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J'ai posé deux questions hier (dimanche 26/08/2007) :
1.-) Pensez-vous que le donneur d'organes soit bien traité ?
J'ai ajouté le témoignage suivant, en précisant qu'il s'agissait d'un témoignage de médecin, mais sans préciser s'il s'agissait d'un donneur vivant ou "décédé" :
"Il est évident, et ce n'est nié par personne, que les soins au 'donneur' sont profondément modifiés lors de l'optique d'un prélèvement. C'est tout à fait incompatible, à mon avis, (et ce devrait être l'avis de tout philosophe et de tout médecin honnête) avec une prise en charge médicale 'éthique'. Le 'donneur' perd sa qualité d'être humain, de malade, il est réduit à l'état de 'moyen', de pourvoyeur d'organes. La qualité de relation médecin/malade est par là totalement pervertie puisque le médecin ne poursuit plus le bien de celui qu'il a en charge. Au mieux, on est au pire de l'acharnement thérapeutique. Je ne comprends toujours pas que nos philosophes et chantres de l'éthique à tout crin n'aient jamais exposé 'ex cathedra' ces considérations simples. Ce silence est lui aussi scandaleux."
En l'espace de quelques heures, j'ai reçu 7 réponses, dont une seule interprétant (à tort) le témoignage du médecin comme une critique du prélèvement d'organe sur donneur vivant.
- Aucun ne s'est plaint!
- La situation de donneur d'organe(s) suppose une fin de vie imminente ou inéluctable et je m'étonne qu'un médecin puisse penser ça ? Quoi qu'il arrive le patient condamné est respecté jusqu'à la fin qu'il soit donneur ou non : le soigner c'est aussi l'accompagner jusqu'à la mort même sans le sauver ! Alors si sa mort peut sauver une vie... Son traitement est très digne et les conditions drastiques, alors donnons et sauvons. Je pense que ce médecin y voit plus le refus du traitement de son corps une fois décédé peut être ?
- Il faut savoir qu'un donneur d'organe est une personne qui est en état de mort cérébrale, c'est-à-dire qu'elle n'a plus aucune activité cérébrale. C'est vrai que le but est de garder au maximum le patient vivant et stable au niveaux des paramètres vitaux, pour permettre de trouver des receveurs. En France, on ne prélève des organes que si le patient était consentant de son vivant et l'avait signalait au centre des greffes mais malgrè tout si la famille refuse, on ne prélève pas.
Si les équipes médicales sont humaines le donneur gardera juusqu'à la fin son côté personne à part entière et sera respectée. Il ne faut pas croire que l'on considère le donneur comme un objet, c'est aussi dur pour lui, pour les familles et les équipes. Et ne pas oublier qu'une vie peut en sauver des dizaines. Biensûr tout est fait pour sauver les organes c'est sans doute la que c'est moins humain pour ceux qui restent après le décès de se dire qu'on s'est battu pour sauver un rein ou un foie mais il faut se dire aussi que comme ça on sauve des enfants, des ados, des papa et mamans.
- Lorsqu'on en arrive à penser que X puisse devenir un donneur d'organes cela veut dire tout simplement que :
. le cerveau de X est MORT (plus d'ondes cérébrales confirmées à deux reprises par un EEG avec autres signes recherchés par deux médecins en suivant la législation -en france rigoureuse) et donc que jamais X ne pourra guérir même si
. le corps de X continue à vivre pendant quelques temps grace à des machines (amenant oxygène aux poumons, liquides et nourriture aux organes)...
Une fois la décision prise, les organes doivent être prélevés très vite pour être acheminés encore plus vite jusqu'aux patients eux bien en vie et qui attendent désespérement un organe sain pour pouvoir reprendre leur vie !! Est ce trop cher payé ??? Et le corps du défunt X est alors tranquillement préparé et remis à sa famille pour son enterrement.
- Je ne vois donc pas du tout comment la qualité de la relation médecin/ malade peut être altérée dans un tel contexte :
. d'un côté il y a X qui est mort cliniquement et donc n'a plus besoin de médecin mais d'un prêtre
. de l'autre il y a Y et Z qui attendent avec angoisse que leur médecin leur annonce la bonne nouvelle !!
