Scientific MOOCs follower. Author of Airpocalypse, a techno-medical thriller (Out Summer 2017)


Welcome to the digital era of biology (and to this modest blog I started in early 2005).

To cure many diseases, like cancer or cystic fibrosis, we will need to target genes (mutations, for ex.), not organs! I am convinced that the future of replacement medicine (organ transplant) is genomics (the science of the human genome). In 10 years we will be replacing (modifying) genes; not organs!


Anticipating the $100 genome era and the P4™ medicine revolution. P4 Medicine (Predictive, Personalized, Preventive, & Participatory): Catalyzing a Revolution from Reactive to Proactive Medicine.


I am an early adopter of scientific MOOCs. I've earned myself four MIT digital diplomas: 7.00x, 7.28x1, 7.28.x2 and 7QBWx. Instructor of 7.00x: Eric Lander PhD.

Upcoming books: Airpocalypse, a medical thriller (action taking place in Beijing) 2017; Jesus CRISPR Superstar, a sci-fi -- French title: La Passion du CRISPR (2018).

I love Genomics. Would you rather donate your data, or... your vital organs? Imagine all the people sharing their data...

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Frequently Asked Questions (FAQ) / Questions fréquemment posées

==> Foire aux questions Ethique et Transplantation d'organes.

A l'occasion de la journée nationale de réflexion sur le don d'organes qui aura lieu le 22 juin 2007, voici une liste de questions que les lecteurs de ce weblog sur l'éthique et les transplantations d'organes (se) posent fréquemment, notamment en réaction à la lecture d'informations qui les surprennent et les déstabilisent. Je tente d'y répondre, en complétant la liste au fur et à mesure.

Vous pouvez vous exprimer directement sur le Blog ou envoyer vos commentaires, témoignages, questions à l'adresse suivante : cath.coste@laposte.net



Les questions-réponses peuvent être lues sur ce Blog Post, ou sur un fichier PDF (11 pages). Télécharger ce fichier (PDF, 176 Ko) :
==> cliquer ici.

Que recouvre exactement le terme de transplantation d'organes ?

Ce terme recouvre le prélèvement d'un ou plusieurs organes sur donneur en état de mort encéphalique, "à coeur arrêté" ou vivant, ainsi que la greffe d'un ou plusieurs organes sur patient en attente de greffe.

Qu'est-ce que l'éthique ? Plus spécifiquement, qu'est-ce que l'éthique appliquée aux transplantations d'organes ?
La bioéthique recouvre l'ensemble des "problèmes posés par la responsabilité morale des médecins et des biologistes dans leurs recherches et dans les applications de celles-ci. Synonyme : éthique médicale." (définition du Petit Larousse). L'éthique appliquée aux transplantations dépasse ce cadre, puisqu'elle a aussi pour but d'accompagner les patients dans leurs réflexions éthiques, dans un cheminement moral qui leur est propre, et dans lequel les médecins ne sont pas censés s'immiscer.

"La sagesse, c’est une raison qui s’exerce, et qui s’exerce avec sa difficulté et son courage, pour garder le sens à l’existence. À vrai dire, ce qui nous manque aujourd’hui c’est l’exercice personnel de la raison... C’est une raison exercée et qui soit, non pas contrainte à l’égard de la liberté, mais son meilleur moyen de s’exercer". Claude Bruaire (citation), Espace Ethique de l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (http://www.espace-ethique.org/fr/accueil.php).


Quel est le but de ce weblog d'information sur l'éthique et les transplantations d'organes ?
En tant qu'usager de la santé ayant exercé une fonction professionnelle en contact avec le corps médical français, mais aussi international, je joue le rôle de courroie de transmission (dans les deux sens) entre les usagers de la santé et les acteurs des transplantations et de l'éthique médicale, afin de porter à la connaissance des usagers de la santé certains éléments de réflexion concernant des sujets d'éthique médicale (par exemple le constat de la mort sur le plan de l'éthique dans le cadre de prélèvements d'organes sur donneurs en état de mort encéphalique). Ces éléments de réflexion n'apparaissent pas nécessairement dans le discours officiel, pour autant certaines réalités et problématiques relevant de l'éthique médicale méritent d'être prises en compte. C'est pourquoi ce Weblog ne défend aucune position particulière (pour ou contre le don de ses organes, et dans quelles conditions). Il fournit des éléments de réflexion et encourage les questions ; à chacun de suivre sa route...

