Scientific MOOCs follower. Author of Airpocalypse, a techno-medical thriller (Out Summer 2017)


Welcome to the digital era of biology (and to this modest blog I started in early 2005).

To cure many diseases, like cancer or cystic fibrosis, we will need to target genes (mutations, for ex.), not organs! I am convinced that the future of replacement medicine (organ transplant) is genomics (the science of the human genome). In 10 years we will be replacing (modifying) genes; not organs!


Anticipating the $100 genome era and the P4™ medicine revolution. P4 Medicine (Predictive, Personalized, Preventive, & Participatory): Catalyzing a Revolution from Reactive to Proactive Medicine.


I am an early adopter of scientific MOOCs. I've earned myself four MIT digital diplomas: 7.00x, 7.28x1, 7.28.x2 and 7QBWx. Instructor of 7.00x: Eric Lander PhD.

Upcoming books: Airpocalypse, a medical thriller (action taking place in Beijing) 2017; Jesus CRISPR Superstar, a sci-fi -- French title: La Passion du CRISPR (2018).

I love Genomics. Would you rather donate your data, or... your vital organs? Imagine all the people sharing their data...

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Don d’organes : réintroduire la mort, ou la remplacer par des applications : l’iPhone d’Apple, Facebook, Twitter ?

==> Version audio de cet article :




==> Lire cet article sur AgoraVox, le journal citoyen en ligne (lien)

Le discours public présente la médecine de remplacement (prélèvement et greffe d’organes) comme la panacée. La greffe efface la maladie, le traitement immunosuppresseur c’est "peanuts". Bientôt la "greffe-peanuts" sur Twitter, la promotion du don d’organes sur Facebook. Mais ce plâtrage du discours public s’effrite. Quelques fissures sont visibles.

Voici un article du 2 octobre 2009 (Monde Actu) à l’occasion de la Cinquième Semaine nationale du Rein, qui se déroule du 3 au 11 octobre 2009. Cet article montre que la greffe n’est pas la panacée, et que la prévention de l’insuffisance rénale est un enjeu majeur de santé publique.

"Le patient, une fois transplanté, doit prendre des médicaments immunosuppresseurs pour éviter le rejet du greffon. Ces médicaments présentent certains effets indésirables et peuvent accroître le risque d’acquisition de certaines infections, virus et même certains types de cancer. Enfin, une greffe du rein n’est pas définitive : un grand nombre de patients, notamment les jeunes, subit plusieurs transplantations durant toute leur vie".

Rassurez-vous : la fissure est à peine visible : les gens ne sont toujours pas au fait des réalités peu anodines qui se cachent derrière l’anodine formule "prélèvement à cœur arrêté" ; dans une émission grand public de 2009, on continue à présenter la greffe comme un Miracle. Demain (aujourd’hui ?), la "greffe-peanuts" sera (est ?) sur Twitter, outil de réseau social et de "microblogging". Plus que jamais, on aurait besoin de spécialistes cherchant à "parler vrai", mais il faut bien avouer qu’on les entend rarement dans les émissions grand public. Est-ce "avoir du sang sur les mains" que de dire la vérité ?

Quelle éthique dans l’actu des transplantations ?

Ethique, vous avez dit éthique ? Qu’est-ce que ce mot fourre-tout, aussi politiquement correct qu’imprécis vient faire dans les transplantations ? D’où les organes prélevés proviennent-ils ? Comment sont-ils répartis ? Se poser la question de l’éthique dans le cadre des allogreffes (prélèvements et greffes d’organes vitaux), c’est "chercher à déterminer si l’éthique est un enjeu du débat sur les allogreffes. Quelles formes du débat éthique le discours de presse véhicule-t-il et/ou construit-il ? Un débat public ? Un débat entre experts ? Quels en sont les modalités, les acteurs, les lieux, la temporalité ? Dans ce débat, l’éthique peut-elle apparaître comme une simple figure de rhétorique, au service d’une argumentation permettant à des acteurs et/ou à des institutions de défendre des positions de légitimité ? Comment le journal contribue-t-il au débat ?" (Source : "Figures et enjeux de l’éthique dans l’actualité scientifique de la presse quotidienne", par Christiane KAPITZ, Laboratoire C2So, ENS LSH, Lyon. (Mots-clés : éthique, greffes d’organes, don, débat, presse - http://sciences-medias.ens-lsh.fr/IMG/pdf/Kapitz.pdf).

Le discours public est-il biaisé, piégé, et si oui, par qui et à quelles fins ? Ces fins ont-elles été atteintes ? La fin doit-elle justifier les moyens ?

Richard H. Thaler est professeur en économie comportementale à l’université de Chicago (Illinois) ("Booth School of Business"). Le 26 septembre 2009, il publiait un article dans le New York Times : "Opting in versus Opting Out" : "Avantages comparés des régimes du don d’organes (loi) : le consentement explicite et le consentement implicite" (source). En France, le consentement implicite prévaut ("opt out system") : tout le monde est présumé consentir au don de ses organes à sa mort. Il faut effectuer une démarche administrative ("opt out") si on veut s’opposer au don de ses organes à sa mort. Aux USA, le régime du consentement explicite prévaut : ladite démarche administrative permet de s’inscrire comme donneur d’organes potentiel, car le consentement présumé n’existe pas. L’Etat de l’Illinois présente une particularité : le don d’organes n’y relève ni du consentement explicite, ni du consentement implicite, mais du "choix mandaté", qui prévaut sur le plan légal depuis 2006, et qui est présenté par l’auteur de cet article comme une "combinaison gagnante". De quoi s’agit-il ? Tout d’abord, l’auteur indique que, contrairement aux systèmes de consentement présumé et explicite, le "choix mandaté" n’a pas soulevé beaucoup de controverses. Le principe est le suivant : les gens doivent indiquer leur "préférence" (choix, position). Dans quel contexte ? Sur le permis de conduire. Aux USA, ne pas avoir son permis, et/ou de voiture, serait pire que l’illettrisme, rien à voir avec une quelconque "écolo-citoyenne attitude". Tout citoyen, à chaque renouvellement du permis ou de mise à jour de pièces administratives (comme la photo sur le permis), doit répondre à la question : "Souhaitez-vous être donneur d’organes ?". C’est ainsi qu’en Illinois, selon l’organisme central de promotion du don d’organes ("Donate Life Illinois"), 60 pour cent des signataires ont répondu à cette question par l’affirmative. A l’échelle nationale, ce même organisme central de promotion, ("Donate Life America"), dit avoir 38 pour cent de signataires consentant au don de leurs organes à leur mort. Y aurait-il de la promotion du "choix mandaté" dans l’air ? Précision d’importance : le "choix mandaté" a valeur légale. De ce fait, le signataire ayant consenti au don de ses organes vitaux à sa mort délivre le corps médical, et en particulier les acteurs des transplantations, de l’obligation légale de requérir le témoignage de ses proches. En France, où, rappelons-le, le consentement présumé prévaut, la non-opposition des proches au prélèvement doit être recueillie par le corps médical : tels sont les termes de la loi.

