Scientific MOOCs follower. Author of Airpocalypse, a techno-medical thriller (Out Summer 2017)


Welcome to the digital era of biology (and to this modest blog I started in early 2005).

To cure many diseases, like cancer or cystic fibrosis, we will need to target genes (mutations, for ex.), not organs! I am convinced that the future of replacement medicine (organ transplant) is genomics (the science of the human genome). In 10 years we will be replacing (modifying) genes; not organs!


Anticipating the $100 genome era and the P4™ medicine revolution. P4 Medicine (Predictive, Personalized, Preventive, & Participatory): Catalyzing a Revolution from Reactive to Proactive Medicine.


I am an early adopter of scientific MOOCs. I've earned myself four MIT digital diplomas: 7.00x, 7.28x1, 7.28.x2 and 7QBWx. Instructor of 7.00x: Eric Lander PhD.

Upcoming books: Airpocalypse, a medical thriller (action taking place in Beijing) 2017; Jesus CRISPR Superstar, a sci-fi -- French title: La Passion du CRISPR (2018).

I love Genomics. Would you rather donate your data, or... your vital organs? Imagine all the people sharing their data...

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Médiation éthique : de la guerre à la médecine, de blog à blog

David di Nota, pionnier de la médiation éthique dans le contexte des guerres en Europe. Auteur de Bambipark : Suivi de Têtes subtiles et têtes coupées, paru en 2009 chez Gallimard, ouvrage qui faisait suite à celui de 2008 paru chez le même éditeur : J'ai épousé un Casque bleu : Suivi de Sur la guerre
Les vraies fausses guerres en Europe décrites avec une précision millimétrée ...
Voici comment l'auteur présente ces deux ouvrages sur son blog :

"Après J’ai épousé un casque bleu (2008), qui analysait la guerre de Bosnie de 1992, Bambipark s’intéresse à la guerre du Kosovo de 1999 … J’ai souhaité continuer l’étude des 'guerres humanitaires' telles que les Européens se la représentent. Mon projet global est d’essayer d’expliquer le rapport qu’entretient notre société à la guerre. J’ai commencé avec la guerre de 1992 car j’appartiens à cette génération qui a eu vingt ans au début des années 90, lorsqu’a été signé le traité de Maastricht. Je reste frappé par la très grande disparité entre un projet géopolitique – l’Union européenne –, censé propager la paix, et les guerres dont elle participent, et qui, dans une très large mesure, lui échappent." (Source)
Ni historien, ni partisan, ni homme politique, ni tout à fait philosophe, quoique ... (imaginez Coluche qui publie chez Gallimard), David di Nota écrit et décrit avec une précision millimétrée le parcours qui mène des idéologies aux réalités. Ce petit décryptage n'est ni lisse ni cathartique, il passe et fait passer de l'indignation au rire, du cynisme à l'humain (le cynisme étant du côté des idéologies, non de l'humain), ôte ces tragiques de carton-pâte qui nous empêchent de voir l'histoire, nos histoires, nous qui noyons le poisson à grands flots d'idéaux. Y aurait-il de vraies fausses guerres en médecine ? On entend si souvent que chaque année XXX patients meurent faute de greffe ... Le discours public sur le don d'organes mène un combat humanitaire, un peu comme ces guerres humanitaires en Bosnie et au Kosovo. Les partisans du don d'organes seraient nos Casques bleus engagés dans un courageux combat pour faire triompher nos valeurs dans toute l'Europe : liberté - égalité - fraternité - bonne santé.
Est-ce si simple, comme pourrait le croire tout Candide usager de la santé ?
D'un côté : victoire humanitaire, contrôle juridique, le Droit qui parvient à "corseter la guerre", "droit d'ingérence au profit d'un respect de la souveraineté".
De l'autre : grâce aux principes d'anonymat et de gratuité du don d'organes inscrits dans les lois bioéthiques réglementant les transplantations d'organes en France, le trafic d'organes est banni, il n'y a ni morcellement ni marchandisation du corps humain, le Progrès c'est la transplantation d'organes.
Un triomphe ? Pas tant que cela :
"Ces interventions en Bosnie ou au Kosovo, que David di Nota qualifie de 'guerres morales', semblent des échecs. Comment l’explique-t-il ? On ne peut pas tricher avec la guerre. Ce n'est pas une action de police. Un officier de police n'a pas vocation à tuer. Un soldat, si. Un soldat peut tuer parce qu'il doit affronter le caractère potentiellement illimité de la violence. Mais justement parce que la guerre nous place face au danger de l'escalade, aucun Etat ne peut s'offrir le luxe de se battre vraiment pour sauver des vies humaines. Il faut donc transiger. Toutes ces guerres par principes sont des guerres où, dans l'ombre et dans les faits, on transige beaucoup. Nous avons fait la guerre contre le nettoyage ethnique en Bosnie, mais pour célébrer Milosevic à Dayton. Nous avons fait la guerre en Serbie, mais pour créer un nouvel Etat en dépit des limites exlusivement humanitaires qui nous nous étions données (stopper un nettoyage ethnique). Je n'appelle pas ça des victoires humanitaires, mais des recompositons politiques. Le fait qu'elles nous échappent en dépit du pseudo-contrôle juridique que nous croyons exercer sur elles devrait nous inciter à la modestie, mais la modestie n'est pas au programme de l'Europe." (Source)
Et côté médecine ? "La greffe, oui, mais à quel prix ?", voilà ce que me disent depuis 2005 des usagers de la santé, acteurs des transplantations, politiques, alors que, dans mon rôle de médiation éthique, je m'entretiens avec eux sur le sujet : "éthique et transplantation d'organes". La greffe au prix d'un consentement présumé (cette loi qui fait de chacun de nous un potentiel donneur) certes inscrit dans la loi mais sans fondement éthique (promouvoir n'est pas informer), la greffe au prix d'une concurrence avec d'autres alternatives thérapeutiques se trouvant muselées durant une à plusieurs décennies (le cordon ombilical et le sang placentaire, dont le potentiel thérapeutique à peine exploré aurait peut-être pu permettre de réparer des organes, l'assistance circulatoire mécanique pour assister un coeur défaillant à l'aide d'une micro-turbine, rendant la greffe cardiaque caduque, etc.), la greffe au prix d'un "marketing social du Don" (Philippe Steiner, sociologue, auteur chez Gallimard) nous faisant un peu trop vite oublier que le "don" d'organes est en fait un sacrifice, car ce "don" modifie la fin de vie du "donneur", pas toujours pour le meilleur ... Voir mes 52 chroniques bioéthiques sur AgoraVox, le journal citoyen en ligne, de 2007 à 2010, sur ce thème : la greffe, oui, mais à quel prix ?
A la guerre comme à la médecine, faire de la médiation éthique, nous demander :
"Aurait-on raté une occasion de voir le monde autrement ?" 
Répondre par l'affirmative tout en restant politiquement correct ? Mission impossible. La modestie n'est pas au programme de l'Europe, ni de la médecine.

Les articles les plus populaires

1. Les failles du "marketing social du Don" (Philippe Steiner, sociologue, auteur chez Gallimard)
2. Enquête sur la mort encéphalique et le prélèvement d’organes en France : le point de vue de l’éthique. CONCLUSION
3. "Un Espagnol a reçu une greffe totale de visage, présentée comme une première"
4. "Tunisie : la greffe de visage, entre éthique et réalité". 

En hommage à Michael Crichton, le père de la série TV "Urgences"

"La dernière leçon est que la science n'est pas un domaine réservé, ou plutôt qu'elle ne l'est plus. C'était peut-être vrai à l'époque où Einstein s'entretenait avec Niels Bohr, quand il n'y avait que quelques dizaines de chercheurs de pointe dans chaque spécialité. Ils sont aujourd'hui trois millions aux USA. La science n'est plus une vocation, c'est une carrière. La science est aussi corruptible que n'importe quelle autre activité humaine. Ceux qui la pratiquent ne sont pas des saints mais des êtres humains. Ils font ce que font nos congénères : ils mentent, trichent, volent, dissimulent et falsifient des données, exagèrent leur propre importance, dénigrent injustement les concurrents. Telle est la nature humaine. Elle n'est pas près de changer." Michael Crichton, Next.