Les transplantations, n'est-ce pas une question de perspective ? Tout dépend de la situation dans laquelle on se trouve : donneur, ou receveur. Et l'éthique, dans tout ça ?...
Plutôt que de faire de longs discours sur la compatibilité ou l'incompatibilité d'intérêts contradictoires, je laisse la parole à Monsieur le Professeur Philippe WOLF, chef du Service de Chirurgie Générale et de Transplantations, Hôpital de Hautepierre, Hôpitaux Universitaires de Strasbourg. Selon lui, le chirurgien acteur des transplantations est comme Monsieur Jourdain : tous les jours, il fait de l'éthique sans le savoir... Cette courte intervention de M. Wolf a eu lieu à l'occasion des "Deuxièmes Journées Internationales d'Ethique" au Palais Universitaire de Strasbourg en mars 2007.
==> Visionner cette intervention : cliquer ici.

Faut-il faire quelque chose si on veut donner ses organes en France ?
La réponse est non, puisque la loi prévoit le consentement par défaut (d'après le principe : qui ne dit rien consent). C'est le principe du "consentement présumé" qui est inscrit dans la loi en France. (Attention ! Dans d'autres pays, comme l'Allemagne, nous nous trouvons dans la situation inverse : le consentement doit être explicite, c'est-à-dire qu'il faut effectuer une démarche pour devenir donneur d'organes ; il ne faut rien faire si on est contre le don d'organes.)

Faut-il faire quelque chose si on ne veut PAS donner ses organes en France ?
Oui, il faut s'inscrire sur le Registre des Refus de l'Agence de biomédecine. Attention, cette même Agence de biomédecine gère aussi les demandes de cartes de donneur d'organes. C'est en quelque sorte un organisme bicéphale. Il faut savoir que même si une personne est en possession d'une carte de donneur d'organes, si cette personne se retrouve un jour en état de mort encéphalique et que la question du don de ses organes se pose, le consentement des proches prévaudra sur la carte de donneur - c'est à dire que si un proche s'oppose au prélèvement des organes, le prélèvement ne pourra pas avoir lieu. En effet, les lois de Bioéthique (la dernière date d'août 2004) réintroduisent la famille puis les proches comme témoins de la parole du défunt. Si le défunt n'est pas inscrit sur le Registre National des Refus, il est présumé avoir consenti au prélèvement, mais il appartient à la famille de confirmer ou d'infirmer cette présomption.

Quel organisme officiel est chargé de la communication grand public sur les transplantations d'organes ?
Question très intéressante, car elle rejoint celle de l'éthique des transplantations. Il s'agit de l'Agence de la biomédecine, dont l'activité est définie et encadrée par la loi de bioéthique d'août 2004. En mars 2007 ont eu lieu les Deuxièmes Journées Internationales d'Ethique au Palais Universitaire de Strasbourg. Ces Journées Internationales d'Ethique ont été proposées par le Centre Européen d'Enseignement et de Recherche en Ethique (CEERE) de Strasbourg et le Centre d'Etude, de Technique et d'Evaluation Législatives (CETEL) de Genève (Suisse). Lors de son intervention à cette occasion, Mme Françoise Bayoumeu, de l'Agence de la biomédecine, a dit : "Avoir le réflexe de penser au prélèvement à l'issue de l'échec d'une thérapie est une des missions du personnel hospitalier". L'Agence est chargée de promouvoir le don d'organes auprès du grand public et des personnels médicaux. La loi de Bioéthique d'août 2004, qui définit le rôle de l'Agence de la biomédecine, parle toujours de la promotion du don d'organes. Mais d'après Mme Bayoumeu, l'Agence serait "plus dans le domaine de l'information que dans celui de la promotion", et c'est en cela qu'on pourrait qualifier d'éthique la mission de l'Agence de la biomédecine ... Il n'en reste pas moins que la mission inscrite dans la loi de Bioéthique de 2004 stipule que l'Agence a pour mission de promouvoir le don d'organes... Entre information et promotion, donc... Ceci appelle une question subsidiaire : le consentement éclairé requis de la part des familles confrontées au don d'organes (inscrit dans la loi de Bioéthique d'août 2004) est-il compatible avec une information qui se doit de promouvoir ? La promotion n'a rien d'impartial, contrairement à l'information...

Pourquoi parle-t-on parfois de "vide juridique" ?