"(…) [S]i le médecin n’a pas directement connaissance de la volonté du défunt, il s’efforce de recueillir, auprès des proches, le consentement ou non de celui-ci, au prélèvement d’organe, éventuellement exprimé de son vivant." Si la famille affirme ne pas connaître la réponse, et décide de s’opposer au prélèvement pour cette raison, les équipes de coordination des transplantations sont dans l’obligation légale de respecter ce choix. (…) Le taux de refus spontané des familles, face aux demandes de prélèvement sur un proche décédé, stagne autour des 30 pour cent." (Source : archives de l’Assemblée Nationale, 2006). Notons qu’en France, en mars 2006, a été enregistrée à la Présidence de l’Assemblée Nationale "une proposition de loi tendant à ce que le consentement des personnes au prélèvement d’organes ou, le cas échéant, leur refus soit inscrit sur la carte Vitale". (Source). Tentative de promouvoir le "choix mandaté" en France ? Certains acteurs des transplantations d’organes, comme le Professeur Jean-Michel Boles, qui dirige le service de réanimation et des urgences médicales du CHU de Brest, se sont positionnés contre l’inscription de ce "choix mandaté" dans la loi : permettre aux usagers de la santé de se positionner en faveur du prélèvement d’organes sur leur carte Vitale, pourquoi pas. Mais pas d’obligation en la matière, et surtout, pas de formulation négative sur la carte Vitale ("Je m’oppose au prélèvement de mes organes"), pouvant induire la crainte que ce positionnement se fera au détriment d’une prise en charge médicale optimale (source). Le don d’organes étant un don, et non un droit ou un devoir, nul ne saurait forcer les citoyens à se positionner sur la question, encore moins à rendre ce choix public. On voit donc que le "choix mandaté", pour autant qu’il évite la mise en place du controversé "consentement présumé" sur le plan légal, tend à présenter la greffe comme un droit opposable. Cette "combinaison gagnante" (pour qui ?) pousserait à l’utilitarisme de la mort et à l’industrialisation du don d’organes.

Je cite ici un extrait de l’analyse du "consentement présumé" par le Professeur Boles lors de son audition du 30/06/09 à l’Assemblée Nationale, dans le cadre de la mission d’information sur la révision des lois bioéthiques (les lois en cours datent de 2004, elles doivent être révisées à horizon 2010).

"'Est-ce qu’il y a un droit à la greffe ?' L’expression n’est pas de moi, elle date du séminaire Européen du mois de mai 2009, où un professeur de sociologie qui avait été lui-même donneur vivant, avait évoqué l’hypothèse de générer un droit à la greffe. Est-ce qu’il y a un droit à la greffe ? Ca me paraît une question de fond, c’est-à-dire : est-ce que finalement, la greffe est un traitement comme un autre ? Et de la réponse à cette question qui à moi me paraît fondamentale découle cette question lourde sur le plan politique. L’autre question, c’est : comment on informe les citoyens, c’est-à-dire finalement, comment est-ce qu’on traite les gens ? La question centrale et le nœud gordien, me semble-t-il, de toute cette histoire, c’est, finalement, le consentement. Alors, est-ce que la greffe est finalement un traitement ou un soin comme un autre ? Il n’y a que deux réponses possibles, puisqu’on n’a pas le droit de botter en touche. C’est oui, c’est un soin ou un traitement comme un autre, ou non, ce n’est pas un soin ou un traitement comme un autre. La première alternative : si on dit oui, alors il faut aller jusqu’au bout du raisonnement. Si c’est un soin ou un traitement comme un autre, alors effectivement, il y a un droit à la greffe, puisque j’ai de plein droit le droit à être traité par une greffe, de recevoir une greffe. On a créé un nouveau ‘droit-créance’. [Droit-créance : rapport entre la créance et le droit qu’elle crée du créancier sur le débiteur. Source.] Si en tant que patient j’ai le droit d’avoir une greffe, ça veut dire (…) qu’en tant que médecin, j’ai le devoir de procurer un greffon à ce malade. Parce que si je ne le faisais pas, je lui ferais perdre des chances, ce qui est totalement inacceptable sur le plan éthique. Et à partir de ce moment-là, puisque je suis un greffé potentiel, je dois être un donneur de certitude. Je ne peux pas demander dans ce système-là. Je ne peux pas demander de recevoir si je ne suis pas d’accord pour donner puisque la seule façon d’être traité, c’est par le don. D’ailleurs ce système perd son caractère de don, je n’ai plus le libre-arbitre sur ce que devient mon cadavre et la société a le droit d’utiliser mon cadavre, en clair, nous sommes devenus des réservoirs de pièces détachées. Mais si on va jusqu’au bout, la fin, ici, justifie les moyens, et puisqu’il s’agit de santé publique, et c’est bien sur ce plan-là que la question se pose ou qu’on veut nous la poser, sur ce seul plan-là, il n’y a plus besoin de consentement. Alors sortons de l’hypocrisie, il n’y a plus besoin du consentement présumé, (…) il faut revenir à ce que disaient des députés lors de l’examen des lois de bioéthique de 2004 [et donc au préalable de l’entrée en vigueur de ces lois, Ndlr.], et il ne s’agissait pas des moindres, puisqu’il s’agissait de Jean-Michel Dubernard, qui était le président de la commission des affaires sociales, culturelles et familiales de l’Assemblée à l’époque (…) [et du Professeur Henri Kreis, défenseur du système de l’appropriation conditionnelle du corps humain par la société, Ndlr.(source)], ainsi que du rapporteur de la loi à l’époque (…), qui disaient que ‘le but du gouvernement est de transformer l’autorisation de prélèvement en obligation de service publique’, alors, tout ça, bien entendu, c’est dans le Journal Officiel, compte-rendu des débats de l’Assemblée Nationale de 2003 ou de 2004, et le Professeur Jean-Michel Dubernard disait que ‘ce sont les ambiguïtés de notre législation qu’il convient d’incriminer’, et ‘il faut proposer de nouvelles orientations’. On peut en effet s’interroger et se poser la question de savoir si ‘l’erreur des médecins n’a pas été d’établir les fondements de la transplantation sur l’altruisme’, ainsi que : ‘un système de santé ne peut pas être établi s’il doit reposer sur la bonne volonté du public dont on sait qu’elle peut changer d’un jour à l’autre’. Une autre phrase que je cite : ‘Se dessine alors un système basé sur l’appropriation par la société, mais, pour respecter l’autonomie de la personne, ce serait une appropriation conditionnelle. Elle pourrait représenter une véritable solution à la question du prélèvement d’organes. La société pourrait s’approprier, après la mort de la personne, les parties de son corps utiles pour en sauver une ou plusieurs autres, mais pas le corps dans sa totalité pour respecter le rite des funérailles’ (là, on le remercie quand-même). ’Les parties de son corps appartiendraient à la société, sans qu’elle ait à demander l’autorisation à qui que ce soit et sans qu’elle ait à présumer de la volonté du défunt’. Donc là on voit bien qu’on est dans un système qui est parfaitement cohérent, la greffe est un soin ou un traitement comme un autre, et de ce fait là elle doit être accessible à tous, de ce fait-là les médecins ont le devoir de la donner à tous, et l’organisation de la santé publique a le devoir, en effet, de faire en sorte que ce traitement soit disponible pour tous. Dans ce système, on est clairement dans une logique du don en réponse à un contre-don potentiel. Puisque je suis bénéficiaire potentiel je dois être donneur obligatoire. On est très clairement dans une logique qui est strictement utilitariste, on peut la choisir, mais à ce moment-là, il faut avoir le courage ou l’honnêteté intellectuelle de l’annoncer en tant que telle, et on décidera de rester habitant de ce pays ou non, ça c’est autre chose. La deuxième alternative, c’est : non. Ce n’est pas un soin ou un traitement comme un autre et donc il n’y a pas de droit à la greffe. Il n’y a pas de droit-créance. La greffe doit pouvoir se faire quand elle est possible, ce qui veut dire qu’elle reste un traitement d’exception, alors pas au sens d’exceptionnel en termes de fréquence numérique, mais en termes de ce que veut dire l’exception. Exceptionnel, c’est quelque chose qui est hors du commun, ce quelque chose étant basé sur un don volontaire de ses organes. On est à la fois dans une démarche altruiste, et on est en même temps dans le souci de solidarité avec son prochain qui souffre, cela relève donc de la responsabilité individuelle, personnelle, de notre responsabilité d’homme. Et ça veut dire, me semble-t-il, que le consentement ne peut être que positif [il ne peut pas être présumé. Or ce qui est inscrit dans la loi actuellement en vigueur, et ce depuis le début des transplantations d’organes en France, principalement à partir de la fin des années 60, c’est le "consentement présumé", Ndlr.]. Si je décide de donner, je dois le faire. Et ce n’est pas à quelqu’un d’autre de se demander si, éventuellement, je déciderais de … ‘bah, oui !’ [– ou avais décidé – de donner]. Cela veut dire que dans ce système-là, la fin ne justifie pas les moyens, qu’il faut respecter le libre-arbitre de chacun, en cherchant à le convaincre. C’est-à-dire que bien sûr il faut poursuivre des efforts, et les efforts entrepris pour la prise de position consciente des gens, et faciliter les modalités du consentement positif [ou "consentement exprès", ou "opt-in system", comme disent les Anglo-Saxons, c’est-à-dire : le contraire du "consentement présumé", ou "opt-out system", Ndlr.]. Sur le plan juridique, le consentement présumé au don de ses organes à sa mort constituerait une exception (…). On serait dans le seul cas où le droit français utiliserait le consentement présumé, pour quelque chose qui n’est tout de même pas anodin et qui s’appelle le don d’organes. On peut souligner au passage qu’on parle de don d’organes et pas de donation. On n’est pas dans le registre du droit classique. La question du consentement et de ses modalités est finalement centrale. Alors là, il faut faire attention aux choses, afin de ne pas fausser la compréhension du problème. Cela a été utilisé comme argument et je dois dire que j’ai été profondément choqué. On ne peut pas mettre sur un même plan le devoir civique et l’esprit de solidarité. Parce que le devoir civique, cela relève du respect d’une règle commune (…), qui est opposable à tous, et qui de ce fait devient une norme. Peut-on comparer, comme il a été fait, le fait de donner ses organes à celui de défendre son pays en faisant la guerre ? Alors que l’esprit de solidarité, c’est autre chose. Cela relève d’une attitude altruiste personnelle. On ne peut pas taxer la non-acceptation pour soi de donner ses organes d’un rejet de la solidarité. Comment peut-on dire, comme l’a fait Bernard Kouchner tout récemment, que ‘le fait de ne pas donner ses organes relève du rejet de la solidarité’ ? Non, je ne suis absolument pas d’accord ! Le fait d’accepter ou non de donner ses organes regarde chacun au plus profond de soi-même. Il ne peut pas y avoir de jugement de valeur négatif prononcé à l’égard de telle ou telle personne !" (Source).