A présent, un peu de pédagogie. Prenons la partie actus de ce blog. Depuis 2005, elle recense des articles de journaux, tels que publiés en ligne, sans ajouter ni retrancher quoi que ce soit. Dans un thriller juridique de John Grisham, The Broker (Le Courtier), le "héros" (une cible en sursis) dit qu'il a appris à ses dépens à ne croire qu'une petite partie de ce que les journaux impriment. ("He had learned the hard way to believe little of what got printed.")
En hommage à Michael Crichton, trop tôt disparu, je souhaiterais dire : moi aussi.
Les thérapies miracle avec les cellules souches embryonnaires ?
Le don d'organes, un thème d'une simplicité extraordinaire car il s'agit d'un réflexe de la forme, pour tout bon citoyen ?
Un trafic d'organes inexistant en Europe, en tout cas marginal ?
Aucune alternative à la transplantation cardiaque ?
Aucune alternative à la greffe de moelle osseuse ?
Aucune alternative à la transplantation d'organes vitaux, de tissus ?
J'ai appris à mes dépens à ne croire qu'une petite partie de ce que les journaux impriment ...
J'ai appris à mes dépens que pendant 30 ans, il y a eu une "étrange omerta" sur le cordon ombilical et sur le sang placentaire, que durant une décennie, on a préféré installer de grosses machines peu efficaces et très contraignantes sur des malades en attente de greffe cardiaque, au lieu d'installer à la place de cette machine provisoire en attendant la greffe une micro-turbine permettant aux ventricules du coeur de récupérer, l'un après l'autre, ce qui aurait permis d'éviter de "réclamer des coeurs" [à transplanter]. J'ai appris à mes dépens que depuis des décennies, un "marketing social du don" nous conditionne à envisager le don d'organes en particulier et la transplantation en général sous un jour beaucoup plus glorieux, anodin et simple qu'ils ne le sont en réalité. J'ai appris à mes dépens que les journaux montent en épingle les querelles entre mandarins (chefs de service hospitalier) au lieu d'informer la population sur les véritables avancées scientifiques. J'ai appris à mes dépens que chaque mandarin a une fâcheuse tendance à travailler et à publier seul dans son coin (pour que lui revienne le mérite de l'action), au lieu de s'unir à ses confrères pour informer, dans une démarche commune, les usagers de la santé.
J'ai appris ...
Mais je pourrais continuer longtemps ainsi. Trop longtemps. Je vous donne rendez-vous en juin 2011, pour un "thriller" médical qui vous en dira plus sur ces vérités utiles qu'il vaut mieux apprendre avant qu'il ne soit trop tard ... Ma démarche n'a rien d'extraordinaire. Pas besoin d'attendre mon livre. Voyez par vous-même ...
Petit exercice pratique :
Ce 27 octobre 2010, le journaliste Yves Mamou publie dans Le Monde un article intitulé : "Ces nouveaux Supermen qui déstabilisent les institutions" :
"Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, un simple individu, dénué des outils traditionnels de la puissance (armée, police...), sans charisme particulier, peut engendrer un désordre planétaire ou déstabiliser des institutions. Certes, il est arrivé dans l'Histoire que des individus articulent le cours des événements autour de leur personne. Jeanne d'Arc, Raspoutine ou Gandhi, doués sans doute d'un charisme exceptionnel, ont pu agir sur la volonté des puissants ou des foules. Mais, avec les Kerviel ou les Gonzalez, voici l'avènement de Super-banal-men. Un Superman sans qualités."
En réaction à cet article, me suis permis d'écrire à ce journaliste du Monde : 
Bonjour M. Yves Mamou et bravo pour votre article.

Petite et modeste illustration :
Comment un blogger anonyme ("sans qualités", comme le héros de l'écrivain autrichien Robert Musil)déstabilise l'institution médicale, qui nous conditionne avec son "marketing social du Don d'organes" (la formule est d'un sociologue auteur chez Gallimard, Philippe Steiner), et comment ce blogger reçoit, à force de blogger, le soutien de prestigieux scientifiques tels le Professeur Eliane Gluckman, pionnière de la greffe du sang de cordon, ou le Professeur Bernard Devauchelle, pionnier de la greffe des tissus composites de la face.
En quoi le Professeur Bernard Devauchelle déstabilise-t-il l'institution médicale ? C'est très simple. Au lieu de laisser son activité de la transplantation faciale être encadrée par l'Agence de la Biomédecine (ABM), institution gouvernementale en charge d'encadrer et de promouvoir la transplantation d'organes et de tissus, il veut créer un Institut Européen Faire Faces (IFF), au CHU d'Amiens, dont l'ouverture est prévue pour 2012, fédérant les compétences scientifiques (recherche européenne) et économiques (partenariats publics-privés). Un IFF hors de portée de l'ABM ... IFF ... Avec un peu d'imagination, on pourrait penser aux Forces françaises de l'intérieur (FFI), armée clandestine constituée le 29 décembre 1943, luttant contre l'Occupation en France, pendant la Seconde Guerre ... Je souhaite tout le succès qu'il mérite à cet IFF européen.
Tout cela relayé, expliqué, analysé par le blogger anonyme, dont le blog est suivi au jour le jour par les institutionnels (ABM) et les hôpitaux (AP-HP* - Pasteur) ...

Cordiales salutations.
Catherine Coste, blogger anonyme

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Catherine Coste
7 square Ronsard
92 500 Rueil-Malmaison
France
+33 6 28 04 81 15 / +33 9 52 58 66 07
cath.coste@laposte.net
http://ethictransplantation.blogspot.com
http://actuagencebiomed.blogspot.com


* AP-HP : Assistance Publique des Hôpitaux de Paris

Donneur à l’insu de son plein gré ?

BDevauchelle



Professeur Bernard Devauchelle

Chef du service de Chirurgie Maxillofaciale du CHU d'Amiens, pionnier de la transplantation des tissus composites de la face, août 2010 :

"Bien des gens ont une réflexion profonde sur le don d’organes".





Catherine Coste, auteure du blog “éthique et transplantation d’organes” :




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Rama Yade

Pour 90 pour cent de la population, le donneur potentiel, c’est la jolie gazelle. Pas l’ex-chirurgien de 85 ans !


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Christian Cabrol

 

Bien des gens me disent ou m’écrivent : “Je suis trop âgé pour prendre ma carte de donneur, mes organes n’intéressent plus personne, j’ai 57 ans !”

Double erreur !! Ils ne savent pas que la carte de donneur n’a aucune valeur juridique puisque nous sommes tous présumés consentir au don de nos organes à notre mort, c’est la loi. L’avantage, c’est qu’ils ne se sentent plus concernés par le don d’organes, devenant ainsi des donneurs potentiels à l’insu de leur plein gré puisque :

1) Nous sommes tous de potentiels donneurs d’organes, c’est inscrit dans la loi, il n’y a pas de limite d’âge
2) Les réalités du prélèvement d’organes aujourd’hui font que l’on peut être donneur d’organes vitaux à sa mort à plus de 80 ans. La population vieillit, on a besoin de reins pour les deux tiers des 15.000 patients en attente de greffe rénale en France, même si le greffon provient d’un donneur de 75 ans et plus. Les patients greffés peuvent d’ailleurs connaître l’âge de leur donneur : il leur suffit de le lire sur leur dossier médical, auquel la loi leur donne accès.

 

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Emmanuelle Prada-Bordenave

Directrice de l’Agence de la biomédecine, institution gouvernementale chargée d’encadrer et de promouvoir l’activité des transplantations d’organes et de tissus au sein des hôpitaux français, 2009 :

"Le profil type du donneur d’organes a changé. C’est une personne de 48 ans qui fait un accident vasculaire cérébral, ce n’est plus le jeune accidenté de la route."

 

Qui le sait ??

90 pour cent des spots publicitaires d’associations de promotion du don d’organes (type France ADOT) mettent en scène un jeune donneur de moins de 25 ans. La population n’a bien souvent pour seule source d’information que ce que ces associations véhiculent comme image de la transplantation, que ce soit à la radio, à la télé (chaînes publiques), dans la presse ou sur des sites internet type Doctissimo. Bien peu de gens vont lire ou décrypter l’info professionnelle (ou l’info-promotion grand public) disponible sur le site de l’Agence de la biomédecine.

