Depuis mars 2005, j'observe le milieu des transplantations d'organes et recueille des témoignages de la part des personnels de santé, des proches confrontés à la question du don d'organes, des politiques, du grand public. Petit bilan.
Je suis consternée par cette mentalité "on/off" du corps médical sur le sujet des transplantations - merci au professeur Jean-Michel Boles, du CHU de Brest, choqué lui aussi par cette pression idéologique induisant ce qu'il appelle des "comportements de pression", induits par ce discours "on/off": on est POUR ou on est CONTRE le DON d'organes. "On/off". Cela ne veut strictement RIEN dire, ce n'est pas honnête. Ce discours, analysé par des consultants qui travaillent en entreprise, peut être démasqué pour ce qu'il est : DE LA MANIPULATION. Don ? Sacrifice ? Dans quelles conditions le don d'organes dit "post-mortem" se fait-il ? Quelle fin de vie pour le donneur ? Que savons-nous, grand public, de l'épreuve subie par les proches d'un potentiel donneur ? Nous n'en savons strictement rien, et pour cause : des sociologues spécialistes de la question peinent déjà à recueillir des témoignages. Ces proches parlent tous de sacrifice. "On a du faire un sacrifice" [donner des organes de notre proche en "mort encéphalique"]. "Pourquoi nous ?" Le discours On/Off censure ces témoignages. Or un discours sur le don qui musèle les familles confrontées à la question du don d'organes et de tissus n'a aucun sens. Mais voilà, le discours "On/off" juge ces témoignages embarrassants.
Vous voulez intensifier le don d'organes, prélever des reins sur des donneurs "à coeur arrêté", recenser davantage de cas de "mort encéphalique", quitte à les anticiper, ces cas de "mort encéphalique" ? Les 2/3 des 15.000 patients en attente de greffe attendent un rein, on assiste dans le monde entier à un "odieux trafic d'organes", et malgré les efforts pour contenir ce trafic, comme la demande est là ...
Aux chirurgiens transplanteurs, aux coordinateurs (-trices), voici mon message : Voyez-moi, auteure du blog Ethique et transplantation d'organes, comme le signe avant-coureur de ce qui vous arrivera quand les gens se rendront compte en masse de ce qui les attend (de ce qui pourrait bien leur arriver) quand on leur fera un prélèvement "à cœur arrêté". La "mort encéphalique", c'est à peine un pour cent des décès totaux chaque année. Sauf en Espagne, où "grâce" à la corrida, il y a davantage de cas de mort encéphalique. Faut-il introduire la corrida en France ? Faut-il "fabriquer" davantage de cas de "mort encéphalique" en France ? Est-ce éthique d'anticiper un cas de "mort encéphalique" ? Encore patient, déjà donneur ? Non, ce n'est pas éthique. Si pour greffer tout le monde vous foulez au pied les règles de déontologie médicale les plus élémentaires, ne vous étonnez pas de ce qui vous pendra alors au nez : un rejet massif des transplantations par la population. Allez donc interroger le grand public sur le don d'organes. Il vous parlera de trafic d'organes, et des discours racoleurs sur le Don, de ces fameux discours "On/off" qui en choquent plus d'un. Les gens ne sont pas idiots. Entre promotion et information, ils savent faire la différence. Cela s'appelle : frapper au bon coin du bon sens. Exemple : si je suis au chômage, que j'arrive en fin de droits, avec la menace de me retrouver à la rue, et si on me propose d'accéder au butin obtenu suite à un casse dans une banque, vais-je dire non ?
Vous vous demandez bien quelle pourrait être mon utilité. De vous faire prendre conscience de tous ces signes avant-coureur qui annoncent un rejet massif des transplantations d'organes - rejet qui se fera tôt ou tard, au train où vont les choses. Vous pouvez choisir de me voir, ou de m'ignorer. Certains d'entre vous me répètent à l'envi qu'ils éprouvent un malaise en lisant les propos du blog "éthique et transplantation d'organes". Je vous invite à une prise de conscience pour arranger les choses alors qu'il est encore temps, avant que ne se produise une prise de conscience en masse car lorsqu'on en sera là, et on y arrivera, au train où vont les choses ("On prélève à tout va!", me disait récemment un chirurgien), on assistera à un rejet massif des transplantations.
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