Ce terme n'est peut-être pas adéquat. On peut parler des ambiguïtés de la loi. Quelle est-elle ?
La loi Caillavet, qui date de 1976 et qui prévaut actuellement en France, fixe un cadre juridique aux transplantations : le "consentement présumé" : qui ne s'est pas opposé au don de ses organes est réputé être en faveur de ce don. Cette même loi prévoit une information des usagers de la santé, afin qu'ils puissent donner leur consentement éclairé sur la question du don d'organes, le cas échéant. L'information prévue par la loi Caillavet n'est pas de nature juridique ou légale. Il s'agit d'une information médicale qui doit permettre le consentement éclairé. Le "consentement présumé" inscrit dans la loi s'accompagne donc d'une obligation d'informer. Cette obligation se conçoit, étant donné que le consentement éclairé est requis de la part du donneur ou de ses proches. Or l'Agence de la biomédecine est un organisme bicéphale, comme nous l'avons vu plus haut : légalement, l'Agence doit promouvoir le don d'organes. Mais elle s'est également donné une mission d'information. La question est : si le discours public se situe entre promotion et information, en quoi peut-il être le garant d'un consentement éclairé ? Promouvoir n'est pas informer...

Qu'est-ce que le Registre National des Refus et quel rôle joue-t-il ?
Un Registre National des Refus a été mis en place par les lois de Bioéthique de 1994 (presque vingt ans après la loi Caillavet !). Un décret de 1997 a précisé le mode de fonctionnement de ce Registre. Il est important de préciser que les lois de Bioéthique (la dernière date d'août 2004) réintroduisent la famille puis les proches comme témoins de la parole du défunt. Cela signifie qu'en cas de non inscription du donneur potentiel sur le Registre National des Refus, ce donneur potentiel est présumé avoir consenti au prélèvement, mais il appartient à sa famille, ses proches de confirmer ou d'infirmer cette présomption.
Pour plus d'information, voir le Blog Post: "Les difficultés de l'émergence d'un débat démocratique sur la santé : le cas du prélèvement d'organes. Analyse juridique" : cliquer ici.

Quelles sont les prochaines missions de communication de l'Agence de la biomédecine ?
Les deux prochaines missions d'"information" grand public de l'Agence concernent les prélèvements "à coeur arrêté" (qui se pratiquent depuis mars 2007 dans plusieurs centres hospitaliers en France) et le don d'organes à partir de donneurs vivants.

La technique de prélèvement "à coeur arrêté" permet-elle de prélever le coeur ?


Non. Le coeur ne bat plus, l'échec de la réanimation a conduit le personnel médical à déclarer le décès. Il faut alors décider sans tarder des suites (envisager le prélèvement d'organes).

Quelle est la différence entre donneur vivant et donneur décédé ?
Dans un cas, on parle de don d'organes à partir de donneurs vivants, le plus souvent faisant partie des proches (famille) du patient en attente d'une greffe (lobe de foie, rein principalement). Les conditions sont strictement définies par la loi. Cette forme de don n'est pas privilégiée pour le moment en France, puisqu'on y pratique essentiellement le prélèvement d'organes à partir de donneurs en état de mort encéphalique ou "à coeur arrêté". Dans les pays scandinaves, c'est la situation inverse. En Norvège par exemple, 40 pour cent des prélèvements d'organes se font sur donneurs vivants, au bénéfice d'un proche (famille le plus souvent). En mars 2007 ont eu lieu les Deuxièmes Journées Internationales d'Ethique : "Donner, recevoir un organe, Droit, dû, devoir", au Palais Universitaire de Strasbourg. A cette occasion, Mme Anna Varberg, chirurgien néphrologue (Rikshospitalet, Oslo, Norvège) a montré que le pronostic de vie est statistiquement meilleur pour les transplantés ayant bénéficié d'un rein provenant d'un donneur vivant, en comparaison avec ceux ayant bénéficié d'un rein de donneur en état de mort encéphalique.

Un patient qui a bénéficié d'une greffe peut-il faire à son tour un don d'organes à sa mort ?
Non, car il est astreint, entre autres, à un traitement immuno-suppresseur "à vie". Le traitement médical post-opératoire très lourd ne permet pas de le rendre candidat à un don d'organes à sa mort. Cependant, on parle de "don domino" pour le foie ou le coeur. Prenons l'exemple du foie : dans la transplantation 'domino', "le foie greffé est celui d’une personne vivante, souffrant d’une maladie sévère appelée amylose, se caractérisant par une hyperproduction hépatique d’une protéine amyloïde. Les dépôts de protéine au niveau des différents organes vont entraîner diverses complications. La transplantation hépatique est parfois l’unique solution permettant de stopper la production hépatique de protéine et de sauver la vie du patient souffrant d’amylose. Ce foie, histologiquement normal, peut à son tour être greffé chez un patient receveur. La survie des patients ayant reçu un greffon domino est comparable à celle des patients ayant bénéficié des autres types de transplantation". (source : ARCAT).