Quelle information véhiculent les associations de promotion du don sur les prélèvements “à cœur arrêté”, qui ont repris en France depuis 2007 ? Aucune. Les quinquagénaires continuent donc à être des donneurs potentiels à l’insu de leur plein gré, ce qui arrange tout le monde. Des quinquagénaires qui pourraient faire un arrêt cardiaque sur la voie publique et devenir donneurs de reins et de foie, il y en a un paquet. La non-information devient manipulation. Les potentiels donneurs à l’insu de leur plein gré sont ceux qui m’écrivent :

“Je suis trop âgé pour prendre ma carte de donneur, mes organes n’intéressent plus personne, j’ai 57 ans.”

Acteurs des transplantations, qui avez le nez sur le guidon et n’êtes, certes de bonne foi, pas ou trop peu conscients de la qualité de l’information que reçoit le grand public, je vous invite à voir quelques vidéos sur le sujet (sur You Tube), à écouter quelques spots publicitaires sur Europe 1 ou France Inter, à voir quelques émissions grand public sur le don d’organes sur TF1 et consorts … “La greffe, c’est peanuts !” affirmait dans une émission TV fin 2009 un jeune greffé des poumons. On aimerait y croire, mais plus d’un professionnel des transplantations avait été choqué par cette façon de présenter les choses … Ce n’est pas de l’information. C’est de la manipulation.

Vous verrez ainsi que bien des gens, hélas, ne peuvent pas avoir une réflexion profonde sur la question du don d’organes. Je dis hélas, car nul n’est censé ignorer la loi, sauf à ses dépens.

Voici donc comment l’information se fait dans les écoles de la République et ailleurs :

Le jeune donneur “Superman” :

FranceADOT

etc., etc.

Lettre ouverte aux médecins et chirurgiens de l’Académie Nationale de Médecine et à M. le Docteur Piernick CRESSARD, Président de la Section Ethique et Déontologie au Conseil National de l’Ordre des Médecins

Nous sommes tous des donneurs d'organes potentiels à l'insu de notre plein gré. En effet, depuis 2007, une situation d'arrêt cardiaque jugé "irréversible" (sur quels critères ??) peut faire de chacun de nous un donneur d'organes puisque le consentement présumé au don de ses organes à sa mort est inscrit dans la loi. Les citoyens ignorent tout de la législation sur les prélèvements de reins et de foie à partir de "donneurs" se trouvant dans un état d'"arrêt cardio-respiratoire persistant", ce que la loi appelle, afin de noyer le poisson ou afin de faire de chacun d'entre nous un donneur potentiel à l'insu de son plein gré, les prélèvements "à coeur arrêté". Vous en conviendrez aisément, prélèvements d'organes "à coeur arrêté" est infiniment plus rassurant, comme terminologie, que "prélèvements d'organes vitaux à partir d'un donneur en 'arrêt cardio-respiratoire persistant'". Pourtant, seule la seconde terminologie correspond à la réalité des faits. Comme il est hors de question d'employer ce terme peu rassurant dans le discours public sur le don d'organes, on y mentionne, au passage, que maintenant on peut aussi prélever des reins à partir de donneurs "décédés suite à arrêt cardiaque". Dans un contexte où les deux tiers des 15.000 patients en attente de greffe recherchent rein, désespérément, on se dit que l'idée est excellente. Forcément...
Or la réalité, c'est que pour 500 à 1.000 personnes par an faisant un arrêt cardiaque sur la voie publique ou à l'hôpital en France, le protocole de soins va changer. Pour une meilleure prise en charge de ces patients ? Non, pour une meilleure prise en charge de ces potentiels donneurs d'organes vitaux (reins, foie). Patient en insuffisance cardiaque, à l'insu de votre plein gré, vous êtes déjà un potentiel donneur d'organes. Encore patient, déjà donneur ? Attendez, il y a quelque chose qui ne va pas. Mais non, voyons, quelle idée ! Puisque vous n'en savez rien ! Pourtant, sans information au préalable, le consentement présumé au don de ses organes à sa mort, inscrit dans la loi, ne signifie pas grand-chose. Un consentement présumé suppose une information au préalable, afin de donner un consentement éclairé. J'ai bien parlé d'information ; non de promotion sur le Don

Sommes-nous tous des potentiels donneurs à l'insu de notre plein gré ? A l'heure de la révision des lois bioéthiques réglementant l'activité des transplantations d'organes, je pose la question à des médecins et à des institutionnels dans la lettre ouverte qui suit ...