"Donner ses organe à sa mort". Voilà qui pose deux questions : le don, mais aussi … la mort.

Poursuivons les propos de notre spécialiste en économie comportementale de l’Illinois, Richard H. Thaler. Voici que notre champion du "choix mandaté" propose de "zapper" la mort. Il donne pour cela les meilleures raisons du monde : Steve Jobs, le patron d’Apple, a bénéficié récemment d’une greffe du foie. Il a fait un retour très attendu aux commandes d’Apple le 9 septembre 2009, lors de la traditionnelle conférence de rentrée, pour le lancement de nouveaux produits. Son arrivée sur la scène lors du symposium réunissant les cadres dirigeants d’Apple a été saluée par un tonnerre d’applaudissements. D’emblée, il a précisé que, sans la générosité de la victime d’un accident de voiture, il ne serait pas là. Il a ajouté qu’il espérait que beaucoup, s’ils devaient y être confrontés, feraient (ou leurs proches) le même choix. (Source). Et voici que M. Thaler lance un défi, ou challenge, à M. Jobs :

"Pourquoi ne pas créer un site internet – et une application gratuite pour iPhone – qui soit une pétition pour le don d’organes : les gens donneraient leur signature pour signifier leur accord sur le don de leurs organes à leur mort, chaque Etat d’Amérique figurant sur cette pétition. Il faudrait que M. Jobs travaille avec les Etats d’Amérique afin de mettre en place un niveau de sécurité suffisant et une procédure d’utilisation qui soit ‘user friendly’ (facile à utiliser) pour cette nouvelle technologie permettant le recrutement de donneurs d’organes. Les réseaux sociaux (dits "2.0") style Facebook pourraient aussi faire la promotion du don d’organes, en contribuant à recruter des signataires. Beaucoup d’Américains se prononcent en faveur du don d’organes, mais ils ne vont pas jusqu’à mettre leurs bonnes intentions en pratique. A M. Jobs de donner à ces potentiels bons Samaritains le coup de pouce qui leur permettra de surmonter leur inertie, voilà qui pourrait prolonger des milliers de vies chaque année. S’inscrire sur le registre national des donneurs d’organes devrait être un jeu d’enfant, comme quand on télécharge de la musique sur son iPhone."

Précisons qu’en France, il faut effectuer la démarche inverse : si on s’inscrit sur une liste nationale, c’est forcément sur le Registre National de Refus, pour signifier son refus de faire don de ses organes à son décès, puisque nous sommes tous, de par la loi, présumés consentir au don de nos organes à notre mort. C’est le régime du consentement implicite : qui ne dit mot consent. Mais comme tout est relatif, aux USA, c’est tout le contraire : qui ne dit mot ne consent pas : le consentement au don de ses organes à sa mort doit être explicite.

Exit la mort. Exit le questionnement sur le mourir. A la place, on créé une application pour iPod, on va sur Facebook. Moins humaniste, mais plus cool (glamour). "Le don d’organes est une glorification de la mort", disait le pionnier de la greffe cardiaque en Europe. Le Professeur Christian Cabrol semble avoir fait école avec sa formule : une application pour iPod, un petit tour sur Facebook pour nier, pardon, pour glorifier la mort.

