Les informations contenues dans ce message ont été trouvées dans le livre "Ethiques en médecine. Repères et situations", paru chez Ellipses en 1996. Auteurs / coordination : Francis Gold, Patrick Choutet, Emmanuelle Burfin.
[pp. 132-142]: "Le don d'un rein de vivant à vivant est actuellement rare en France, contrairement aux pays anglo-saxons.(...) Dans la quasi-totalité des cas, les greffons proviennent de sujets décédés. Cependant, pour qu'un organe soit utilisable, il faut qu'il soit encore perfusé au moment du prélèvement, puis rincé et refroidi, ce qui permet sa conservation 48 heures environ. Il faut donc prélever sur des personnes juridiquement décédées, mais dont le coeur bat encore. C'est la destruction cérébrale irréversible qui définit la mort. Elle est compatible avec la persistance de la vie des organes tant que le coeur bat, à condition que l'on assure artificiellement la respiration et les autres fonctions vitales. Une équipe de réanimation doit assurer le maintien des fonctions vitales le temps que soit porté le diagnostic de mort cérébrale, que l'on puisse avoir un entretien avec l'entourage, et que l'on organise le prélèvement. Les organes prélevés sont ensuite acheminés vers le lieu de la transplantation.
Le service rendu est la valeur mise en avant par l'institution. Elle est fortement ressentie par médecins et soignants. Pour les greffes de coeur et de foie, ce service est majeur : il s'agit de la vie du receveur." [NDLR: "Quels sont les organes les plus greffés ? En 2007, 4 666 malades ont été greffés. Les greffes les plus fréquentes sont celles du rein (62 pour cent des greffes en 2007), du foie (23 pour cent), du cœur (8 pour cent) et du poumon (4 pour cent)". Source : Agence de la biomédecine ; Lien : http://www.dondorganes.fr.]
"Les receveurs potentiels de reins vivent le plus souvent très correctement en dialyse. Cependant la greffe ne constitue pas seulement pour eux un plus grand confort : dans l'état actuel aucune des deux techniques ne suffit à une vie entière ; un même sujet doit bénéficier successivement des différentes techniques. (...) Ceux qui attendent une greffe de coeur ou de foie vont mourir s'ils n'obtiennent pas un greffon à temps. Il n'en est pas de même pour les reins, puisque la dialyse permet d'attendre aussi longtemps qu'il le faut. La motivation des candidats à la greffe rénale tient à l'espérance d'une meilleure qualité de vie. Cette espérance se vérifie huit fois sur dix avec sur un long terme une morbidité et une mortalité équivalente. Cependant, la moitié des greffés perdent leur rein en dix ans, et se retrouvent alors en dialyse en attente d'une deuxième greffe. (...) [D]ans l'état actuel, il faut envisager la vie d'un insuffisant rénal chronique comme une succession de périodes de dialyse et de périodes de greffe. (...) Les greffons sont de qualité inégale, du fait en particulier de l'âge du donneur, des caractéristiques anatomiques, du temps écoulé depuis le prélèvement, très favorable jusqu'à 24 heures, de moins en moins favorable jusqu'à 48 heures.
La dose d'immunosuppression :
On appelle rejet ce qui est en fait le début de la destruction immunologique du greffon. Un des buts de la surveillance astreignante des greffés en consultation est de dépister cette complication fréquente au moment où il est encore possible de l'arrêter par un renforcement du traitement immunosuppresseur. Mais ces traitements entraînent un risque accru d'infections, en particulier virales, qui peuvent être très graves, et de certaines maladies prolifératives malignes, typiquement les lymphomes. Si les rejets se multiplient on augmente ces risques en tentant de sauver le greffon. Enlever le greffon avec pour corollaire le retour en dialyse permettrait de suspendre ces risques. (...)
Le taux de refus :
Les prélèvements (...) continuent à obéir au principe du consentement présumé. (...) En pratique, lorsque la famille s'y oppose, quelles que soient ses raisons, les équipes françaises ne prélèvent pas. Actuellement [en 1996, ndlr.], le refus empêche 30 à 50 pour cent des prélèvements qui auraient été techniquement possibles." (...)
En conclusion :
Les dilemmes sont le plus souvent non identifiés, dissimulés derrière les impératifs techniques. Ils n'en sont pas moins sources de malaises au sein des équipes, mais aussi au niveau national. (...) L'idée selon laquelle le progrès scientifique permettrait un jour de tout résoudre est une tentation dans les secteurs comme la transplantation où les applications techniques offrent une évidence quotidienne du progrès. Secrètement présente, elle prend forme de valeur forte, perçue intuitivement comme étant susceptible de faire le consensus."
© ellipses / édition marketing S.A., 1996, 32 rue Bargue, Paris 15ème.
Que dit l'Agence de la biomédecine sur le taux de refus actuel ?
Pourquoi manque-t-on d’organes à greffer ?
"Le prélèvement d’organes n’est possible que dans des circonstances rares. Moins de 1 pour cent des personnes qui décèdent à l’hôpital sont en état de mort encéphalique ; or il s’agit de 94 pour cent des greffes réalisées en France.
Par ailleurs, près d’un prélèvement possible sur trois est refusé. Soit par le défunt lui-même, qui avait déclaré son opposition au don d’organes. Soit par la famille, souvent parce qu’elle ignore ce que le défunt aurait souhaité et qu’elle préfère donc refuser le prélèvement par précaution." (Source : http://www.dondorganes.fr)
Entre 1996 et 2007-2008, la taux de refus a donc baissé. Il se situe autours de 35 pour cent (moyenne nationale, 2008). Notons néanmoins qu'en 2008, le taux de refus se situe toujours à 50 pour cent en pédiatrie (lorsqu'il s'agit de prélever les organes d'un enfant).
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