Messieurs,
Usager de la santé et auteure d’une cinquantaine de chroniques bioéthiques sur AgoraVox, le journal citoyen en ligne, je souhaiterais attirer votre attention sur un article que j’ai publié sur AgoraVox, le journal citoyen en ligne, le 21/10/2010, concernant cette patiente d’une clinique bordelaise déclarée prématurément en état de “mort encéphalique” :
http://www.leparisien.fr/bordeaux-33000/une-patiente-declaree-tres-certainement-cliniquement-morte-s-est-reveillee-20-10-2010-1116609.php
Parmi les commentaires reçus, certains en particulier ont attiré mon attention. Ils proviennent d’un certain “Halman”, dont on comprend qu’il a été (est ?) aide soignant, en contact de par son travail avec des coordinateurs des transplantations (ou exerçant lui-même cette fonction). On se rappelle l’Affaire d’Amiens, cas dit “particulier”, certes insupportable. Je la résumerai ici, en reprenant un message que m’avait envoyé M. Tesnière, père de Christophe, le 23/11/2007 :
"Je suis Alain Tesnière, le père de Christophe, dépecé à Amiens. Claire Boileau en parle dans son livre pp. 57-58*. J'ai écrit un livre** certes, mais il a fallu mener un combat de plus de dix ans à la suite de notre plainte. Un combat vain, mais j'ai accumulé beaucoup de documents, j'ai fait des recherches. Je continue à penser que le consentement présumé n'a aucun fondement éthique et qu'il faut le retirer de la loi. (…) Depuis 1991, pratiquement rien n'a changé dans la loi sur les prélèvements d'organes. Rien n'a changé dans le discours officiel qui n'est en fait que de la propagande. On entend toujours les mêmes mots 'pénurie de greffons' : c'est-à-dire pas assez de morts. Les bricolages juridiques des lois dites de bioéthique sont des contresens. Et j'en passe."
* Claire Boileau : "Dans le dédale du don d'organes. Le cheminement de l'ethnologue", Editions des archives contemporaines, 2002, pp.57-58 : "(...) 'l'affaire d'Amiens', révélée par le quotidien 'Le Monde', (...) éclate en 1992. Elle met précisément en exergue sinon la volonté du défunt, du moins l'information détenue par la famille en matière de prélèvements d'organes pratiqués sur un proche. En août 1991, les parents d'un jeune homme de 19 ans perdent leur fils à la suite d'un accident et consentent à certains prélèvements d'organes. En novembre, ils apprennent que des actes chirurgicaux autres que ceux auxquels ils avaient souscrit ont été effectués sur leur fils : le prélèvement de plusieurs artères ou veines et, surtout, le prélèvement des globes oculaires. Or si la loi Caillavet de 1976 autorisait bien les prélèvements d'organes à but thérapeutique, elle ne faisait toutefois pas obstacle à la loi Lafay de 1949 qui précisait que les prélèvements de cornées étaient soumis à un legs testamentaire. Or le jeune homme n'avait pas fait un tel legs. On leur fit savoir que le prélèvement de cornée pouvait être assimilé à un prélèvement de tissu dans la mesure où de nouvelles techniques évitaient l'extraction tout entière du globe oculaire. En ce cas, ils demandèrent pourquoi les globes oculaires de leur fils avaient été remplacés par des prothèses : 'Lorsque nous avons découvert que les médecins d'Amiens avaient trahi notre confiance en ne prélevant pas seulement les quatre organes que nous avions accepté de donner, mais aussi les veines, des artères et surtout les yeux de notre fils Christophe, remplacés par des globes oculaires artificiels, nous fûmes horrifiés. Les médecins n'avaient pas respecté leur engagement, avaient menti en cachant la réalité d'un prélèvement multi-organes, n'avaient pas respecté la loi Lafay qui exigeait un legs testamentaire pour le prélèvement des cornées. D'un point de vue éthique, nous découvrîmes que les médecins se mettaient au-dessus des lois et, encouragés par le législateur qui avait mis à leur disposition le consentement présumé, avaient une ignoble notion de la dignité et du respect de la personne humaine. La confiance a disparu, la transparence a été malmenée. Que reste-t-il ? Un profond sentiment d'horreur face aux prétendus progrès de la médecine. En effet, 'l'affaire d'Amiens' n'est pas un simple dérapage. Elle met en cause tout le système."
** Alain Tesnière est l'auteur du livre paru en 1993 aux Editions du Rocher : "Les Yeux de Christophe. L'affaire d'Amiens", et de l'article paru dans "Etudes", Paris, Novembre 1996 : "Où est l'éthique ?" [pp. 481-484]
Le 10 décembre 2007, M. Tesnière publiait un article sur AgoraVox, intitulé :
Information sur le don d’organes par la carte Vitale 2 : un affaiblissement du témoignage de la famille
Ce même “Halman” lui a écrit en réponse :
“Alain Tesnière.
Le ou les personnes qui doivent la vie à votre fils, je ne crois pas qu’ils emploieraient le terme de ‘dépecé’, mais de sauveur de vies.
Personne ne peut parler à la place d’un mort sur ce genre de sujet, et encore moins décider.
La carte de donneur est une excellente chose, tellement de proches du défunt refusent le don d’organes alors que l’accidenté avait sa carte. Je sais bien, l’émotion, tout ça, mais il faut passer par dessus de ses émotions quand il y a le feu.
Avec tous les drames épouvantables que j’ai du subir, j’en sais quelque chose.
Le début de votre article est excelent [sic], mais la fin ne fait pas du tout avancer le schmilblick, au contraire.
En réalité vous êtes encore torturé par l’émotion et trouvez moyen de couper les cheveux en quatre pour justifier votre émotion. Pour vous c’était en 1991, cela fait 16 ans. Pour moi c’était il y a 28, 26, 25, 5 et 2 ans. Et vraiment, la question du don d’organe, à chaque fois j’ai trouvé cela tellement naturel !
Le jour où j’ai eu mon infarctus, on m’a dit après que seulement 10 minutes plus tard et j’y passais, j’ai trouvé la force de dire aux pompiers et aux médecins des urgences que j’avais ma carte de donneur au cas où.
Je suis aide soignant et j’ai ma carte de donneur depuis toujours.
C’est pourquoi je trouve votre article épouvantable, même si dans la précipitation en lisant le début j’ai voté +1.
Vous vous imaginez sans doute que tous vos problèmes d’éthiques que vous soulevez on en parle pas tous les jours entre nous ? A chaque décès de patient c’est une des discussions sans fin.
Que si c’était si simple nous n’aurions pas résolu ces problèmes il y a longtemps ?
Personnellement c’est tellement évident que lors de ma mort si un ou plusieurs de mes organes peuvent sauver des vies, la question ne se pose même pas.
Et votre article risque de convaincre des gens de ne pas donner et de faire mourir des patients en attente.
‘Discours qui empêche toute réflexion. L’Agence de biomédecine relayée par d’autres associations ou fondations distille un discours qui infantilise et qui culpabilise le citoyen.’ Pour certaines personnes, il faut bien en arriver là.
‘Si vous êtes un généreux donateur, l’Agence vous recommande de prendre une carte. Propos équivoques puisqu’il y a consentement présumé. En plus, elle vous suggère de le faire lors d’événements dramatiques : la commémoration d’un deuil familial, la dégradation de la santé d’un proche, l’hospitalisation d’un ami, une actualité concernant l’insuffisance rénale ou toute autre maladie pouvant nécessiter une greffe. Prendre des décisions sous le coup d’émotions, est-ce bien raisonnable ?’ C’est faux. On sensibilise dans les écoles, les collèges, les lycées, les cours d’aides soignants et d’infirmières. Il se passe beaucoup de chose ailleurs que dans les médias.
Vous rendez-vous compte qu’en cas de décès les proches doivent faire un travail philosophique et psychologique important en quelques heures alors que tout un chacun aurait du faire soi même spontanément ce travail dès ses jeunes années ?
La réflexion sur la mort, sa prise de position, c’est un travail sur soi que l’on fait normalement vers l’âge de l’adolescence. Alors imaginez lorsqu’on se trouve face à des gens ‘adultes’ qui n’ont occulté le problème toute leur vie et qui doivent faire cette révolution psychologique qu’ils n’ont jamais faite en quelques heures seulement.
Imaginez le parent qui refuse, alors qu’à quelques kilomètres un patient va décéder dans quelques heures ou jours parce qu’il n’aura pas reçu le foie, le cœur, les poumons qui lui sont vitaux.
Face à cela, le coupage de cheveux en quatre d’un texte de loi pour se trouver des excuses est pour nous, soignant, insuportable [sic] et mal placé.
La douleur n’excuse pas de dire n’importe quoi 16 ans après. Sur le coup oui, on n’y fais pas attention, mais 16 ans après, non.
Pour nous c’est une véritable agression de notre volonté de sauver des vies.
Cette brochure nous l’avons tous lue plusieurs fois.
Et vraiment nous n’y voyons pas ce que vous y voyez, elle est claire et concise.”
Ces propos, maladroits pour ne rien en dire d’autre, m’avaient fait réagir :
"’Discours qui empêche toute réflexion. L’Agence de biomédecine relayée par d’autres associations ou fondations distille un discours qui infantilise et qui culpabilise le citoyen.’ Pour certaines personnes, il faut bien en arriver là." Autrement dit : vous êtes d’accord avec l’avis de M. Tesnière, mais pour vous, professionnel de la santé, il est NORMAL de manipuler les usagers de la santé. C’est précisément CELA qui a causé le préjudice subi par M.Tesnière. No comment.”
Je reviens à mon article publié le 21/10/2010 sur AgoraVox. Voici le commentaire posté par “Halman”, en ce qui concerne ce cas d’actualité (la patiente d’une clinique bordelaise) :
“Dans cette affaire c’est un sacré coup de bol surtout.