Vous avez certainement remarqué un aspect incontournable dans la question du don d’organes : on ne parle pas plus de la mort que de la corde du pendu. Le donneur d’organes est mort. Il s’agit de s’interroger sur le don : "Accepterai-je de donner mes organes après ma mort ? Pour ou contre, je le dis à mes proches". Le discours public pose l’enjeu du débat sur le don d’organes en ces termes. Ne parlons que du don, oublions qu’il s’agit de prélever les organes vitaux d’un mort. De là à dire qu’on va aller parler du don sur Facebook ou via une nouvelle application pour iPhone, il n’y a qu’un pas, que certains franchissent allégrement. Ensuite, pourquoi pas la légalisation du système de "l’appropriation conditionnelle du corps par la société", dont parlait le Professeur Boles, cité plus haut ? La société serait reconnue propriétaire du corps humain, qui pour le moment n’appartient à personne afin d’éviter toute marchandisation du corps humain (une vente aux enchères au chevet d’un potentiel donneur d’organes ?). Chacun prendrait sa décision, toute signature ayant, comme pour le "choix mandaté", valeur légale. Dans un tel système, on peut penser que la société l’emporterait largement sur l’individu. Il conviendrait alors de parler de "l’appropriation du corps par la société", car la condition, qui est le non-refus ou l’acceptation de chaque individu, risquerait bien de peser aussi lourd dans la balance que les droits de l’homme en Chine, pour utiliser un raccourci qui, pour être expéditif, n’en permet pas moins de se faire comprendre. Et si le "choix mandaté" était ni plus ni moins un système d’appropriation (conditionnelle) du corps par la société ?

Comment ça, la mort du donneur d’organes ?! Puisqu’il est mort ! Oui, mais il s’agit soit d’un mort à cœur battant, pour lequel le constat de décès prévaut sur le plan légal car il se trouve dans un état irréversible (la "mort encéphalique" correspond donc à un état irréversible), soit d’un mort pour lequel le constat légal de décès prévaut en se fondant sur une décision d’arrêt de la réanimation sur un patient ayant fait un arrêt cardiaque qui n’a pas pu être récupéré. Dans cette dernière situation, au bout d’environ 30 mn de tentatives de réanimation, le décès légal dudit patient va être prononcé ("décès suite à arrêt cardiaque non récupéré", ou encore : arrêt cardiaque "réfractaire" à la réanimation). Toujours dans cette dernière situation : on constate que là aussi il s’agit d’un constat de décès fondé sur l’irréversibilité d’un état. On juge qu’il n’est pas dans l’intérêt de ce patient de prolonger les tentatives de réanimation, car le pronostic vital est trop mauvais. On parle alors de prélèvement d’organes sur patient "à cœur arrêté", en disant que les organes (les reins essentiellement) ont été prélevés sur un patient "mort suite à arrêt cardiaque". Mais l’expression "à cœur arrêté" signifie en fait que ledit patient se trouve en "arrêt cardio-respiratoire persistant". Les deux expressions ne sont pas tout à fait équivalentes : la première ("à cœur arrêté") suggère qu’il s’agit de la mort physiologique du patient, et c’est ce que comprend la population. La seconde, plus scientifique ("arrêt cardio-respiratoire persistant") montre la réalité des faits : il s’agit d’un constat de décès anticipé sur le plan légal : il a été décidé de mettre fin aux tentatives de réanimation cardio-respiratoires, afin de ne pas prolonger indéfiniment un état jugé irréversible.

Je souhaite vivement me faire comprendre : la mort légale du donneur d’organes précède sa mort physiologique. C’est ce décalage dans le temps qui permet le prélèvement d’organes vitaux sur un mort. Le prélèvement des organes vitaux intervient après la mort légale, mais avant la mort physiologique du donneur en état de mort encéphalique ou en "arrêt cardio-respiratoire persistant". Ce mort doit être aussi mort que possible sur le plan légal, tout en étant aussi vivant que possible sur le plan physiologique. Ce difficile équilibre – qui, vous vous en doutez, n’est pas sans poser des questions de déontologie médicale, de morale, d’éthique – constitue le principe, aussi fondamental qu’ignoré du public, du don d’organes. Quand on vous dit que le donneur d’organes est mort, il s’agit d’un constat de décès légal qui se fonde sur l’irréversibilité d’un état. Voilà qui mériterait qu’on en parle au moins autant que le don. La médecine de remplacement (les transplantations d’organes), au lieu d’être présentée comme une "indication courante" dans les médias, devrait être présentée comme "un traitement d’exception, (…) pas au sens d’exceptionnel en termes de fréquence numérique, mais en termes de ce que veut dire l’exception. Exceptionnel, c’est quelque chose qui est hors du commun, ce quelque chose étant basé sur un don volontaire de ses organes." (Professeur Boles, cité plus haut).

Le "mort" à partir duquel des organes vitaux vont être prélevés est un mort sur le plan légal, et un mourant sur le plan physiologique. Ce mourant est mort sur le plan légal, mais sur le plan physiologique, on a affaire à un patient, qui fait encore l’objet de traitements dans le but de conserver des organes vitaux à des fins de transplantations. Autrement dit, la justification éthique des transplantations ne peut être la mort (sur le plan physiologique) du donneur d’organes. La "mort encéphalique" et l’"arrêt cardio-respiratoire persistant" sont deux états distincts, qui ne recouvrent pas les mêmes réalités de fin de vie, si on se place dans la perspective du (potentiel) donneur d’organes. Petit rappel : la mort encéphalique, cela concerne un pour cent des décès. L’arrêt cardiaque – la situation initiale qui va permettre le prélèvement de reins sur donneur "à cœur arrêté" ou en "arrêt cardio-respiratoire persistant" – concerne, potentiellement, cent pour cent de la population, d’autant que sur le plan légal, nous sommes tous de potentiels donneurs d’organes (régime du "consentement présumé"). Voilà qui est tout sauf anodin.

Les prélèvements "à cœur arrêté", c’est quoi ? Quelle mort pour le donneur d’organes ?

Permettez-moi d’avoir une fois de plus recours à un spécialiste (le Professeur Jean-Michel Boles) pour expliquer la situation. (source). Pour rappel, la loi du 6 août 2004 fait de la greffe d’organes une "Grande priorité nationale", et le décret d’application du 2 août 2005 autorise les prélèvements "à cœur arrêté" en France. Concrètement : depuis 2007 (le temps de la mise en place du protocole de prélèvement "à cœur arrêté"), une situation d’arrêt cardiaque peut faire de tout un chacun (vous, moi) un donneur d’organes potentiel.

Je cite ici les propos du Professeur Boles :