- Il y a des gens qui sont prèts à tout pour qu'on les entende, même à dire n'importe quoi sur un ton très offusqué. On ne soigne plus pareil quelqu'un quand il est mort? ça alors!!?!!
- Avis aux précédents, un donneur vivant peut donner un rein ou une moitié de foie sans mettre en danger sa santé. C'est probablement de cela qu'il s'agit. Le médecin concerné devrait revoir ses considérations sur le principe de bienfaisance, car même dans un soin courant, on est parfois obligé de faire mal, de léser le patient, de l'ouvrir, voire de le mettre en danger de mort afin d'atteindre un but qui nous semble ou mieux qui semble au patient valoir le risque. Ce n'est donc de loin pas le seul cas où on commet un acte nocif sur un patient, pour répondre à un espoir thérapeutique. Il est intéressant de voir que dans la description qui est faite, le patient n'a droit à son respect d'être humain que s'il a le statut de malade, les gens en bonne santé étant exclus des préoccupations du médecin. Si de tels médecins exercent, c'est très dommage pour le corps médical, mais pas spécifique au don d'organe. Le gros hic de cette argumentation, à mon sens, est que l'auteur SAIT, LUI, ce qui est bien pour le donneur, puisqu'il sait quand un médecin recherche le bien du patient ou pas. C'est une vision très paternaliste qui se défend mal dans la conception de la relation médecin-malade actuelle. Ayant ouï, comme tout le monde, le nombre de gaffes que les médecins peuvent commettre pour se couvrir, j'imagine qu'ils auront tout de même moins tendance à reconnaître l'existence d'une complication chez le donneur, dont il sera de manière factuelle le seul responsable.
2.-) Pensez-vous que le discours public sur le don d'organes est assez objectif ?
Le discours public sur le don d'organes se situe entre promotion et information, sans jamais s'affranchir de la promotion. Pensez-vous que la communication grand public devrait être plus objective et ne pas chercher à promouvoir le oui par rapport au non ?
Je n'ai eu que deux réponses, ce qui est curieusement peu. Le don, vu comme principe (dogme), est érigé en consensus ("social correctness") : la question afférente au prélèvement d'organes, sous-(en)tendue dans la question formulée, se confond avec celle (toute théorique) du don des organes.
- C'est à dire, expliquer aux gens les bienfaits du don d'organes, les vies sauvées? C'est ce qu'il faudrait. Je suis moi-même donneuse, mais je n'ai vu aucune pub sur le sujet, c'est vrai que l'information, la prise de conscience tout simplement manquent.
- Il est impossible d'être objectif dans un sujet pareil. On parle quand même d'un acte qui sauve des vies, et sauver des vies, ça amène forcément de la subjectivité. Et pour moi, c'est quand même plutôt objectif de dire aux gens que parce qu'ils ne se sont pas exprimés de leur vivant, leur famille risque d'hésiter à accepter le don d'organe, et qu'à cause de ce détail, des centaines de personnes meurent chaque année alors qu'on aurait pu les sauver. De toute façon, une personne opposée au don d'organe le fera savoir à son entourage, tandis que quelqu'un qui n'est pas contre, ne verra pas forcément l'intérêt ou l'opportunité d'en parler. Ce sont ces personne qui ne se prononcent pas qui sont visées, et si les opposants se sentent coupables, c'est qu'il y a une raison.
Ces réponses sont conformes à l'objectif principal du discours public sur le don d'organes : à la question du constat de décès sur le plan de l'éthique (mort encéphalique, prélèvements "à coeur arrêté"), on répond par la beauté du don, selon le principe : la mort est dissensuelle, tandis que le don est consensuel. La volonté de donner est perçue comme une motivation, une dynamique subjective et collective à la fois, dont les rouages bien huilés fonctionnent si quelques détails ne viennent pas les gripper. Ces détails sont le refus du don, perçu comme un oubli, une erreur d'étourderie : il est tellement évident que tout le monde veut donner. On pourrait comprendre que le refus du don est dans ce cas l'exception qui confirme la règle (l'acceptation du don).