La famille était plus dans l’émotion que dans les données médicales.
Ils auraient tout aussi bien pu se tromper.
C’était du 50/50.
J’ai vécu ça deux fois avec des patientes âgées quand j’étais aide soignant en gériatrie. A l’époque le protocole était différent, il était basé sur l’arrêt cardiaque depuis un certain temps, vérifié par un autre médecin, alors qu’aujourd’hui c’est sur la mort cérébrale.
Deux fois des personnes âgées se sont retrouvées dans un coma tel que les médecins même en suivant strictement le protocole avaient déclaré l’avis de décès et prévenu la famille.
A l’époque les scanners étaient rares, et on n’aurait pas eu l’idée d’envoyer un décès de gériatrie en scanner.
Hors [sic] quand les familles sont arrivées, les patientes s’étaient relevées de leurs comas et parlaient tranquillement avec les voisines de chambres comme si de rien n’était.
Elles avaient eu juste l’impression d’avoir fait une longue sieste et ne comprenaient pas pourquoi elles passaient du petit déjeuner à l’heure du diner directement.
On savait tous qu’il devaient y avoir, c’est horrible, assez souvent des patients enterrés non décédés mais dans le coma qui peut-être s’étaient réveillées [sic] dans le cercueil.
Cette famille a eu plus de bol que de l’instinct. Refus du décès dans quand on leur apprend, ce sont des réactions fréquentes et normales.
C’est pourquoi le protocole de la mort cérébrale a été mis en place pour éviter ces choses là.”
“Refus du décès dans quand on leur apprend, ce sont des réactions fréquentes et normales. C’est pourquoi le protocole de la mort cérébrale a été mis en place pour éviter ces choses là.”
Voilà qui demanderait quelques explications. J’ai montré ce message à des proches confrontés à la question du don d’organes il y a quelques années. Curieusement, je note au passage que ces proches, dont je m’efforce de recueillir le témoignage depuis 2005, parlent bien plus de sacrifice que de don. “Pourquoi nous ? Pourquoi a-t-il fallu que ce soit précisément nous qui fassions ce sacrifice ?” est un propos récurrent. Mais il est vrai que ces proches, sans qui pourtant aucune greffe n’aurait été possible, sont le parent pauvre de la communication grand public, dont force est d’avouer qu’elle pencherait en faveur de ce qu’un sociologue auteur chez Gallimard, Philippe Steiner, a appelé “marketing social du Don”. Inutile de préciser que ces proches ont été indignés par le message dudit “Halman”, en même temps qu’ils ont développé une conscience aigue de ce discours public sur le Don. Leur réaction a été de me dire : “Ne vous en mêlez pas ! Vous allez vous faire broyer par cette machine très volontaire du Don. Ce sera pot de terre contre pot de fer.”
Il me semble que nous nous devons de leur prouver que leurs craintes sont infondées. Quoique …
En avril 2009, je m’entretenais avec un chirurgien cardiaque, membre de l’Académie Nationale de Médecine, lui demandant ce qu’il pensait du protocole des “prélèvements ‘à cœur arrêté’”. Permettez-moi au passage de signaler que je trouve choquant ce qu’il faut bien appeler l’absence d’information au grand public sur cette réalité : depuis 2007, un arrêt cardiaque peut faire de chacun d’entre nous un potentiel donneur de reins et de foie, ainsi que de tissus (tissus composites de la face ?) Le consentement présumé est inscrit dans la loi, il suppose un consentement éclairé, lequel suppose une information au préalable du consentement. Ledit chirurgien cardiaque me fait résumer les classes de Maastricht, afin de s’assurer de ma compréhension du sujet. Puis il me dit : “Qu’est-ce que c’est que ces conneries ?” Il parlait bien du protocole de prélèvement “à cœur arrêté” tel qu’il a été mis en place en France. Bien entendu, je sollicite de la part de cet expert quelques explications. Je ne tarde alors pas à comprendre que les “stents”, ces petits ressorts mis en place dans les artères coronaires pour leur restituer leur calibre normal en cas de sténose, font parfois l’objet d’un usage abusif de la part de certains cardiologues, qui, afin de garder des patients qui leur rapportent “mieux qu’un livret A à la Caisse d’Epargne”, se gardent bien d’adresser (à temps) lesdits patients en insuffisance cardiaque sévère à un chirurgien cardiaque, préférant “jouer la montre” en prescrivant médicaments et “stents” là où il faudrait une opération. Cet usage abusif des “stents” m’a été confirmé en décembre 2009 par un cardiologue du 15e arrondissement de Paris, expert près les Cours d’Appel de la Région. Ces patients, sur lesquels on a posé parfois une dizaine de “stents”, vont pouvoir faire un arrêt cardiaque sur la voie publique et devenir donneurs d’organes (reins et foie) dans le protocole du prélèvement “à cœur arrêté” …
Je me borne à résumer des faits qui vous sont fort bien connus dans le seul but de me livrer à une petite explication de texte de la phrase citée plus haut : “Qu’est-ce que c’est que ces conneries ?”
Il faudrait aussi mentionner l’assistance circulatoire mécanique comme réponse à l’insuffisance cardiaque sévère, développée très tardivement comme alternative à la greffe –en fait, cela commence tout juste, alors que le professeur Daniel Loisance, chirurgien et membre lui aussi de l’Académie de Médecine, proposait cette alternative à la greffe en 2004 déjà, appelant – en vain – à un changement de paradigme (lien vers l’article sur le blog). Si on lit entre les lignes, on comprend que dans le supermarché du Don, la greffe cardiaque est une tête de gondole. Le Don, une machine à broyer, très volontaire ? “Tout ce qui n’est pas donné est perdu”, “Le prélèvement constitue une glorification de la mort”. Ces propos, émanant d’un pionnier de la greffe cardiaque en Europe, pourtant reconnus comme abusifs par certains acteurs des transplantations, n’en continuent pas moins à être relayés par la presse, toujours prompte à nous donner une image des transplantations d’organes au travers des propos tenus par certains membres d’associations de collectes d’organes telles que France ADOT, où les greffés nous expliquent qu’il faut donner nos organes. Peut-on être juge et partie ? Dans son livre “La Chair à vif”, le sociologue David le Breton explique que certains usagers de la santé, en réaction aux propos de ces associations, jugés “trop racoleurs”, ont pris position “contre le don d’organes”. Un discours “pour le don” contre-productif ?
Messieurs les Membres de l’Académie Nationale de Médecine, Monsieur le Président de la Section Ethique et Déontologie, certains d’entre vous m’ont écrit que la plupart des gens avaient une réflexion profonde au sujet du don d’organes. Après cinq années de médiation éthique entre les usagers de la santé (confrontés ou non à la question du “don” des organes et tissus d’un proche), les personnels de santé et les politiques, sur le thème de l’éthique et des transplantations d’organes, permettez-moi de vous répondre : je ne suis pas d’accord. L’image des transplantations dans le discours public est biaisée à un point dont nous n’avez sans doute pas conscience. Combien savent que le “don” d’organes n’est pas réservé aux jeunes qui meurent en pleine santé lors d’un stupide accident de la route ? Sans pousser le souci du détail jusqu’à parler du programme “old for old” dans la transplantation rénale ou encore de “greffons dérogatoires”
Je ne vous cache pas ma déception. Je pensais que le don d’organes, c’était plus … humain. Que là où l’on pouvait mettre en place une micro-turbine pour assister un ventricule défaillant, on ne cherchait pas à recourir à la greffe comme un réflexe de la forme, comme si le sacrifice – je dis bien : le sacrifice, sans lequel aucun “greffon” n’est obtenu – était purement anecdotique et qu’il était vain de rechercher des alternatives à la greffe avec plus de … comment dirais-je … détermination ? … Je n’aborderai même pas ici le sujet de la greffe de sang de cordon en alternative à la greffe de moelle osseuse, pourtant, il me semble, en tant que femme et usager de la santé, que c’est un point d’importance. Là encore, une certaine machine à broyer aurait-elle fait prendre du retard au développement des thérapies par le sang de cordon ? Les associations de promotion du Don ne parlent, aujourd’hui comme hier, que de Don de Moelle Osseuse … Don du cœur, don de moelle osseuse. Les têtes de gondole des associations de promotion du Don – sur lequel vous m’affirmez que le grand public a pourtant une réflexion profonde. Je vous inviterais volontiers à sonder la profondeur des commentaires de la part des usagers de la santé sur des sites comme Doctissimo (articles concernant les greffes et transplantations), ou à prendre connaissance des 360 commentaires reçus en réponse à mes 50 chroniques bioéthiques sur AgoraVox, mais je suis bien consciente de votre manque de temps à consacrer à de telles tâches ingrates : prendre la peine d’expliquer des faits au public. Aussi m’y suis-je, comme qui dirait, collée :
Il me semble que le discours public gagnerait à plus de transparence, à moins d’“étrange omerta”, et à intégrer des nuances qui n’y ont pas leur place aujourd’hui. Il me semble, mais ce sera là un coup d’épée dans l’eau, même si les lois bioéthiques sont en cours de révision, que le consentement présumé inscrit dans la loi est une fiction juridique. Avons-nous tiré les leçons de l’Affaire d’Amiens ?
Avec mes salutations cordiales.
C. Coste
--
Catherine Coste
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Catherine22102010
Catherine Coste