A-t-on une chance d'être inscrit sur la liste des patients en attente de greffe si on est célibataire ? Est-on prioritaire si on est jeune père / mère de famille ?
Cette liste des patients en attente de greffe est gérée par l'Agence de la biomédecine. Il faudrait leur poser la question, car j'avoue ne pas savoir répondre.

Pourquoi parle-t-on de don d'organes ?
La notion de don est très problématique. Dans les années 70, on est parti de l'idée de générosité (don de soi) après la mort, de solidarité humaine. Dans notre société individualiste, qui fait aussi une part plus large à la réflexion sur l'éthique (constat de décès sur le plan de l'éthique, dans le cas d'un "décès" permettant les prélèvements d'organes), la notion de don devient problématique. On a pu entendre exprimer l'opinion selon laquelle le donneur et sa famille sont en quelque sorte les dindons de la farce, car ils sont les seuls à ne rien recevoir en échange du don d'organes. Tous les autres acteurs de la transplantation recoivent un salaire, et le patient en attente de greffe peut bénéficier d'un / des organe(s). On peut aussi se demander si "la notion de don est (...) opérationnelle dans un phénomène où ‘le don est présent comme finalité rendant légitime l'intervention sur le corps, mais nullement comme mode d'expression d'une volonté de se dépouiller d'une partie de soi au bénéfice d'une autre personne’ ?" (Thouvenin, 1997, cité par Claire Boileau : "Prélèvements et transplantations d’organes et de tissus : de la thérapeutique à l’imaginaire social", Université de Bordeaux II, janvier 2000, thèse de Doctorat Ethnologie - option Anthropologie Sociale et Culturelle). Dans la représentation mentale collective, l'image que l'on se fait de la transplantation d'organes oscille entre un miracle de solidarité humaine et un commerce de pièces détachées. Claire Boileau place la problématique du don sous un autre éclairage : la possibilité ou l’impossibilité à concilier des intérêts contradictoires.

Pourquoi la notion de décès est-elle problématique dans le cas du prélèvement d'organes sur patient "décédé" ? Un patient (en état de mort encéphalique ou "à coeur arrêté") que l'on prélève n'est-il pas mort ?!...
Effectivement, le terme de "défunt" employé dans le contexte d'un prélèvement d'organes est problématique, puisque le défunt en question est en fait à considérer comme un mourant : avant le prélèvement de ses organes, il transpire et est hydraté, son corps est encore chaud (c'est inhabituel pour un défunt !), il requiert les soins d'une équipe médicale.

"Le ‘donneur’, avant que l'intervention chirurgicale n'ait lieu, n'est plus du côté de la vie, mais pas encore considéré comme un défunt, encore moins un cadavre. La métamorphose de son statut de personne vivante en ‘donneur’, puis en personne défunte et enfin en cadavre reste coextensive de sa métamorphose physiquement observable, tenant ainsi en échec, peu ou prou, les définitions médico-légales de son statut." (Claire Boileau : "Prélèvements et transplantations d’organes et de tissus : de la thérapeutique à l’imaginaire social", Université de Bordeaux II, janvier 2000, thèse de Doctorat Ethnologie - option Anthropologie Sociale et Culturelle.)


Mais alors, si le patient prélevé n'est pas mort, à quel moment peut-on considérer qu'il est mort ?
Il n'est pas aisé de répondre à cette question, car en fait cela dépend de ce qu'on entend par "mort". La définition traditionnelle de la mort recouvre l'arrêt définitif et irréversible de trois fonctions/organes : coeur, poumons, cerveau. Si on se base sur cette définition, un patient en état de mort encéphalique est non-mort. Il est mourant. Lorsque les équipes chirurgicales commenceront leur travail de prélèvement des organes, et notamment "clamperont" l'aorte du patient en état de mort encéphalique, c'est-à-dire couperont la circulation du sang dans l'aorte en pinçant celle-ci, juste avant de commencer à extraire les organes, on pourra considérer que le patient sera décédé "pour de bon", toujours si on considère la mort comme étant définie par l'arrêt irréversible et définitif des fonctions cardiaque, respiratoire et cérébrale (définition traditionnelle de la mort). Le clampage de l'aorte d'un patient en état de mort encéphalique est toujours un moment délicat pour les équipes chirurgicales qui prélèvent les organes des patients en état de mort encéphalique, car dans les équipes médicales qui s'occupent de prélèvement d'organes, bon nombre ressentent ce moment comme étant celui de la mort (véritable) du patient. Pour certains chirurgiens transplanteurs, le patient "décédé" dont il s'agit de prélever les organes est mort avant d'entrer au bloc ; pour d'autres, il s'agit de se résigner à prélever les organes d'un patient mourant, c'est-à-dire pour lequel le processus de mort est largement amorçé et dont la fin est, quoi qu'on fasse, toute proche (donc prévisible), et ce, que les organes de ce patient soient prélevés ou non. Se pose alors la question de l'anesthésie de ce patient donneur d'organes...

