La clôture des Etats-Généraux de la bioéthique a eu lieu le 23/06/2009. Au coeur du débat concernant le prélèvement d'organes, une question : faut-il créer un registre du "oui" sur lequel puissent s'inscrire les personnes favorables au prélèvement de leurs organes lors de leur décès ? Selon le Professeur Jean Leonetti, président du comité de pilotage des Etats-Généraux de la bioéthique, les Français seraient plutôt "pragmatiques et ouverts aux solutions pour augmenter le nombre de donneurs" dans le domaine des greffes d'organes. Roselyne Bachelot, ministre de la santé, s'interroge pour sa part sur la nécessité de réviser la loi tous les cinq ans : "Cela ne nous semble plus tout à fait approprié. Il faut aller peut-être vers un système de révision continuelle". Sources : Le Figaro (Sandrine Cabut) - Libération (Charlotte Rotman) - La Croix (Pierre Bienvault)
Pourquoi un registre du "oui" dans un contexte légal de consentement présumé ? Le saviez-vous ? Il existe déjà un registre du "non", sur lequel on peut s'inscrire si on ne consent pas au don de ses organes à sa mort. Mais l'Agence de la biomédecine, qui gère ce registre du "non", indique chaque année qu'il existe très peu de personnes inscrites sur ce registre. Pourtant, 30 pour cent des familles confrontées à la question du don d'organes opposent un refus de prélèvement des organes vitaux sur leur proche, ce taux de refus peut atteindre 50 pour cent en pédiatrie (service hospitalier soignant des enfants). Or on rencontre, dans notre société, très peu de gens contre les greffes. Peu de gens refuseraient une greffe ...
Alors, d'où vient ce refus ? Et s'il venait non pas de la question du don, mais de celle de la mort ? Quelle mort pour une donneur d'organes sur lequel les organes vitaux vont être prélevés ?
Consentement présumé, registre du "oui", registre du "non" : pourquoi tout cela ne marcherait-il pas comme cela le devrait, à savoir : de manière optimale ? Quel problème, bien plus profond et ignoré du grand public (et pour cause !), se cache derrière la question du don ? Et s'il s'agissait de la "règle du donneur mort", à savoir : tout donneur d'organes doit être mort sur le plan légal au préalable du prélèvement de ses organes vitaux. Or ce même donneur fait l'objet de soins avant d'aller au prélèvement. Ce mort légal est donc un mourant sur le plan physiologique. Est-ce éthique de prélever un mort légal qui est un mourant sur le plan physiologique ? Il faut bien l'admettre : l'aspect éthique du prélèvement des organes vitaux chez un donneur d'organes en fin de vie ne repose pas sur le fait que ce donneur est mort. Mais admettre cela, c'est accepter de remettre en question l'intangible "règle du donneur mort", qui a force de loi en France. Une question se pose alors : dans un contexte sociétal où la greffe est reconnue comme soignant et sauvant des vies, améliorant le confort de patients, comment promouvoir l'activité des prélèvements d'organes (car point de greffe sans prélèvement) si à aucun moment on ne s'affranchit de la "règle du donneur mort" ? Un registre du "oui" ne s'attaquerait au problème qu'en surface, tout comme le registre du "non" mis en place dans les années 90. S'attaquer au problème en profondeur, ce serait s'attaquer à l'intangible, l'inviolable "règle du donneur mort".
En 2008, le Professeur Bernard Debré affirmait : "Il faut sortir des dogmes avec lesquels on jongle pour justifier les prélèvements d’organes". Est-ce à dire que le Professeur Bernard Debré est contre l'activité des transplantations ? Non, assurément ! Pense-t-il à la "règle du donneur mort" en tant que dogme ? Peut-être. Peut-on être pour les greffes, mais contre la "règle du donneur mort" ? ...
Consentement présumé, registre du "oui", registre du "non", "règle du donneur mort" : des incohérences !
1 commentaire:
Une petite rectification : dans une situation de prélèvement "à coeur arrêté" en France (suite à décès par "arrêt cardio-respiratoire persistant"), on ne peut prélever que les reins et éventuellement le foie. Le coeur est en trop mauvais état pour être prélevé dans cette situation. Le coeur ne peut être prélevé, en France, que sur des patients en état de "mort encéphalique". Mais aux USA, le coeur peut être prélevé sur donneurs de la catégorie III de la classification internationale dite de Maastricht. Cette catégorie de donneurs n'est pas autorisée en France.
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