Auteure du blog “éthique et transplantation d’organes”


VERSION AUDIO


Trilogie sur les transplantations d'organes

Commentaire de mon éditeur (désolée, je dois encore garder le secret jusqu'en juin 2011, un peu de patience ...) : "Vous poussez jusqu'aux limites de l'imaginaire les progrès d'une science devenue le véhicule des hantises et du subconscient collectif." Vous l'avez deviné, mon petit nom chez mon éditeur, c'est Next ...

Sans la vigilance de ses proches, la patiente aurait-elle été prélevée vivante ?

Une clinique de Bordeaux qui fait parler d'elle au JT du soir de France 2 le 20 octobre 2010 : une patiente d'une soixantaine d'années aurait été inscrite trop tôt dans la filière des donneurs d'organes. Alors que les soignants en charge de cette patiente sont prêts à la déclarer en état de "mort encéphalique" (diagnostic de mort), ses proches, notamment son fils, ont un doute. Ils refusent de signer un constat de décès faisant de cette patiente un (potentiel) donneur d'organes.
Lire cet article sur AgoraVox, le journal citoyen en ligne : cliquer ici.

On se rappelle l'article du Parisien, en juin 2008 : "Le donneur n'était pas mort", repris par "Le Monde" et "Le Temps". Encore patient, déjà donneur ? Eh bien, c'est à nouveau la même histoire. Bis repetita (non placent). [Latin : les choses répétées ne plaisent pas. Le proverbe latin en usage est : bis repetita placent.]
"Une patiente, qui avait été déclarée 'très certainement cliniquement morte' par un médecin, s'est réveillée quelques heures plus tard dans un hôpital de Bordeaux, a-t-on appris mercredi auprès du directeur de la clinique.
Lydie Paillard, 60 ans, suivie pour un cancer depuis 2005 dans la polyclinique Bordeaux Rive droite à Lormont, dans la banlieue bordelaise, a fait un malaise lundi lors du traitement médical préalable à une séance de chimiothérapie, a expliqué à l'AFP Yves Noël, directeur de la polyclinique Bordeaux nord, dont dépend l'établissement de Lormont.
Elle a aussitôt été ranimée par un médecin urgentiste mais ce dernier, après avoir pris l'avis d'autres médecins, a annoncé par téléphone aux enfants de Mme Paillard que leur mère, placée sous un appareil respiratoire, 'était très certainement cliniquement morte', a poursuivi M. Noël.
La patiente a ensuite été transférée vers le CHU de Bordeaux où elle a subi un scanner qui a révélé qu'il n'y avait pas de mort cérébrale, selon le directeur de la clinique.
Mme Paillard 's'est réveillée quatorze heures plus tard au CHU de Bordeaux', comme l'a révélé Sud Ouest dans son édition de mercredi.
'C'est une forme de miracle', reconnaît M. Noël, tout en admettant que l'urgentiste a commis une 'erreur de communication' mais pas 'une erreur médicale car il lui a sauvé la vie'.
La direction de la polyclinique va proposer à la patiente et à sa famille de rencontrer l'équipe de médecins afin qu'ils parlent de ce défaut de communication." (Source)
"'On allait donner le permis de tuer notre mère', répète sans cesse Sébastien en évoquant l'incroyable mésaventure dont a bien failli être victime sa mère. L'histoire, révélée mercredi par le quotidien Sud-Ouest, fait froid dans le dos.
Lydia, une femme de 60 ans, se présente lundi dans une clinique de la banlieue bordelaise pour subir une chimiothérapie. Peu après le début du traitement, son état se dégrade et elle sombre dans le coma. Le médecin constate un accident cérébral et prévient la famille que non seulement 'le pronostic vital est engagé', mais que Lydia 'ne pourra pas revenir'. Pire, les médecins préviennent les enfants qu'ils vont devoir donner l'autorisation de 'débrancher la machine' qui maintient leur mère en vie.
C'en est trop pour les proches qui obtiennent le transfert de la patiente vers le CHU de Bordeaux. Et c'est là que se produit l'impensable. Déclarée 'cliniquement morte', Lydia se réveille enfin, 14 heures plus tard et est même capable de tenir une conversation. Un miracle qui plonge sa famille dans le soulagement, mais aussi la colère.
Aujourd'hui ils veulent comprendre comment une telle méprise a pu se produire. Les médecins évoquent 'un cas rare, extraordinaire'. Ils évoquent la possibilité d'une 'crise d'épilepsie donnant l'apparence de la mort'." (Source)
Le reportage diffusé au JT du soir de France 2 ce 20/10/2010 est on ne peut plus clair : la patiente aurait été déclarée en état de mort encéphalique (ou mort cérébrale) prématurément. Elle allait pouvoir, là encore prématurément, devenir potentiel donneur ...
"Ce qui me gêne, c'est que maintenant, on anticipe la mort", me confiait en juin 2008 une infirmière cadre chargée de cours en IFSI (Institut de Formation en Soins Infirmiers) de la banlieue parisienne, qui avait travaillé durant près de deux décennies comme infirmière de coordination des transplantations en France, puis en Suisse, et à nouveau en France. Face à mon silence perplexe, elle ajoute : "On prévoit le décès". Un préavis de décès ?! Un constat de décès anticipé ?! J'avoue que j'ai du mal à suivre. Je visualise la couverture d'une BD manga japonaise bien connue, Ikigami. Du coup, j'ai écrit un Post sur le sujet ...  "Pour pouvoir plus facilement organiser les prélèvements d'organes ?", demandais-je alors, peu fière de ma question. "Surtout pour avoir plus de donneurs !", avait-elle répondu.
15.000 patients en attente de greffe en France. Début septembre 2010, une enquête d'opinion, sous forme de questionnaire, distribuée aux soignants afin de recueillir leur opinion sur les stratégies visant à optimiser le "don" d'organes (OPTIDO). Un logiciel aux normes européennes afin de recenser les potentiels donneurs en amont de la "mort encéphalique", ainsi que ceux ayant fait un arrêt cardiaque, dans tous les hôpitaux de France et de Navarre (Cristal Action) - ce logiciel ayant été mis en place par l'institution gouvernementale chargée de promouvoir et d'encadrer l'activité des transplantations d'organes : l'Agence de la biomédecine. "Jamais la pression n'a été aussi forte pour que l'on trouve des donneurs ou des potentiels donneurs", me confiait en décembre 2009 un ancien chirurgien, membre senior de l'Académie Nationale de Médecine. Mardi 19 octobre 2010, un projet de loi présenté à l'Assemblée Nationale afin de lutter contre le trafic d'organes (ou "tourisme de transplantation") en France.
On ne peut pas d'une main demander aux personnels de santé de trouver des donneurs en amont d'un état de mort encéphalique ou encore d'arrêt cardio-respiratoire persistant (prélèvements "à coeur arrêté") et, de l'autre, accuser ces mêmes personnels de santé qui font péniblement un devoir pénible (pardonnez-moi d'insister) de "défaut de communication" lorsque les choses tournent mal (tout dépend du point de vue, n'est-ce pas). Encore patient, déjà donneur ? Voilà qui annonce des conflits d'intérêts, un peu comme si on avait décidé de mettre en balance le code de déontologie médicale ("d'abord ne pas nuire") d'un côté et, de l'autre, un "droit opposable à la greffe" pour les quelque 15.000 patients en attente de greffe ...
La greffe, un problème sociétal
L'usager de la santé lambda finit par se rendre compte de cette évidence : il y a du rififi dans les greffes ...
Mangaka (dessinateurs de manga), à vos plumes !
  ==> Version audio

Du rififi dans les greffes



Catherine
Catherine Coste
Mercredi 20 octobre 2010 : révision des lois bioéthiques, présentées en Conseil des ministres puis discutées au Parlement. Ces lois ont été promulguées en 1994, elles ont pour objectifs de couvrir les questions de bioéthique et d’encadrer les activités médicales et de recherche utilisant les éléments du corps humain dans les champs de l’assistance médicale à la procréation, la génétique ou la greffe d’organes.

Lire cet article sur AgoraVox, le journal citoyen en ligne.