"(…) [Q]u’est ce qui pose problème, d’abord dans les modalités de réalisation de ces procédures [de prélèvements ’à cœur arrêté’, Ndlr.] ? Alors, qu’est ce qu’il se passe ? D’abord, quelqu’un fait un arrêt cardiaque, par définition inopiné, on le programme rarement, ça peut être dans la rue, ça peut être à l’hôpital. Les secours sont appelés, arrivent, au bout d’un temps X et engagent les manœuvres recommandées par les sociétés savantes, qu’elles soient françaises, américaines, européennes, enfin bref, on fait ce qu’il y a à faire. Et, hormis certains cas particuliers (hypothermie, intoxication médicamenteuse), au bout de 30 mn, on s’aperçoit que les manœuvres ne sont suivies d’aucune efficacité clinique et que cette personne n’a donc pas repris une activité cardiaque spontanée. Si on se trouve dans un cas de figure parfaitement clair (on exclue l’hypothermie, les intoxications médicamenteuses et puis quelques bizarreries), on s’arrête. On s’arrête pendant 5 mn. Cet arrêt a deux objectifs. Le premier, c’est de valider que cette personne est morte d’un arrêt du fonctionnement du cœur, sans doute possible, puisque si le cœur n’est pas reparti au bout de 5 mn, c’est qu’à-priori, il ne devrait pas repartir, et le deuxième, c’est que 5 mn est le temps nécessaire à la destruction finale, irréversible, définitive et complète du cerveau. De l’encéphale, plus exactement. Ces constats étant contre-validés – premier constat, il n’y a pas de reprise d’activité, deuxième constat, il y a effectivement pérennisation de cette absence d’activité – eh bien on va reprendre les manœuvres de réanimation cardio-pulmonaires, c’est-à-dire un massage cardiaque externe, qui peut être manuel ou automatisé, avec une ventilation mécanique au travers d’une intubation trachéale, et on va emmener ce malade [Il n’est donc pas encore mort ? Ndlr.] dans l’endroit de l’hôpital où il aura été décidé qu’on pourrait faire un certain nombre de choses [‘soins’ au préalable du prélèvement des reins de la personne, Ndlr.] … enfin ce cadavre, pardon, puisqu’il est devenu cadavre, il est officiellement mort, [CQFD : ce donneur d’organes meurt donc deux fois : d’abord la mort légale, ensuite la mort physiologique, au moment du prélèvement de ses organes, Ndlr.], ce cadavre, donc, est transporté de là où il a fait son arrêt cardiaque jusqu’à l’hôpital, et s’il était à l’hôpital au moment où il a fait son arrêt cardiaque, (...) il sera amené dans ce lieu. Et là qu’est ce qu’il se passe ? On va mettre en œuvre un système de refroidissement des organes avec des sondes artérielles et veineuses pour injecter un liquide glacé qui sera récupéré ensuite, avec un ballonnet qui sera gonflé au niveau de l’aorte sous-diaphragmatique, pour éviter toute irrigation au-dessus du diaphragme [il ne faut plus ’risquer’ d’irriguer le cœur, ni le cerveau, puisqu’il a été décidé que l’arrêt cardiaque de ce malade était irréversible, Ndlr.], on va pouvoir refroidir les organes, l’objectif, là, étant extrêmement simple : c’est d’éviter ce qu’on appelle les lésions d’ischémie chaude, c’est-à-dire les lésions que les organes vont subir pendant la période où l’organisme va passer de sa température standard, à partir de 37 degrés C (…), jusqu’à ce qu’il arrive à la température de la pièce. C’est ce qu’on appelle l’ischémie chaude. Ensuite, on convoque la famille. Alors, je vais être provocateur, mais c’est un peu volontaire, et vous me le pardonnerez, et là, on va lui annoncer deux nouvelles, une pas bonne, et une peut-être bonne. La première, pas bonne, c’est que malheureusement, son proche est décédé, et la deuxième, peut-être bonne, c’est : ’S’est-il de son vivant opposé à des prélèvements d’organes et de tissus ?’, puisque je vous rappelle que les prélèvements possibles sont reins et foie en ce qui concerne les organes, mais aussi tout un tas de tissus, comme déterminé dans le deuxième arrêté du 2 août 2005. Et la famille, là, a un temps extrêmement bref pour dire oui ou non, puisqu’il y a un compte à rebours qui a été lancé depuis le moment où l’arrêt cardiaque s’est produit, la totalité de la chaîne des prélèvements devant être bouclée dans un temps qui est extrêmement contraint, qui est de quelques heures. Et là, la famille a très peu de temps, puisque cette période de refroidissement des organes [ou ischémie chaude] ne peut pas durer longtemps (…). Et là, il y a deux situations : ou bien la famille rapporte que le patient s’était opposé de son vivant à des prélèvements d’organes, et les médecins avaient bien entendu vérifié de leur côté que le patient ne s’était pas inscrit sur le registre national informatisé des refus, et si c’est le cas, puisqu’il est légalement mort, eh bien, on va tout enlever, bien entendu, ou bien il n’y a pas d’opposition constatée, à la fois dans le refus national informatisé et par l’avis de la famille, et on va pouvoir lancer la procédure de prélèvement, ce qui veut dire que la famille aura un temps extrêmement restreint pour rester avec son proche. Alors, ça c’est une procédure qui, décrite comme ça, mon Dieu, n’est pas nécessairement extrêmement choquante, encore que, si on voulait être parfaitement honnête, il faudrait montrer ce que c’est. Puisqu’on joue sur l’émotion des 222 personnes malheureusement décédées en 2008 par défaut de greffon, j’aimerais qu’on joue aussi sur l’émotion de montrer comment on traite, avec bien sûr tout le respect qui lui est du, ce cadavre, et qu’on voie cette instrumentalisation du cadavre. Et je vous rappelle que pendant qu’on fait cette instrumentalisation, on n’a aucune idée de savoir si cette personne, alors qu’elle était vivante, était d’accord, ou non, pour qu’on lui prélève ses organes et donc qu’on fasse ceci ’après sa mort’ » (…) « L’Agence de la biomédecine, dans son protocole a, pour l’instant, limité ces prélèvements chez des gens qui ont entre 18 et 55 ans, mais il est bien évident que du jour où on aura des résultats extrêmement positifs on élargira la tranche d’âge, il n’y a d’ailleurs pas de raison de ne pas le faire, puisque nous faisons des prélèvements sur des personnes en état de mort encéphalique qui ont jusqu’à (et au-delà de) 65 ans, à l’heure actuelle. Il y en a eu quelques centaines faits l’année dernière, soit trois fois plus qu’il y a 7 ou 8 ans. Et donc là [dans le cas des prélèvements "à cœur arrêté", Ndlr.], c’est chaque personne qui peut se dire : ‘Ca pourrait être moi’. Quand les Français auront pris conscience que ça pourrait être une possibilité réglementaire et technique qui est tout à fait ouverte – Dieu merci, ils ne le savent pas – mais enfin quand ils vont en prendre conscience, toute personne va pouvoir se dire : ‘Oui, avant, moi je n’étais pas contre le don d’organes parce que moi, je serai jamais en mort encéphalique, mais là, maintenant, il faudrait que je me mobilise et que je dise [que je suis contre le don d’organes, Ndlr.] parce que là, un arrêt cardiaque, ça je peux en faire un’. Alors c’est vrai qu’on n’y pense pas beaucoup à 18 ans, Dieu merci il n’y a pas beaucoup de footballeurs qui font un arrêt cardiaque sur les stades de football, mais les gens de 50 ans qui meurent d’arrêt cardiaque dans la rue, il y en a quand-même un paquet. On a changé de registre. Et ça, ce n’est quand-même pas qu’un changement quantitatif, c’est aussi un changement qualitatif induit par la quantité. Et la généralisation de cette instrumentalisation veut dire, et je sais que je vais choquer certaines personnes, alors ce n’est pas pour le plaisir de les choquer, mais c’est ce que je ressens profondément au fond de moi : nous sommes rentrés, ou plutôt, sommes-nous rentrés, ce sera moins choquant, dans une logique de nationalisation des corps, sommes-nous tous devenus des réservoirs de pièces détachées au service de la société dans une logique utilitariste ?"

Et si, sous la pression de la liste des patients en attente de greffe, qui a littéralement explosé, à défaut de marchandiser le corps humain, on l’avait rendu consommable ? Le Professeur Boles parle d’un changement qualitatif induit par la quantité. Par la quantité non seulement du nombre de patients en attente de greffe, mais aussi par le passage de un pour cent de la population potentiellement concernée à … cent pour cent.