"J'ignorais totalement qu'il fallait anesthésier le donneur d'organes en état de mort encéphalique ?!"
Les "Annales Françaises d'Anesthésie-Réanimation" de 1999 ("Réanimation du sujet en état de mort encéphalique en vue de prélèvement d'organes") stipulent : "Paradoxalement, il peut être nécessaire d'administrer des agents anesthésiques au cours du prélèvement. Il est recommandé de pratiquer une curarisation profonde et de limiter les à-coups hypertensifs liés à une hyperréflectivité médullaire par l'utilisation adaptée d'un anesthésique général". Source : http://www.sfmu.org/documents/consensus/ce_rea_pmo.pdf
NB : l'intérêt de la curarisation est d'obtenir un relâchement des muscles (myorelaxant). Les opiacés comme le curare ne servent pas à anesthésier, mais à obtenir le relâchement des muscles.

Quelle est la différence entre la définition de la mort traditionnelle (celle vieille de quelque deux mille ans), et la définition de la mort qui permet le prélèvement des organes sur patient dit "décédé"?
Il faut savoir que ce triple arrêt définitif (coeur-poumons-cerveau) que requiert la définition de la mort traditionnelle ne permet aucun prélèvement d'organes. En effet, pour qu'il y ait prélèvement d'organes, il faut qu'un des trois critères de la mort au sens traditionnel du terme ne soit pas rempli : soit le coeur bat encore mais le cerveau est détruit (c'est le cas pour la mort encéphalique), soit le coeur ne bat plus mais on se base uniquement sur ce critère (c'est le cas pour certains patients prélevés "à coeur arrêté"). La technique de prélèvement d'organes dite "à coeur arrêté" a été autorisée depuis mars 2007 en France. Depuis cette date, elle est pratiquée dans plusieurs centres de transplantation en France. Pour se faire une idée des enjeux éthiques concernant les prélèvements "à coeur arrêté", voir l'article : "Prélèvements à coeur arrêté. Enjeux éthiques".

La question est : à quelle mort est-ce que je crois ? A mon sens, c'est la question à se poser avant de répondre à la question : pour ou contre "le don de ses organes après sa mort" ("après" quelle mort ?!)... Il n'en reste pas moins que peu de gens veulent être confrontés à ce genre de question... La question de la mort divise (est dissensuelle), tandis que la question du don rassemble (est consensuelle)...

Exsite-t-il une présentation récente faite par un spécialiste mais compréhensible par les non spécialistes, et qui montre ces problèmes de définition de la mort, et surtout, ce qui est pratiqué ?
Lors des "Deuxièmes Journées Internationales d'Ethique : Donner, recevoir un organe, Droit, dû, devoir", au Palais Universitaire de Strasbourg, Le Docteur Guy Freys, Département de Réanimation chirurgicale des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, a présenté les différentes questions soulevées par une (des) définition(s) de la mort, ainsi qu'un historique des découvertes médicales modifiant et/ou affinant les critères de définition de la mort. Il a évoqué les disparités d'un pays à l'autre. Reprenant les paroles d'un philosophe, il rappelle que la mort, qui était un mystère, est désormais devenue un problème. D'où le titre de sa présentation : "On ne meurt qu’une fois, mais quand ?". Il a rappelé que la mort encéphalique était le parent pauvre de la communication grand public.
==> Voir la présentation du Dr. Guy Freys : "On ne meurt qu'une fois, mais quand ?" : cliquer ici.