Mardi 19 octobre, La députée UMP Valérie Boyer a déposé à l’Assemblée Nationale une proposition de loi visant à lutter contre le tourisme de transplantation d’organes, qui fleurit depuis plusieurs années au détriment des populations des pays les plus pauvres :
"S’inspirant de la législation au Canada et en Israël, la députée propose que chaque patient greffé à l’étranger fournisse ’avant son retour en France’ un certificat attestant que l’organe a bien été donné. C’est ensuite l’Agence de biomédecine qui centralisera ces certificats.
Cette proposition de loi a vocation à se transformer en ’amendement’ au projet de loi de révision des lois de bioéthique, qui sera présenté mercredi en Conseil des ministres puis discuté au Parlement, a-t-on expliqué dans l’entourage de la députée.
Le texte impose également à chaque médecin de signaler à l’agence de biomédecine l’identité de toute personne greffée qu’il examine." (Source)
Une cinquantaine de Français auraient été se faire greffer un rein issu du trafic d’organes en 2009 (Agence de la biomédecine). Dans un contexte où l’on parle de grèves et non de greffes, petit décryptage ...
Les lois bioéthiques actuellement en cours de révision vont élargir l’activité du don de rein de son vivant. Les institutionnels ne veulent pas attirer l’attention du grand public sur les possibilités de trafic d’organes qui découleront forcément de l’élargissement de cette activité : sera-t-il possible à un patient en attente de greffe de se présenter devant la commission de l’Agence de la biomédecine, chargée de valider la demande de greffe, avec un soit-disant membre de la famille, qui sera en fait un donneur payé ? Les faux livrets de famille et autres combines, cela existe ... Mais en France, tous les chemins mènent au Don, le trafic n’existe pas (ou de manière tout à fait marginale). Voilà la position officielle. Pour éviter le trafic, il suffirait de pousser sur le Don. Le taux de refus des proches confrontés à la question du don d’organes est de trente pour cent (moyenne nationale), les institutionnels des transplantations font tout pour faire passer ce taux à vingt pour cent. Or ce "marketing social du Don" (la formule est d’un sociologue, Philippe Steiner, auteur chez Gallimard) présente des failles :
Actuellement, une enquête est en cours, proposant aux médecins confrontés ou non à la prise en charge de potentiels donneurs d’organes de “participer à une étude concernant les perceptions médicales en lien avec les stratégies d’optimisation du don d’organes”. Cette enquête a été initiée le 2 septembre 2010. Sa raison d’être : “Bien que la greffe d’organes reste une mission prioritaire de santé publique et malgré une implication forte des professionnels, la réflexion des cliniciens sur ce sujet reste (…) peu connue et évaluée, alors que plusieurs travaux ont montré les difficultés et les interrogations des équipes sur la question.”
Cette étude, baptisée OPTIDO (optimiser le don d’organes), est coordonnée par :
Dr.Edouard FERRAND, service d’anesthésie, Hôpital Foch, Suresnes
Dr. Jean-Pierre FULGENCIO, service d’anesthésie réanimation, Hôpital Tenon, Paris
Dr. Christophe QUESNEL, service d’anesthésie réanimation, Hôpital Tenon, Paris
Dr. Arthur NEUSCHWANDER, service d’anesthésie réanimation, Hôpital Saint-Antoine, Paris
Mélanie CHASTRUSSE, infirmière de recherche, Hôpital Foch, Suresnes.
La raison d’être de cette étude est expliquée dans une lettre qui accompagne un questionnaire adressé aux médecins de l’ensemble des services des établissements MCO - services de soins de courte durée, dit MCO (médecine, chirurgie, gynécologie- obstétrique), en service ou unité d’anesthésie, de réanimation, d’urgences, de néphrologie, de pneumologie, de cardiologie, de neurologie ou d’hépato-gastro-entérologie.
“La loi de Bioéthique promulguée en 1994 a pour objectifs de couvrir les questions de bioéthique et d’encadrer les activités médicales et de recherche utilisant les éléments du corps humain dans les champs de l’assistance médicale à la procréation, la génétique ou la greffe d’organes. Prévue pour être régulièrement révisée, comme en 2004, afin de répondre à l’évolution des progrès scientifiques et techniques, une nouvelle révision est envisagée dans les prochains mois. A cette occasion, il nous paraît intéressant de mieux faire émerger la réflexion des médecins de terrain autour de l’une des thématiques encadrée par la loi que représente le prélèvement et la greffe d’organes et de vous faire participer à la réflexion concernant les perspectives d’optimisation de cette activité.” Il est précisé que ce questionnaire s’adresse ’”aux médecins seniors de l’ensemble des services français impliqués dans la prise en charge des patients en fin de vie en situation aigüe, quelle que soit leur expérience dans le domaine du prélèvement d’organe.” Il doit être rempli de manière anonyme. Il s’agit donc d’explorer la réflexion des cliniciens impliqués dans la prise en charge des patients en fin de vie en situation aigüe, dans la perspective d’optimiser le prélèvement et la greffe d’organes.
Concrètement, cinq médecins seniors par service ou unité doivent remplir le questionnaire. Il n’est pas impératif d’avoir une expérience en matière de prise en charge de potentiels donneurs, puisque ce questionnaire vise à sensibiliser un maximum de soignants à la nécessité de recruter le plus grand nombre possible de potentiel donneurs. Les services concernés : anesthésie, réanimation, urgences, néphrologie, pneumologie, cardiologie, neurologie et hépato-gastro-entérologie. Un logiciel mis en place à l’échelle européenne par l’Agence de la biomédecine, institution gouvernementale chargée d’encadrer et de promouvoir l’activité des transplantations d’organes et de tissus, Cristal Action, doit contribuer à améliorer le recensement des potentiels donneurs. Il n’y a pas si longtemps, ces derniers occupaient les lits des services de réanimation. On peut constater que la tendance actuelle est d’élargir au maximum le spectre de ces recrutements : les potentiels donneurs se recrutent dans différents services, différentes unités de soins hospitaliers, toujours afin d’optimiser le “don” d’organes, et non plus dans un seul service ou une seule unité – en réanimation. Tout potentiel donneur, en amont du diagnostic d’un état irréversible, comme la “mort encéphalique” ou l’”arrêt cardio-respiratoire persistant”, sera inscrit dans le programme ou logiciel “Cristal Action”. On peut évidemment se poser la question de savoir s’il est éthique de considérer un patient comme un donneur d’organes (encore patient, déjà donneur ?), ce qui peut conduire les soignants à modifier les soins apportés à un patient qui pourrait être amené à changer de statut (de patient, devenir donneur) prématurément. Le questionnaire OPTIDO pose cette question aux soignants, ainsi que nous le verrons.
Notons également qu’en préambule au questionnaire, le groupe de coordination de l’étude OPTIDO précise que les Etats Généraux de la Bioéthique ont permis en 2009 un “large débat national, où les concitoyens et le Comité Consultatif National d’Ethique ont été invités à s’exprimer”. Dans le cadre des révisions des lois bioéthiques, ce questionnaire trouve donc sa place, puisqu’après avoir entendu les citoyens, il s’agit de recueillir les avis des personnels de santé.
Cette étude OPTIDO renseigne sur les prélèvements "à cœur arrêté", qui ont repris en France en 2007. Une situation d’arrêt cardiaque peut faire de chacun de nous un potentiel donneur de reins. Vous le saviez ? Non, bien sûr. Pourtant, le consentement présumé inscrit dans le loi suppose une information au préalable, afin que ledit consentement (au don de ses organes à sa mort) soit éclairé. Pour rappel : 15.000 patients en attente de greffe en France, les deux tiers attendent un rein, il suffit de greffer un seul rein, un donneur permettant donc de prolonger la vie de deux patients attendant la greffe en dialyse, laquelle est plus coûteuse que la greffe, car une greffe de rein économise à la Sécu entre 9 et 12 ans de dialyse (source : Agence de la biomédecine). Voici donc l’information sur les prélèvements "à cœur arrêté" :
Le potentiel donneur de reins se trouve dans un état d’“arrêt cardio-respiratoire persistant” (lorsque l’arrêt cardiaque est jugé irréversible), on parle de “décès suite à arrêt cardiaque” (terme plus rassurant), cet état est distinct de celui de “mort encéphalique”. Ces deux états (arrêt cardiaque et mort encéphalique) peuvent désormais conduire au prélèvement d’organes dit “post-mortem”. OPTIDO : “Le prélèvement à cœur arrêté survenant à la suite d’un arrêt cardiaque sur la voie publique est autorisé par l’Agence de la Biomédecine depuis 2004. Cette procédure est actuellement expérimentée dans le cadre d’un protocole rigoureux dans plusieurs centres français, en lien avec l’Agence de la Biomédecine, après avoir été développé dans plusieurs pays.
