaire en ligne.
Merci à tous !