Saviez-vous qu'en Espagne on motive les dons d'organes par de l'argent ? Que l'Espagne est le pays d'Europe où est recensé le plus grand nombre de donneurs ? Que si vous êtes sans enfant(s) et seul, vous pourrez être donneur d'organes (le cas échéant), mais certainement pas receveur ? Quels sont les problèmes éthiques liés à la transplantation en Allemagne ?
Dans le cadre de son émission "Thema", Arte, la chaîne de télévision franco-allemande, a diffusé le 27 février 2007 un documentaire intitulé "Les fabricants de cœurs - La médecine transplantatoire du futur". Realisation: Till Lehmann, ARTE.
Dans ce documentaire en trois parties, la première nous entraîne dans une visite médicale du futur : elle est anonyme : "le patient est un numéro ; le médecin un ordinateur". Nous nous projetons dans la peau de Peggy, 30 ans, qui souffre d'une malformation congénitale du cœur. Quelle sera "la riposte high-tech du futur à l'infarctus" ? Un cœur issu de cellules souches ? Une xénogreffe de cœur d'animal ? Une implantation de cœur-machine (machine miniature) ? Cette médecine réalisant le fantasme de l’homme-machine devrait être opérationnelle dans quelques années seulement, d’ici 15 ans environ, lorsque les problèmes d’adaptabilité du cœur artificiel seront résolus. Il s’agit de problèmes de biocompatibilité : comment le sang va-t-il réagir avec un cœur artificiel ? Ce sont là des problèmes qui ne sont pas encore résolus, mais qui le seront.
Ces trois options sont étudiées à partir des réalités d'aujourd'hui : Le Docteur Ingénieur Ulrich Steinseifer conçoit des machines miniatures à l'Institut de technique biomédicale d'Aix-La-Chapelle ; le Dr. Eckart Thein, spécialiste de xénotransplantation, vétérinaire à l'université de Munich, élève des cochons clonés porteurs de gènes humains, pour produire des cœurs à greffer sur des patients humains – ce qui signifie que ces cochons-médicaments devront donner leur cœur. "Plusieurs millions de cochons finissent chaque année en rôti. Pourquoi ne pas en élever quelques milliers pour leurs organes ? Chaque jour, plusieurs milliers de malades meurent faute de don" (Dr. Thein). Le Professeur Augustinus Bader s'occupe de biologie des cellules souches à l'université de Leipzig. Suivez ces trois "pionniers" : tout est expliqué, disséqué, analysé, soupesé. Un chef d'œuvre de précision, une porte ouverte sur le futur...
La seconde partie montre une greffe d'organes : deux poumons sont greffés sur Manja, une femme de 31 ans, atteinte de mucoviscidose. Lorsque Manja subit cette opération délicate (un donneur a été trouvé), elle a une capacité respiratoire d'à peine 20 pour cent. Le documentaire suit la jeune femme et sa famille proche (époux, fille de dix ans) avant la greffe, peu après, et au bout d’un an...
Dans la dernière partie de ce documentaire, nous sommes au cœur des problèmes éthico-légaux posés par la transplantation dans le monde médical hyper technique d'aujourd'hui. Zoom sur un exemple : en Allemagne, tous les tissus humains relèvent désormais de la loi allemande sur les médicaments. Le problème, c'est que cette loi confère un statut totalement nouveau aux tissus humains, qui acquièrent désormais une valeur marchande et peuvent être vendus ! Le don de tissus est problématique car dans toute l'Europe, le don d'organes doit être gratuit, il est interdit de les vendre. Ce documentaire montre comment le prélèvement de cœurs sur donneurs en état de mort encéphalique conduit à la production de tissus à valeur marchande : les valvules cardiaques. Une partie seulement du cœur prélevé est conservée - les valvules, qui acquièrent un statut de médicament et peuvent être vendues. Le donneur en état de mort encéphalique sur lequel le cœur a été prélevé a pourtant consenti à un "don" anonyme et gratuit...