Pourquoi dit-on parfois qu'on se situe dans une zone grise (un entre-deux) lorsqu'on parle d'éthique des transplantations ?
Sans une connaissance précise de ces formes de mort (décrites plus haut) qui permettent le prélèvement des organes (mort encéphalique et "cœur arrêté"), le consentement éclairé inscrit dans la loi de bioéthique d’août 2004 – consentement éclairé requis de la part des familles confrontées au don d’organes- ne signifie pas grand-chose... Dans son mémoire de Master II, intitulé : "L'adéquation du discours officiel sur la mort encéphalique" (06/2006), le docteur Alexandre Rangel parle de "l’actuel pragmatisme ou silence" du corps médical – silence visant à ne pas décourager les dons d’organes, c'est-à-dire à ne pas décourager les bonnes volontés (il y a tant de gens qui "attendent" des organes). Doit-on considérer ce "silence" comme un acte de non-droit, ou encore le situer dans une zone grise de l’éthique médicale, au sens où les familles confrontées au don d’organes peuvent avoir l’impression a-postériori que tout a été organisé, orchestré pour obtenir leur consentement (selon le principe : la fin justifie les moyens) ? La question se pose de savoir si ce discours officiel pour le moins minimaliste peut porter préjudice à certains (comme les familles confrontées au don d'organes)...

Que pensez-vous de la dernière pub visant les jeunes : "Ne prenez pas de risques pour sauver des gens de votre vivant, attendez d’être mort" ?
Pour moi, il s'agit (une fois de plus) d'un discours grand public crispé sur le "politiquement correct". Ce genre de communication rencontre un intérêt à son image : incons(is)tant, changeant et superficiel. Voir par exemple (ironie du sort) l’explosion du nombre de demandes de cartes de donneur d’organes chez les jeunes, suite à la mort de Grégory Lemarchal (Star Ac’ saison 4) : 33.000 demandes de cartes de donneurs en 3 semaines, contre 54.000 l’an dernier. Un feu de paille qui ne peut qu’embarrasser les acteurs de la transplantation, puisque dans les faits il faudra l’accord de la famille de ces jeunes fans de Grégory si jamais certains d’entre eux venaient à se retrouver un jour en état de mort encéphalique et que se pose réellement la question du don de leurs organes. La carte de donneur d’organes ne remplace pas le consentement des proches, qui prévaut. Ce jour là, le dilemme que connaîtra la famille confrontée au don d’organes, entre volonté d’accompagner le mourant et don de ses organes, fera qu’il y aura loin de la coupe aux lèvres... La carte en question risque donc de rester lettre morte, à l’image de ces belles idées (générosité, don...) qui ponctuent une communication grand public qu'il faut bien se résoudre à qualifier d'anémique ou de minimaliste. Dans ce cas là, les belles idées ressemblent à des dogmes. Il n'est pas sûr que de tels dogmes puissent résoudre le problème de la disponibilité des greffons, qui est un problème de société et d'éthique avant même d'être un problème médical... Il conviendrait, dans un premier temps, de sortir des dogmes, d'instaurer plus de transparence dans le discours public sur le don d'organes, notamment en amenant l'usager de la santé à une réflexion sur la mort. Dans un second temps, il faudrait que la société décide si elle veut des transplantations. Mais ceci est un autre problème...

Si tant est que le problème posé par le consentement éclairé inscrit dans la loi de Bioéthique finit par être résolu, parlera-t-on encore de "don" ? Des notions telles que la solidarité humaine, le don de soi, la générosité, destinées à promouvoir le don d’organes, ne seront-elles pas alors vidées de leur contenu ? La générosité, la glorification de la mort ("sauver" d'autres vies en mourant) n'apparaîtront-elles pas alors comme autant de dogmes correspondant bien moins à la réalité que l'image du commerce de pièces détachées ?
Je pense qu'à la base de ce problème, il y a la question de savoir si l’usager de la santé veut que le médecin s’occupe uniquement du patient qu’il a en face de lui, même quand il ne peut plus rien pour ce patient (le laisser partir tranquillement, dans les meilleures conditions possibles), ou bien le médecin doit-il se préoccuper du bien-être d’autres patients lorsqu’il ne peut plus rien pour le patient qu’il a en face de lui ? La "technicisation de l’agonie" (Dr. Marc Andronikof) peut permettre, dans les cas de mort encéphalique ou de prélèvement "à coeur arrêté", de "sacrifier" un patient au profit du bien-être d’autres patients... (« recueillir des bouts d’hommes pour soigner d’autres hommes » Claire Boileau). A la société de décider si elle veut que cela se passe ainsi...

Dans sa thèse citée plus haut, Claire Boileau se demande "comment une société parvient (...) à mettre en place un dispositif destiné à recueillir des ‘bouts d'hommes’ pour soigner d'autres hommes ? Comment s'organise [cette société] (...) pour que les éléments corporels nécessaires à servir des objectifs thérapeutiques, soient mis à disposition ? A quelles résistances se heurte-t-elle, et de quelles manières les acteurs (soignants et familles) des négociations entreprises dans ce but sont-ils impliqués ?" (cf. thèse de Claire Boileau). C'est là toute la question des transplantations...