Le Professeur Boles reconnaît l’existence de pressions incitant à cet utilitarisme – pressions qu’il analyse :

"( …) faudrait-il encore que l’on fasse attention à la manière dont les choses sont dites et sont faites, c’est-à-dire que les pressions ne soient pas extrêmement fortes. Alors, on peut les détailler, les pressions : il y a des pressions médicales, il y a celles des chirurgiens transplanteurs, qui veulent des greffons à transplanter, sinon ils ne transplantent plus, il y a bien entendu celles de l’Agence de la biomédecine, dont le métier consiste à augmenter le nombre de malades à prélever, il y a des pressions sociétales (les associations de patients en attente de greffe et/ou de proches de patients en attente de greffe), il y a des attentes médiatiques, avec tout ce qui peut être mis en exergue dans des affaires qui sont toujours douloureuses (on utilise très bien l’émotion collective pour faire passer certains messages) [exemple de cas de figure : des enfants en bas-âge qui attendent un cœur, ou des poumons. Ndlr.], il y a des pressions gouvernementales et politiques et vous êtes au premier rang, Messieurs les Députés et Messieurs les législateurs, pour les connaître : vous subissez les pressions de tout ce monde-là et vous subissez une autre pression que nous subissons de notre côté aussi, qui n’est pas à négliger, et qui est celle du coût. [M. Bernard Loty, directeur médical et scientifique de l’Agence de la biomédecine, 22/07/09 : "L’argent qu’investit l’Etat dans la greffe est extrêmement rentable, puisque ce sont des millions d’économies d’Euros qui sont réalisées entre le coût de la dialyse et le coût de la greffe de rein. Ce sont des millions d’Euros qui ont été économisés pour l’Etat dans ce contexte-là.". La greffe de rein est plus économique que la dialyse pour la Sécu. Une greffe de rein coûte à la Sécurité Sociale une année de dialyse, tandis que cette même greffe lui permettra d’économiser en moyenne 9 années de dialyse, puisqu’un greffon de rein a une durée moyenne de vie de 9 années. Ndlr.] En clair, le coût d’une greffe rénale est très largement inférieur à celui d’une dialyse, dans le cadre de l’insuffisance rénale. [La grande majorité des patients en attente de greffe attendent un rein. Ndlr.]. Je ne méconnais pas l’importance de ces arguments, mais qu’on n’induise pas des comportements de pression liés à la pression de la conformité sociétale."

Qu’est-ce qu’affirmer que "le fait de ne pas donner ses organes relève du rejet de la solidarité" (Bernard Kouchner, tout récemment), sinon "induire des comportements de pression liés à la pression de la conformité sociétale" ?

Et si les transplantations d’organes constituaient une pratique d’exception par rapport à des principes ? Faire d’une pratique d’exception la norme, c’est se diriger vers un utilitarisme de la mort, que cet utilitarisme glorifie ou nie la mort.

"L’évacuation sociale de la mort"

"Pour Anne-Marie Moulin (1995), anthropologue et médecin, la crise de la transplantation dépasse les questions purement logistiques et économiques. L’évacuation sociale de la mort, constitue pour elle l’une des problématiques de la transplantation. (…). Les modalités des greffes d’organes sont précisées par différents textes – en particulier les lois de bioéthique de 1994 et leur révision en août 2004 –, encadrées par un dispositif technique spécifique et s’inscrivent dans une temporalité très réduite – au maximum quelques heures après le diagnostic de mort cérébrale". Les lois bioéthiques doivent être révisées à horizon 2010. "Les lois de bioéthique de 1994 (Journal Officiel 1994) ont introduit une nouveauté qui devrait contribuer à transformer la situation en reconnaissant à l’individu l’expression de son choix – consentement ou opposition. La création d’un fichier national des refus constitue la trace d’une autonomie reconnue de l’individu, introduisant une responsabilité pour lui, devant laquelle on observe un mouvement de recul sur lequel on peut alors s’interroger. Il existe en effet une disparité entre le résultat des multiples sondages effectués sur l’attitude des Français par rapport au don d’organes et un mouvement de retrait. Globalement favorables au don d’organes, ceux-ci hésitent ou refusent le prélèvement sur l’un de leurs proches." (Christiane KAPITZ, essai cité).

L’Institut Global Net Survey (GNS) a réalisé, "du 9 au 15 juillet derniers, un sondage qui révèle que 88 pour cent des Français seraient favorables au don d’organes, et que 77 pour cent d’entre eux seraient prêts à donner leurs organes. Les personnes qui pensent donner leurs organes le feraient pour sauver la vie de quelqu’un (85 pour cent), parce que s’ils étaient en attente d’un organe, ils apprécieraient que quelqu’un leur fasse un don (66 pour cent) ou parce qu’ils accordent peu d’importance à leurs organes après leur mort (41 pour cent). Cette dernière donnée révèle que 59 pour cent des sondés sont sensibles au respect de la dépouille. 23 pour cent des Français refusent le prélèvement de leurs organes après leur mort, la plupart du temps par égard pour leurs proches, d’autres parce qu’ils ne supportent pas l’idée que l’on touche à leur corps. Certains estiment enfin que leurs organes sont en trop mauvais état pour être prélevés." (Source : Yahoo ! Actualités 25/09/09)

Le docteur Marc Grassin, pharmacien, dans La Croix [Voir "La médecine a confisqué la mort", 14 juillet 1995], se demande si la campagne de sensibilisation au don peut résoudre à elle seule l’échec du don. Il établit "une relation entre le manque de don et le rapport à la mort et au corps généré entre autres par la médecine."

"La mort a disparu" (Professeur Daniel Loisance)

"Consentez-vous au prélèvement de vos organes après votre mort ?" : c’est en ces termes que l’on pose la question du don d’organes dans le discours public. Pour être plus transparent, et coller à la réalité des pratiques des transplantations, il faudrait demander : "Consentez-vous au prélèvement de vos organes à votre mort ?", car le constat de décès légal qui permet le prélèvement d’organes est particulier : la "mort encéphalique", ou l’"arrêt cardio-respiratoire persistant", ce dernier état, distinct du premier, permettant le prélèvement de reins sur donneurs "décédés suite à arrêt cardiaque non récupéré", constituent des constats de décès anticipés sur le plan légal : ce n’est pas un constat de décès à proprement parler, mais un constat d’irréversibilité d’un état conduisant à la mort. Ce constat d’irréversibilité est nécessaire aux pratiques des transplantations : on ne peut pas prélever des organes vitaux sur un patient en état de mort physiologique (un cadavre refroidi), il faut un donneur pour lequel le constat de décès prononcé sur le plan légal, et fondé sur un constat d’irréversibilité d’un état qui conduit à la mort, précède la mort physiologique. En évacuant la question de la mort du donneur d’organes, la médecine traite, ou fait croire qu’elle traite, un mourant comme un mort. La question de la mort est évacuée. Le grand public doit s’interroger sur le don.