Ce documentaire donne des exemples concrets d’incitation financière au don d’organes (Espagne), du commerce de tissus humains (Allemagne). En anticipant la visite médicale de l’an 2020, la question qui se pose finalement est : va-t-on vers une libéralisation complète des dons ? Une chose est certaine : la règle du don (gratuité, anonymat) est remise en question.
Compte-rendu de ce documentaire (document PDF, 10 pages) :
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Visualiser la 3ème partie du documentaire :
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NB: cette troisième partie est découpée en quatre séquences. Commencer par la séquence 1.
==> Lien ARTE : http://www.arte.tv/fr/histoire-societe/L-homme-immortel/1480372,CmC=1493726.html
Cell Techniques and Applied Stem Cell Biology at the Universität Leipzig (Germany) / Cellules souches : régénération individualisée, Leipzig ==> cliquer ici
En décembre 2006, l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et techniques au Sénat a examiné le rapport de M. Alain Claeys, député, sur les recherches sur le fonctionnement des cellules vivantes.Sénat : rapport de M. Alain Claeys, député, sur les recherches sur le fonctionnement des cellules vivantes (décembre 2006) ==> cliquer ici.
3 commentaires:
Une précision concernant le documentaire d'Arte, "Les fabricants de coeurs" (3ème partie) :
En Allemagne, suite à la loi assimilant les tissus humains à des médicaments, les banques de tissus sont également autorisées à récupérer les coeurs "ex-transplantés", c'est-à-dire les "anciens" coeurs de patients ayant bénéficié d'un nouveau coeur grâce à une greffe. Sur cet "ancien" coeur désormais privé d'usage, il est possible de récupérer (recycler en "médicament") l'aorte cardiaque et/ou l'aorte pulmonaire (souvent seulement l'une des deux, car n'oublions pas que ce coeur de receveur a un grave défaut, c'est même pour ça qu'un autre a dû être greffé à la place). Cette aorte est découpée, traitée chimiquement, conditionnée et conservée à très basse température. Elle devient alors un "médicament" destiné à la vente, et de fait : sa vente n'est pas un problème... Ceci est expliqué dans la troisième partie du documentaire d'Arte. Comme quoi, on peut "recycler" en médicaments destinés à la vente les coeurs de donneurs et ceux de receveurs !
Ce message vient d'être posté, mais j'ai supprimé les coordonnées et le nom de son auteur car ce weblog d'information sur les transplantations d'organes n'a pas pour but de promouvoir la vente ou le trafic d'organes, interdits par la loi en Europe. En remerciant par avance l'auteur de ce message pour sa compréhension.
"Monsieur/ mesieurs
Je suis un jeune africain vivant à cotonou; voyant combien les medecins courent et crient par les medias juste pour des transplantations d'organes humaine je me suis décidé à donner quelque chose en moi /une partie de moi pour sauver de vies humaine si vous appréciez moi avis je vous pris de me contacter à mon mail dans le cas contraire ecrivez-moi toujours ce sera décevant pour moi si personne ne partage cela avec moi
Je suis là pour sauver des vies humaines n'hexitez donc pas à me contacter."
La chaîne de télévision franco-allemande Arte s'est penchée sur les aspects financiers des transplantations d'organes, voir le documentaire diffusé début 2007 : "Les fabricants de cœur" :
En Allemagne, une patiente diabétique souffre depuis des années de troubles circulatoires dans les jambes. Pour garder ses jambes, la solution est le remplacement de vaisseaux dans les deux jambes (greffe de vaisseaux). Pour un nombre croissant de personnes, la greffe reste la meilleure solution. Les 75.000 € que coûte la transplantation sont pris en charge par l’assurance maladie de la patiente qui va être greffée. En 40 ans, elle y a déjà versé 200.000 € de cotisation. A 67 ans, cette patiente a le profil type du patient du futur : son âge et son tableau clinique seront parmi les plus fréquents.