Quelle marge de manœuvre la psychanalyse, la psychologie, l’anthropologie, la religion peuvent-elles avoir dans cette affaire des transplantations ? Se trouve-t-on face à un choix inhumain, ou y a-t-il possibilité de "réparation" par un soutien pour les familles confrontées au don d’organes ?
La réponse à cette question ne fait pas l'unanimité, ni dans le corps médical, ni parmi les usagers de la santé. Pour certains, il s'agit d'un choix inhumain demandé à ces familles ; pour d'autres, il s'agit d'accompagner ces familles "sur le chemin difficile du deuil au don" (Professeur Louis Puybasset).

L’éthique des patients en attente de greffe n’est-elle pas carrément "zappée" ?
Question très complexe, sur laquelle j'avoue ne pas avoir trouvé beaucoup d'information. Cela nécessiterait une recherche. Je propose de commencer par visionner un témoignage : celui d'une jeune femme greffée des poumons (témoignage datant de mars 2007).

Voir le témoignage de Mme Caroline Strauch :
==> cliquer ici.

Voici aussi quelques réflexions éparses pour tenter d'approcher cette question :

- On entend parfois l'opinion, très critique, selon laquelle les greffés comme les familles de donneurs seraient de toute façon censés vivre dans le refoulement permanent. Certains greffés disent que s’ils devaient tout le temps penser au "donneur", la vie serait invivable (comment surmontent-ils leur culpabilité : on a dû dépecer un mourant pour leur permettre de prolonger leur maladie – terme plus adéquat que "pour les sauver"- ? En sublimant ou en refoulant ?). Aux familles de donneurs, certains acteurs de la transplantation (par exemple les infirmières coordinatrices des équipes de transplantation) disent qu’il ne faut pas imaginer l’opération (la seule solution envisagée serait alors le refoulement ?!).

- Les transplantations reposent et ont toujours reposé sur la conception d’une mort taboue pour le grand public. Seul le corps médical serait le grand initié. Or récemment il y a eu la loi et le débat sur la fin de vie : désormais les patients ont leur mot à dire sur leur fin de vie. Pourquoi seul le domaine des transplantations resterait-il à la traîne (vestige de temps plus anciens ?...)

- Le patient doit-il demander à tout prix et pour tout prix sa guérison ? Certains chirurgiens qui pratiquent les greffes arguent du fait que les patients veulent être "sauvés" à n’importe quel prix (qui ne le voudrait pas ?). Ceci serait dans la nature humaine. Quelle image ces chirurgiens ont-ils de l’éthique du patient ? Ils se retranchent derrière une "dernière vérité" désabusée, à fonction philosophico-thérapeutique, mais ceci n’a-t-il pas pour effet d’évacuer les "vraies" questions concernant l’éthique des patients en attente de greffe ?

Les transplantations, combien ça coûte à la Sécu et combien facturent les hôpitaux et cliniques pour les greffes ?
La question financière est centrale : le corps humain a un coût, la santé a un coût. Les transplantations représentent des flux financiers très importants, le système de santé tel qu’il est conçu ne pourra pas financer des greffes "ad infinitum", or avec l’allongement de la durée de vie, cette tendance ne va faire que se renforcer (besoins en greffes accrus, au fur et à mesure du vieillissement de la population). On pense alors à la nécessité de promouvoir d’autres thérapies (thérapie cellulaire, basée sur la régénération, par exemple), qui seraient moins chères et "plus éthiques" ? ...

Pourquoi des alternatives plus éthiques et moins coûteuses n’ont-elles pas été développées plus tôt ?
voir le livre passionnant du Professeur Bernard Debré : "La Revanche du serpent ou la fin de l’homo sapiens" : il pose la même question, en dénonçant l’hypocrisie de cet état de fait. Les transplantations sont nées de l'action des chirurgiens qui ont d'abord effectué les transplantations (possibilité technique de l'acte, sans réflexion éthique préalable) ; dans un second temps, donc après coup, l'accord de la société et une législation "adéquate" ont été recherchés. La justification éthique des transplantations repose sur leur faisabilité technique. Disons que dans cette affaire, l'éthique doit, a dû et devra toujours se livrer à quelques contorsions pour épouser la technique.

