Le généticien Axel Kahn a publié en avril 2010 "Un type bien ne fait pas ça ... Morale, éthique et itinéraire personnel", aux éditions Nil. Il y évoque la place des femmes dans la société, dans la science et dans sa vie. Un passage particulièrement intéressant [p. 52-55]:
" Il y a une manière d'être au monde propre aux femmes que j'ai ignorée jusque tard dans ma vie. Jusqu'à vingt ans au moins, mes relations avec les femmes restent superficielles et somme toute assez lointaines. A cette époque, le monde est pour moi divisé en deux sphères, l'une, dominée par la figure de mon père, contient ce qui relève de la pensée, l'autre, qui est celle de ma mère, se limite au domaine des sentiments. Il est établi que ma mère puis ses belles-filles sont exclues du cercle exclusivement masculin composé de mon père et de ses trois fils unis et de leurs échanges arides, éthérés et souvent stériles. Imaginez des réunions familiales où les trois belles-filles discutent entre elles, les hommes ne leur adressent pas la parole et débattent entre eux de philosophie, d'histoire et de la nécessité du beau, du vrai et du juste. Si, par hasard, l'une des belles-filles tente de se mêler à leur conversation, le regard qui se porte sur elle dans l'instant est un subtil mélange de surprise et d'énervement. Reconnaissons-le, nos débats sont dénués de tout contact avec la réalité, et nous ne faisons rien pour solliciter leur participation. (...) Je le confesse, l'idée d'une relation à égalité avec une femme est venue bien plus tard, la conscience de la richesse de l'être féminin m'apparaîtra en toute clarté dans le monde de la recherche. (...) Comment ces femmes parviennent-elles à la fois à s'occuper de leurs enfants et à ne rien céder à leur ambition ? Je les vois agir et exercer leur métier avec une intensité bien supérieure, déployant une énergie et une efficacité à faire pâlir leurs collègues masculins. Passer d'une communication dans un congrès international à un coup de fil à la crèche, d'une expérience capitale à un rendez-vous avec un proviseur pour leur enfant en difficulté, de l'organisation d'un voyage dans une université à l'étranger à la lecture sur le Net des résultats d'une équipe concurrente, ne les effraie pas. Les hommes, eux, focalisés sur leurs recherches, ne savent pas jongler entre différentes occupations avec la même agilité. Pour autant, si leurs carrières sont les mêmes sur le plan scientifique, le plafond de verre existe, aucune femme ne m'a succédé à la tête de l'Institut Cochin." Copyright Nil éditions, Paris 2010.
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