Le Cabinet Ernst and Young (spécialisé en audit, droit et finance) a réalisé une étude portant sur l'"accès aux soins médicaux en 2020" : le système de la santé sera soumis aux lois du marché, c’est une tendance qui est déjà vérifiable à l’heure actuelle : on assiste déjà à la commercialisation des organes et tissus en Allemagne, considérés comme des médicaments. Les banques de tissus humains sont donc désormais dirigées dans un but lucratif en Allemagne. Un cœur humain provenant d’un donneur passe du système de don gratuit à celui de marchandise commercialisable. Rudolf Böhlke, consultant à Ernst and Young : "on voit déjà des industries pharmaceutiques qui sont cotées en bourse. C’est la même chose avec les cabinets de médecins libéraux (…). On retrouve donc déjà certains éléments du système libéral dans le système de santé actuel. (…) Le grand problème de notre système de santé, c’est qu’aujourd’hui, on ne comprend toujours pas qu’on ne peut pas occasionner que des dépenses. Le système de la santé fonctionne comme un vrai marché. Il emploie plus de personnes que l’industrie automobile, par exemple. C’est le plus grand marché, la plus grande branche professionnelle d’Allemagne. Ca signifie que l’utilisateur, le consommateur, doit comprendre que l’Etat n’est pas le seul responsable de la santé publique et de son financement, mais que ça concerne chacun d’entre nous. Mais ça, c’est une chose qui est complètement passée sous silence dans le système tel qu’il existe depuis 50 ou 60 ans. (…) Cela fait plusieurs années que le nombre d’hôpitaux diminuent. En 2020, on estime qu’il y n’y aura plus que 1500 hôpitaux. Ce n’est pas catastrophique, ça ne fait qu’un quart en moins. Ce qui est plus grave, c’est que les structures vont changer. Aujourd’hui, on trouve principalement des hôpitaux publics. Mais en 2020, la majorité des établissements seront privés. Ils commencent déjà à gagner du terrain. (…) Ce qui va radicalement changer, ce sont les frais de participation supportés par le malade. Aujourd’hui, ils sont en moyenne de 12%. En 2020, ils seront d’environ de 30%. Cela correspond à une multiplication par 5, parce que le volume du marché va pratiquement doubler. Ca veut donc dire que le consommateur devra renoncer à quelques achats, s’il veut pouvoir se payer la même qualité de soins qu’aujourd’hui. C’est difficile à accepter, mais c’est le seul moyen pour compenser l’augmentation des dépenses".
Quand on parle de transplantation d’organes humains, il ne peut être question de commerce. C’est la loi. Il n’en reste pas moins que les valves cardiaques peuvent être commercialisées en Allemagne. Mais le donneur et sa famille, quant à eux, ne toucheront rien…
Aujourd’hui en Allemagne, les précieux dons d’organes sont encore gérés par Eurotransplant. Mais à l’avenir, qui pourra encore se payer une transplantation ? En Allemagne, les tissus humains sont dorénavant soumis aux lois du marché. Si c’est un jour le cas pour les organes humains, les équipes d’Eurotransplant n’auraient plus de travail… Chaque pays européen ou les hôpitaux eux-mêmes pourraient vendre les organes prélevés sur des donneurs. La loi fait encore la distinction entre les dons d’organes et de tissus, même si la frontière est floue…Si les dons d’organes ne s’effectuent pas dans une logique économique, tandis que les dons de tissus s’effectuent dans une logique économique, il va y avoir des problèmes juridiques, entraînant des complications… En Allemagne, un premier pas vers la libéralisation complète des dons a été fait. Pour le prélèvement et la greffe de 5 ou 6 organes viables (provenant d’un seul donneur "décédé", ces organes ayant pu être greffés sans complications sur 5 ou 6 patients receveurs), les organismes gérant les dons d’organes toucheront près d’un million d’Euros, grâce au travail efficace du coordinateur ou de la coordinatrice des transplantations, responsable de la bonne qualité de ces pièces détachées que sont les greffons…
Copyright: Arte
http://ethictransplantation.blogspot.com/2007/03/documentaire-les-fabricants-de-curs.html
NB:
L'Agence de la biomédecine est l'équivalent français de l'Eurotransplant allemand : un organisme qui gère les dons d'organes.
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