Qui a évacué cette question de la mort ? La médecine, ou la société ? Les deux mon Capitaine ! La "règle du donneur mort", qui prévaut depuis les débuts des transplantations d’organes vitaux tels que le cœur, les poumons, le foie, les reins (encore qu’il existe la dialyse pour suppléer à l’insuffisance rénale), donc depuis la fin des années 60, a bien été établie par les législateurs, sous l’influence du corps médical. Que dit cette règle ? Toute personne ayant consenti au don de ses organes ne pourra faire l’objet du prélèvement de ses organes vitaux qu’après sa mort. On oublie de dire : après sa mort légale, qui précède sa mort physiologique. La population comprend : après sa mort physiologique, qui correspond à sa mort légale. Ce malentendu permet de faire en sorte que, dans un contexte légal de consentement présumé, la population ne s’intéresse qu’à la question du don, et non à celle de la mort. Dans le sondage cité, il est dit que les Français accordent "peu d’importance à leurs organes après leur mort (41 pour cent)". APRES leur mort. CQFD. Mais cette "règle du donneur mort", qui permet de "tordre et de manipuler la définition de la mort afin d’inclure progressivement sous ce ‘parapluie légal’ d’autres catégories de potentiels donneurs d’organes" (Professeur Robert D. Truog, Harvard Medical School, USA, 14 août 2008, New England Journal of Medicine) aurait-elle pu être mise en place par le législateur et le médecin sans l’assentiment de la population ?

"Au niveau collectif, les enjeux économiques sont loin d’être négligeables, pourtant, le coût des greffes est totalement occulté. Paradoxe de la transparence, élevée au rang de principe éthique, qui évacue pourtant l’une des dimensions de la greffe – le prix – au bénéfice de l’autre – le don d’organes.

Les greffes d’organes suscitent un intérêt très vif de la presse quotidienne, qu’elle traduit d’ailleurs davantage en termes de prouesse technique – ou d’échec – qu’en termes d’enjeux – humains, sociaux, économiques, politiques, juridiques ou éthiques. La spectacularisation de l’information a cette ambivalence de servir autant que de desservir le champ scientifique. Elle salue les performances médicales ou biomédicales, mais n’hésite pas à dénoncer les ’dérives’ du système – trafics d’organes, gestion défectueuse de l’activité de transplantation." (Christiane KAPITZ, essai cité).

Illustration directe de ces propos :

Dans son livre intitulé "Le cœur réparé" (éditions Robert Laffont, 1999), le professeur Daniel Loisance, qui dirige le service de chirurgie cardiaque à l’hôpital Henri-Mondor, Créteil, et qui a effectué de nombreuses transplantations du cœur, fait un surprenant constat : "La mort a disparu".

"L’attente du public a joué un rôle considérable dans cet essor de la chirurgie cardiaque ; elle a été telle et reste d’ailleurs si considérable qu’elle a permis le progrès en autorisant les entreprises les plus folles, les intervention à cœur ouvert sous circulation croisée ou en hypothermie profonde dans les débuts, l’utilisation des ventricules artificiels plus récemment. En réalité, la société comme la médecine ont plus changé au cours des trente dernières années que pendant plusieurs siècles précédents. Elle a tout fait, et fait encore tout, pour évacuer la maladie, la mort. Progressivement, nous nous sommes mis à vivre dans le culte du moi, le culte du beau, du sain, du sportif triomphant. Les exemples sont trop nombreux pour être cités, qui montreraient que la maladie est désormais vécue comme une injustice, comme une charge inacceptable. Dans cette logique, la mort a disparu. (…) Ce souci constant d’évacuer la maladie, la souffrance, la mort explique une réceptivité sans mesure à l’annonce du moindre progrès médical. Cette attente excessive autorise en réalité les excès les plus déraisonnables. Souvenons-nous : le sida est vaincu, par l’utilisation de la cyclosporine, ce nouvel agent immunosuppresseur qui permet les greffes. Madame la ministre de la Santé le dit, c’est donc vrai." [Oct. 85 : Échec de la cyclosporine. Georgina Dufoix, ministre des Affaires sociales, annonce les résultats " très encourageants " obtenus par des chercheurs français ayant administré cet immunosuppresseur à cinq malades. L’échec sera retentissant. Source : http://www.arcat-sante.org/publi/infectionVIH/9chrono.html]

Poursuivons la lecture du livre du Professeur Loisance : "Souvenons-nous aussi des affirmations sans cesse répétées, à toute occasion, dans tous les médias, pendant plus de dix ans : ‘la greffe cardiaque, ça marche’, et les difficultés des véritables spécialistes pour émettre des réserves. Ceux qui essayaient de situer la greffe dans son véritable contexte, de parler des vrais problèmes n’étaient pas écoutés. Le refus de poursuivre l’activité de greffe dans l’équipe du Professeur Dubost à l’hôpital Broussais, au lendemain du décès du premier Européen ayant vécu parfaitement bien plus de deux ans (…), n’a eu aucun impact dans l’opinion. Les raisons, d’une rigueur scientifique et morale peu discutable, n’ont été ni relayées par les médias ni entendues. Par contre la société a été réceptive aux discours de ceux qui continuaient, sans justification scientifique, à tenir un discours simplificateur. En 1968, au second congrès international de la Société de transplantation, moins de deux ans après la première greffe cardiaque, un des pionniers de la recherche dans ce domaine n’hésitait pas à dire dans son discours inaugural : ‘La transplantation des organes sera assimilée à toutes les autres pratiques médicales … et il n’y a pas là matière à discussions philosophiques. Et ceci sera comme cela pour la bonne et simple raison que les gens sont constitués de telle manière qu’ils préfèrent être vivants que morts'". Le Professeur Loisance fait-il allusion au Professeur Jean Hamburger, président de la Société de transplantation de 68 à 70 ? Il en est d’autres qui balaient les questions philosophiques et morales posées par les prélèvements d’organes vitaux d’un revers de la main. Le Professeur Christian Cabrol, pionnier de la transplantation cardiaque en Europe, n’hésite pas à marteler des affirmations, largement relayées par la presse, telles que : "Tout ce qui n’est pas donné est perdu !", "Se faire enterrer avec ses organes constitue un crime social !". Ces discours simplificateur ont de multiples effets secondaires. On peut citer l’émission grand public du 21 septembre 2009 sur France 3 : "Sauvez des vies, vos questions, nos réponses", présentée par Marina Carrère d’Encausse et Michel Cymes : Paul-Auguste Germain, 27 ans, greffé des poumons pendant l’été 2009, vient apporter son témoignage : le traitement anti-rejet, les immunosuppresseurs, c’est "peanuts", dit-il. Il est sauvé, guéri à tout jamais. (Source : http://www.lexpress.fr/actualite/sciences/sante/un-temoignage-pour-encourager-les-dons-d-organes_789027.html). Le style de l’article de l’Express qui relaie son témoignage met en avant le héros revenu de l’enfer : "Paul-Auguste, 27 ans, greffé durant l’été, témoigne de sa renaissance. Trop de patients décèdent encore faute d’un nombre suffisant de donneurs, un sujet abordé ce lundi soir sur France 3 dans l’émission de Michel Cymes et Marina Carrère d’Encausse.

"Le jeune homme arbore le sourire bravache de ceux qui ont flirté plusieurs fois avec la mort (…). ’J’ai toujours agi comme si la maladie n’existait pas, explique-t-il. Quand je suis né, les enfants touchés par la mucoviscidose avaient seulement 4 pour cent de chances d’atteindre l’adolescence ...’ Le gamin de Tours (Indre-et-Loire) a pourtant dépassé l’échéance annoncée et s’est aussitôt mis à conduire des motos à allure déraisonnable, à écumer les ‘rave parties’ et à abuser des drogues dures. Jusqu’à l’overdose, en 2001, dont il réchappe pour ne plus jamais replonger. ‘J’ai toujours eu de la chance’, résume-t-il sans une once d’ironie.
Au moment d’attaquer le dessert, la cuillère tremble dans la main de Paul-Auguste. ‘C’est l’effet des médicaments antirejet. Rien du tout, comparé à mon état d’avant, affirme-t-il posément. Mes poumons étaient tellement abîmés qu’ils se remplissaient régulièrement de sang. Je pouvais m’étouffer à tout moment.’ (...)."