Finance-t-on actuellement autant les recherches en thérapie génétique que les transplantations ? Si non, pourquoi ?
Je n'ai pas encore la réponse à cette question. Il est certain qu'il faudrait amener une réflexion des usagers de la santé sur la question de savoir s'il faut privilégier le développement des thérapies génétiques ou celui des transplantations. Pour l'heure, on peut simplement se demander s'il n’est pas hypocrite d'affirmer que les transplantations sont plus éthiques que les thérapies par régénération cellulaire ? Il paraît qu’on peut déjà régénérer un foie humain. On peut imaginer que de plus en plus de patients seront orientés vers cette thérapie...

L'éthique, c'est un bien grand mot pour ne désigner, en fin de compte, qu'un conservatisme crispé, un repli sur soi frileux, un refus du progrès...
Le Professeur Claude Huriet a dit que les gens qui s'occupent (se préoccupent) d'éthique médicale sont considérés comme des "emmerdeurs" au lieu d'être considérés comme des "éclaireurs" (mars 2007). Il pense que cette tendance ne fera que s'accentuer, et que les gens qui parlent d'éthique ont de moins en moins de chance d'être entendus. Voici, pour confirmer les dires du professeur, quelques problèmes d'éthique concernant les transplantations d'organes, problèmes non résolus à l'heure actuelle (liste non exhaustive !) :

- "L’actuel pragmatisme ou silence" constaté par le Docteur Alexandre Rangel dans son mémoire intitulé : "L’Adéquation du discours officiel sur la mort encéphalique" (juin 2006) n’incite pas les usagers de la santé à réfléchir sur la mort. Au contraire, le discours officiel, lorsqu'on cherche une réponse sur les formes de mort permettant le prélèvement, répond en parlant de la beauté du don...

- Dans son livre "La revanche du serpent ou la fin de l’Homo sapiens" (2005), le professeur Bernard Debré parle de la nécessité de 'sortir des dogmes' et des principes avec lesquels on jongle pour justifier les transplantations d’organes. Ce souhait est resté lettre morte.

- J’ai reçu quelques témoignages d’usagers de la santé qui se disaient stupéfaits d’apprendre que des médecins déclaraient morts des patients dont le cœur battait encore. Dans ces conditions, le consentement éclairé (au don) inscrit dans la loi de Bioéthique d’août 2004 ne signifie pas grand-chose, encore moins pour ce qui est des prélèvements 'à cœur arrêté', technique validée et pratiquée en France depuis mars 2007, sans qu’aucune communication grand public ait été mise en place à ce sujet.

-Du 29 au 31 mars 2007 ont eu lieu les Deuxièmes Journées Internationales d'Ethique : "Donner, recevoir un organe, Droit, dû, devoir", au Palais Universitaire de Strasbourg. Lors de son intervention à cette occasion, Mme Françoise Bayoumeu, de l'Agence de la biomédecine, a affirmé que l'Agence serait "plus dans le domaine de l'information que dans celui de la promotion" concernant le don d’organes, et c'est en cela qu'on pourrait qualifier d'éthique la mission de l'Agence de la biomédecine. Entre information et promotion, donc... Question subsidiaire : le consentement éclairé est-il compatible avec une information qui se doit de promouvoir ?

- A partir du moment où on parle de prélèvement sur donneur mort, il est difficile de parler d’anesthésie... Or cette anesthésie est requise, puisque le donneur prélevé (en état de mort encéphalique ou "à coeur arrêté") n'est pas tout à fait du côté de la mort lorsque le prélèvement des organes commence, comme on l'a vu plus haut. On peut penser qu'il est primordial de rassurer l'usager de la santé sur le confort du mourant qu'il accompagne au cas où il accepterait le prélèvement des organes de ce mourant. Or le discours officiel se garde bien d'évoquer ce problème fort délicat de l'"anesthésie d'un mort" (!?), car bien sûr cela n'aurait aucun sens. On peut donc déplorer un manque de transparence du discours officiel sur la mort encéphalique, entre information et promotion.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Etudiant en médecine, j'ai entendu parler de la thèse de Claire Boileau, que vous mentionnez : "Prélèvements et transplantations d’organes et de tissus : de la thérapeutique à l’imaginaire social", Université de Bordeaux II, janvier 2000.
Cette thèse a-t-elle été publiée ? Et si non, quelle bibliothèque de fac de médecine en possède un exemplaire (je suis en région parisienne, non sur Bordeaux).
Merci pour votre aide !

Ethics, Health and Death 2.0 a dit…

Bonjour,
Cette thèse a été publiée en 2002 afin d'être accessible au grand public (donc pas dans son intégralité) sous le titre : "Dans le dédale du don d'organes. Le cheminement de l'ethnologue."
Editions des archives contemporaines (prix : 21 EUR).