J'ai reçu le message suivant :
"Bonjour, j'ai décidé de m'inscrire sur le Registre National des Refus, géré par l'Agence de la biomédecine. Mais ce registre est-il crédible ? J’en doute puisqu’il est géré par l’agence de Biomédecine qui est loin d’être un exemple de transparence, sachant que cet organisme fait avant tout de la propagande pour les greffes. Admettons que j’ai un arrêt cardiaque demain pont d’Austerlitz. Les secours seraient là très vite étant donné la proximité de La Pitié Salpêtrière. Disons que je meurs dans les dix minutes( et qu’est-ce que la mort ?). N’empêche que ces gens là n’iront jamais vérifier si je suis inscrit sur le registre national de refus du don d’organes avant de pratiquer des gestes invasifs sur mon soi-disant cadavre, style refroidissement corporel ou une circulation extra-corporelle. Je ne serais dans ce cas là pour eux qu’un réservoir d’organes jusqu’au moment où ils interrogeront la base de données de l’agence de biomédecine.
Depuis que je vous le lis, je me suis posé la question, et surtout depuis que les prélévements à coeur arrêté ont repris. J’aimerais bien que vous y répondiez."
La réponse de Catherine Coste, auteure du blog Ethique et transplantation d'organes : Bonjour et merci pour votre message. Vous mettez le doigt sur LA faille dans le système du "don" consenti, anonyme et gratuit, dans un contexte juridique de consentement au don de nos organes à notre mort : le "consentement présumé". Le registre national des refus, géré par l’Agence de la biomédecine, seul les personnels de santé y ont accès. Pas les usagers de la santé. L’usager de la santé (proche d’un potentiel donneur d’organes vitaux, par exemple) n’a aucun moyen de vérifier que les acteurs des transplantations consultent effectivement ce registre. D’ailleurs très peu de personnes y sont inscrites ... Selon une enquête visant à recueillir l'opinion des personnels de santé en général et celle des professionnels des transplantations en particulier, et lancée en septembre 2010 (Optido), les acteurs de la santé pensent que ce registre des refus ne sert à rien ... Il n’y a aucune obligation de preuve pour les acteurs des transplantations lorsqu’ils disent que la loi les contraint à examiner ce registre avant toute chose, lorsqu’un patient est identifié comme potentiel donneur. Cette obligation est théorique. Les proches d'un patient, n'ayant pas accès au Registre National des Refus, n'ont aucun moyen de vérifier si ledit registre a bien été consulté par les soignants, et si oui, à quel moment ... L'opacité du système est totale ... En pratique, l'obligation légale de consultation de ce registre des refus par les soignants (dès qu'un patient est identifié comme potentiel donneur d'organes vitaux) n’est pas toujours respectée, notamment dans le cas des prélèvements "à coeur arrêté", comme vous le mentionnez dans votre message. Les prélèvements "à coeur arrêté", ce sont les prélèvements de reins et foie à partir d’un patient qui a fait un arrêt cardiaque et sur lequel les manoeuvres de réanimation "ont échoué". Ledit patient se retrouve dans un état dit irréversible : c'est l'"arrêt cardio-respiratoire persistant" ; on parle de "prélèvements ’à coeur arrêté’" parce que c’est un terme plus rassurant (permettant d'éviter que le grand public se pose des questions) que "arrêt cardio-respiratoire persistant" ... Pourtant seul ce dernier terme correspond à la réalité physiologique et scientifique de la chose, c'est-à-dire du prélèvement de reins et de foie dit "à coeur arrêté" ...
Le consentement présumé est un consentement obligatoire.
L’Agence de la biomédecine dépend du ministère de la Santé. Elle a pour mission de promouvoir l’activité des transplantations d’organes dans tous les hôpitaux de France. Cette mission est inscrite dans ses statuts. La dernière loi bioéthique, votée en juin 2011, est l’oeuvre de l’agence de la biomédecine. Cette loi réglemente l’activité des transplantations d’organes et de tissus. Le citoyen usager de la santé n’a pas vraiment eu son mot à dire, pas plus qu’il n’est informé sur les "prélèvements à coeur arrêté", pour lesquels il est présumé consentant (loi) ... Rappelons que pour les prélèvements "à coeur arrêté", des manoeuvres de réanimation invasives, au seul bénéfice des organes à prélever, sont effectuées sur un patient avant même de pouvoir établir la volonté dudit patient ... Le Pr. Emmanuel Hirsch, directeur de l’Espace Ethique de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris, a parlé d’un "grave déficit de démocratie dans la loi bioéthique de juin 2011" (Forum Innov’Tech Santé, Les Echos, Paris, 30/06 - 01/07/2011).