Il faut savoir que la moitié des patients qui décèdent chaque année sans avoir pu être greffés (222 l’année dernière) sont des patients atteints de mucoviscidose et qui attendaient une greffe des poumons. Gardons-nous de juger Paul-Auguste Germain pour son déni de la maladie (et de la mort ?), mais constatons une réalité : dans cette émission grand public, toute récente, la greffe est présentée comme un miracle. Elle efface la maladie. (Source). "

L’éthique du patient en attente de greffe, pour quoi faire ?! "(…) ceci sera comme cela pour la bonne et simple raison que les gens sont constitués de telle manière qu’ils préfèrent être vivants que morts". Un point c’est tout.

Dire "don d’organes", c’est reconnaître les réalités : le don d’organes passe par la mort. On ne prélève pas des organes vitaux sur un cadavre refroidi. Le prélèvement de ses organes vitaux modifie la toute fin de vie du donneur d’organes. Affirmer "le don d’organes est un devoir", c’est nier ces réalités. Le devoir d’organes nie la mort du donneur d’organes. La mort a disparu.

Dans un monde où la mort est niée, l’éthique du patient en attente de greffe n’a pas sa place. On préfère accuser les autres d’"égoïsme" et de "repli sur soi". "Faute de greffe", martèlent les médias de tous les pays, X patients sont morts cette année. Faute ?? Le défaut de don constitue une faute, tout comme les accidents de la route. La greffe, d’exception, est devenue, d’après les medias, une "indication courante". Et si la faute, c’était d’induire "des comportements de pression liés à la pression de la conformité sociétale" ?

Le Lotto supplante l’éthique : il y a les perdants (les patients en attente de greffe) et les gagnants (ceux qui ont gagné le gros lot : la greffe). La communauté médicale scientifique se donne de la peine pour convaincre le patient en attente de greffe que tout ira mieux après. Mais pourquoi ?? Nous voyons bien que Paul-Auguste n’avait pas le choix, pour peu (excusez du peu !) qu’il veuille vivre. Ceux qu’il faut convaincre, ne serait-ce pas plutôt les usagers de la santé ? La greffe est présentée comme un miracle pour encourager la générosité de la population. Oui, mais au prix de dégâts considérables dans le camp des patients en attente de greffe : un insupportable sentiment d’injustice, pour les patients "en attente de greffe", rend si douloureux ce problème de pénurie d’organes à greffer. "Les greffes victimes de leur succès", lit-on dans les medias. On pourrait tout aussi bien parler du syndrome du pompier pyromane. Il faut rendre la greffe victime de son succès, la montrer sous un jour miraculeux, bref, il faut la survendre. Les patients greffés vont promouvoir le don d’organes dans un bel élan de surcompensation (vaine tentative de compenser le don qu’ils ont reçu. Il n’y a pas de compensation possible). Plus on greffe, plus la liste des patients en attente de greffe augmente. Ce discours présentant la greffe comme un miracle, qui est un discours simplificateur, est peu généreux envers les patients en attente de greffe (osera-t-on parler de sadisme ?) Dans la population des patients greffés et autres patients en attente de greffe, il y a deux camps : les gagnants (les greffés) et les perdants (devinez qui). Dans la population tout court, il y a aussi deux camps : les généreux (ceux qui donnent) et les égoïstes (ceux qui ne donnent pas). Je souhaite ici dénoncer cette fiction, car ce n’est rien d’autre qu’une fiction, qui est préjudiciable aux patients en attente de greffe, et aux chirurgiens transplanteurs qui ne sont pas tous, je puis vous l’assurer, dans la promotion à tous crins du don d’organes. Je vous propose de sortir de cette fiction et de revenir à la réalité, en poursuivant la lecture du livre du Professeur Loisance : pour lui, ces excès ont permis l’installation durable d’un malaise social, fruit (amer) des "excès de chaque partenaire, les spécialistes et la société". Le Professeur Loisance cite une sociologue, Renée Fox, qui dans son livre intitulé "Spare parts" ("Pièces détachées"), dénonce la "dérive d’un pouvoir médical excessif et des efforts faits par la société pour perpétuer sans fin la vie et réparer, reconstruire l’homme par le remplacement d’organe. Nous voulons nous séparer des souffrances humaines, du mal social, culturel, spirituel qu’engendrent ces excès sans limites". Savez-vous qu’en France, des greffons dits "marginaux" sont greffés à des patients en attente de rein ? Ces greffons sont de mauvaise qualité, et les chirurgiens, au lieu de greffer un seul rein par patient en attente de greffe rénale (on peut vivre avec un rein), en greffent deux par patient, en espérant que deux reins qui fonctionnent mal arriveront à faire le travail d’un seul qui fonctionne correctement … Avec son livre intitulé "Le cœur réparé", le Professeur Loisance, chirurgien transplanteur spécialiste du coeur, s’était donné un objectif :

"Si le sociologue peut dénoncer ces excès, le chirurgien, au contact du malade, ne peut ‘quitter le milieu’. Il peut par contre essayer de se faire entendre, parler vrai, expliquer les malentendus, ramener la société à la raison."

Vaste programme, surtout lorsque l’on voit l’émission grand public toute récente qui continue à présenter la greffe comme un miracle qui efface la maladie, et à gommer les problèmes d’éthique : la mère de Paul-Auguste affirme que le "greffon" reçu par son fils provient d’un "mort", et que cela ne pose donc "aucun problème de conscience". De là à aller promouvoir le don d’organes sur Twitter (outil de réseau social et de ‘microblogging’), il n’y a qu’un pas, que certains chirurgiens transplanteurs, Dieu merci, se garderont bien de franchir. Savez-vous qu’un rein transplanté a une durée de vie moyenne de 9 à 14 ans ? Que les médicaments immunosuppresseurs peuvent provoquer des maladies telles que cancer (cancer de la peau), diabète, ostéoporose, etc. ? Qu’il existe ce qu’on appelle la "maladie du greffon" ?

Le Professeur Loisance "parle vrai" (ouvrage cité) :

"Il semble bien que, du fait d’une attente probablement excessive, d’une méconnaissance quasi-totale du prix à payer pour obtenir le résultat espéré, attendu, le patient soit exposé, ’in fine’, au risque d’être déçu du résultat qu’il observe (…). Greffé cardiaque, il attendait avec la disparition des rejets aigus précoces, du fait de la cyclosporine, de leur détection plus sûre, une survie prolongée, et il admet mal cette évolution lente, insidieuse de la maladie du greffon, qui à terme va le tuer." (Copyright Robert Laffont SA, Paris, 1999)

On est loin de la greffe miraculeuse, qui efface la maladie, du greffon-"peanuts", du traitement antirejet-"peanuts" … Ainsi, la greffe ne serait pas la panacée, elle poserait des problèmes d’éthique et (un comble !) renverrait l’homme à ses limites ? Le "plâtrage" du discours public se fissure.

Est-ce "avoir du sang sur les mains" que de dire la vérité ?

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