Scientific MOOCs follower. Author of Airpocalypse, a techno-medical thriller (Out Summer 2017)
Welcome to the digital era of biology (and to this modest blog I started in early 2005).
To cure many diseases, like cancer or cystic fibrosis, we will need to target genes (mutations, for ex.), not organs! I am convinced that the future of replacement medicine (organ transplant) is genomics (the science of the human genome). In 10 years we will be replacing (modifying) genes; not organs!
Anticipating the $100 genome era and the P4™ medicine revolution. P4 Medicine (Predictive, Personalized, Preventive, & Participatory): Catalyzing a Revolution from Reactive to Proactive Medicine.
I am an early adopter of scientific MOOCs. I've earned myself four MIT digital diplomas: 7.00x, 7.28x1, 7.28.x2 and 7QBWx. Instructor of 7.00x: Eric Lander PhD.
Upcoming books: Airpocalypse, a medical thriller (action taking place in Beijing) 2017; Jesus CRISPR Superstar, a sci-fi -- French title: La Passion du CRISPR (2018).
I love Genomics. Would you rather donate your data, or... your vital organs? Imagine all the people sharing their data...
Audio files on this blog are Windows files ; if you have a Mac, you might want to use VLC (http://www.videolan.org) to read them.
Concernant les fichiers son ou audio (audio files) sur ce blog : ce sont des fichiers Windows ; pour les lire sur Mac, il faut les ouvrir avec VLC (http://www.videolan.org).
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4 commentaires:
Je suis un professionnel de santé impliqué dans les prélèvements d'organes et de tissus et, à ce titre je puis vous certifier que le Registre National des Refus est systématiquement interrogé avant d'envisager un prélèvement. Si la personne, situation la plus fr'équente, n'est pas inscrite, nous nous entretenons avec la famille afin de connaître la position du défunt concernant le don d'organes et de tissus. S'il ne s'était pas positionné, en pratique si la famille s'oppose aucun prélèvement n'est réalisé.
Je suis infirmière coordinatrice pour les prélèvements d'organes et de tissus et j'ai été scandalisée que Catherine puisse affirmer avec autant d'aplomb que le Registre des Refus n'est pas interrogé systématiquement avant tout prélèvement. Ceci est parfaitement FAUX. Ce registre est TOUJOURS interrogé et les familles peuvent en demander la preuve. Le coordinateur pourra sans probléme montrer la demande et la réponse.
Les professionnels de santé disent eux-même que ce registre des refus est inutile ... Vous avez vu la formulation ? Tout est amalgamé (je vous épargne la petite explication de texte, faite déjà sur ce blog) ... D'autre part les gens ne sont pas au courant de l'existence de ce registre, qu'on envisage de supprimer de temps à autre (la question revient souvent, notamment lors de la préparation des nouvelles lois bioéthiques printemps 2011). Quelle preuve pouvez-vous apporter aux familles que vous avez consulté le registre ? Vous avez vu cette vidéo http://vimeo.com/33283765, avec le témoignage de Mme Anne Parent ? Qu'en pensez-vous ?
Catherine,
Vos propos sont proprement scandaleux et immoraux...
Je suis également coordinatrice de prélèvement d'organes, et vos paroles mettent en doute l'intégrité qui compose notre métier. JE vous invite à poser les pieds sur le terrain, pour voir (enfin plutôt découvrir) notre métier, et les principes même qui en font la base.
La consultation dudit registre est effectivement obligatoire durant toute procédure, mais surtout (et vous semblez l'ignorer...) tracée. Toute famille demandant la preuve de consultation de ce registre pourra consulter la fiche réponse que nous fait parvenir l'Agence de Biomédecine, mentionnant des informations très précises.
Je suis totalement outrée que vous puissiez avoir une tribune aussi importante, alors que vous êtes visiblement ignorante des procédures existantes...
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