La procédure associe :
- un délai d’arrêt cardiaque < 30 mn avant début du massage cardiaque externe (MCE)
- une durée de MCE minimale de 30 mn [ce sont les tentatives visant à réanimer le patient, Ndlr.]
- un arrêt de MCE de 5 mn. [Autrement dit, le médecin ne fait rien. Il attend, les bras croisés. Ceci choque médecins et patients : ces cinq minutes d’attente sont problématiques sur le plan de l’éthique, Ndlr.]
- un diagnostic de mort en cas d’absence de reprise d’activité.
- la mise en place de canules. [Procédure médico-chirurgicale invasive, Ndlr.]
- un système de perfusion régionale par circulation extra corporelle (CEC), sonde de Gillot ou sonde de Fogarty. [Dans les trois cas, il s’agit d’une procédure chirurgicale invasive, Ndlr.]
- un délai entre arrêt cardiaque et branchement de la CEC < 120 – 150 mn
- un délai entre CEC et prélèvement < 180 mn
La famille doit être prévenue du diagnostic de mort et doit témoigner des souhaits du patient dans un délai de 5h00 (300 mn) entre l’arrêt cardiaque et le prélèvement."
Un cas particulier de prélèvement “à cœur arrêté” : le prélèvement d’organes dans un contexte de fin de vie : “Certains pays ont développé le prélèvement d’organes à cœur arrêté après une décision de limitation de traitements en réanimation (USA, Belgique). En 2004, en préambule de la réflexion concernant le Maastricht III [c’est-à-dire ce cas particulier de prélèvement ‘à cœur arrêté’, Ndlr.], un décret de l’Agence de la Biomédecine avait souligné le besoin d’une loi encadrant les décisions de fin de vie. Cette loi, dite Leonetti, est désormais dans les textes depuis le 22 avril 2005. Cette procédure dite Maastricht III n’a, depuis, jamais été évaluée en France.” (…) “Procédure de prélèvement d’organes et décision de fin de vie en réanimation :
Certains pays ont développé le prélèvement à cœur arrêté dans les suites d’une décision d’arrêt de traitement en réanimation. [Maastricht III dans la classification internationale des catégories de potentiels donneurs de Maastricht. Maastricht III est pratiqué aux USA, au Canada, en Belgique, aux Pays-Bas, mais est interdit en France et en Allemagne, Ndlr.] (…) [Dans ces pays,] (…) le potentiel donneur est considéré comme un sujet en limitation de traitements, du fait d’une disproportion des soins par rapport à un objectif de survie ou de qualité de vie. Dans ce cas, le contexte, le diagnostic de la pathologie responsable et le simple examen clinique suffisent pour proposer le prélèvement. (…)
Dans ce cadre, et en tenant compte d’un délai d’ischémie * imposé court, la procédure associe :
- un processus collégial de réflexion aboutissant à la décision d’arrêt de traitement
- une information des conditions de décès après arrêt des traitements destinée à la famille qui pourra rester auprès du patient jusqu’à ses derniers instants, si elle le souhaite
- la proposition d’un don d’organes qui surviendrait dans l’heure suivant l’arrêt du cœur [Les organes sont en fait prélevés, dans la plupart des cas, entre 2 et 5 mn après l’arrêt du cœur, Ndlr.]
- la mise en place d’une circulation extracorporelle régionale avant arrêt des traitements [afin d’assurer la conservation des organes, même après l’arrêt du cœur, Ndlr.], n’excluant pas la présence des proches durant les derniers moments
- le décès du patient dans une stratégie d’arrêt des traitements, en présence des proches s’ils le désirent
- la prise en charge au bloc pour les prélèvements dans l’heure suivant le décès.”
Le don d’organe de son vivant (rein, lobe de foie ou plus rarement de poumon) : “La France, et en particulier, l’Agence de la Biomédecine, a choisi de ne pas privilégier le donneur vivant, en considérant que le risque pris chez le donneur n’était pas justifié au regard de la non-exhaustivité atteinte des prélèvements chez le patient décédé, à cœur battant [état de ‘mort encéphalique’, Ndlr.] ou arrêté [état d’’arrêt cardio-respiratoire persistant’, Ndlr].”
OPTIDO cherche à recueillir la perception des soignants sur la fin de vie dans le contexte du prélèvement d’organes vitaux :
“Estimez-vous que les décisions de fin de vie telles qu’elles sont prises dans votre service sont bien menées, en particulier en toute clarté pour tous les intervenants autour du patient (équipe, proches ?)”. Le soignant doit ici évaluer la fin de vie telle qu’elle se déroule dans son service. Il est amené à prendre conscience, si ce n’est déjà fait, du caractère inévitable de la variabilité (relativité) des critères de définition de la mort, en particulier dans le contexte d’un éventuel prélèvement d’organes vitaux :
“Réflexion autour d’une perspective d’évolution des textes concernant les critères légaux de mort en France” : là encore, une question portant sur des faits est suivie d’une question d’opinion : “Saviez-vous que la législation concernant le diagnostic de mort encéphalique avec possibilité de prélèvement d’organes varie selon les pays (par exemple, parfois l’examen clinique suffit) ? Cette variabilité selon les pays vous fait-elle vous interroger sur la définition de la mort ?”
La question est aussi de savoir comment le soignant perçoit son rôle dans le recensement des donneurs potentiels, c’est-à-dire dans le repérage de “malades susceptibles d’évoluer en mort encéphalique” : cette activité est-elle en accord avec ses convictions ? S’agit-il d’une activité ou d’une mission ? Comment est-elle perçue : assumée, appréciée, considérée comme un mal nécessaire, comme une mission intéressante sur le plan scientifique, comme une “mission que j’accepte d’assumer mais que je n’apprécie pas”, comme une “mission que je n’accepte personnellement pas d’assumer”, comme une “mission qui ne me concerne en rien” ?
Vient ensuite une question inattendue pour le grand public : “le patient est-il vraiment mort ?” : le soignant doit répondre à la question : “lorsque les critères légaux actuellement en vigueur pour définir la mort encéphalique sont remplis, le patient est-il vraiment mort ?” Les réponses possibles sont :
“Oui, il n’y a aucun doute dans mon esprit” OuiNonNe sait pas
“Oui, mais ce n’est quand-même pas la même chose qu’un décès habituel”
“Non, un doute peut toujours persister à cause d’une erreur de diagnostic”
“Non, pour moi, les critères actuels ne sont pas médicalement fiables”
Il est précisé : “merci de répondre à toutes les questions.” Le soignant est confronté au caractère inévitable de la variabilité (relativité) des critères de définition de la mort, en particulier dans le contexte d’un éventuel prélèvement d’organes vitaux.
A présent, je vous demanderais de bien vouloir vous mettre un instant dans la peau d’un proche confronté à la question du Don des organes :
Votre proche est hospitalisé, dans un service de soins de courte durée, dit MCO (médecine, chirurgie, gynécologie- obstétrique), en service ou unité d’anesthésie, de réanimation, d’urgences, de néphrologie, de pneumologie, de cardiologie de neurologie ou d’hépato-gastro-entérologie. Ou encore, on vous a appelé pour vous informer que votre proche a fait un arrêt cardiaque sur la voie publique …
Il vous faut savoir que dans toutes ces situations, votre proche peut être un potentiel donneur d’organes et de tissus. Le consentement présumé au prélèvement de ses organes à sa mort est inscrit dans la loi, vous pouvez donc être approché(e)s par des personnels de santé "recherchant le consentement présumé pour le don d’organes" lors d’un entretien avec vous. “La recherche du consentement présumé pour le don d’organes” est le terme employé par les personnels de santé pour qualifier cet entretien. La loi parle d’une recherche du témoignage de la “non-opposition au don de ses organes après sa mort” auprès des proches du potentiel donneur (lois bioéthiques de 2004, actuellement en cours de révision).
Pour vous accompagner sur le difficile chemin du deuil à la décision …
Vous entendez parler de la mort de votre proche, et cet étrange (étranger) “diagnostic” de mort vous apparaît comme un préavis de décès. On peut diagnostiquer une maladie, mais la mort elle-même  ?! Elle s’impose à tous, de par l’aspect extérieur, rigide, du … cadavre. Or votre proche n’est pas un … cadavre, c’est un patient ! Sous respirateur artificiel, faisant l’objet de soins, il semble simplement endormi, car il respire à l’aide de machines et sa peau est vascularisée.
“Mort ?!”
Vous peinez à comprendre ce que l’on attend de vous. En même temps, vous avez peur de trop bien comprendre. En même temps, vous êtes en plein choc car il vous faut commencer un “travail de deuil” dont vous n’avez aucune idée quant à sa durée, son intensité, ses modalités. Beaucoup trop de “en même temps” à la fois … Quoi de plus intime qu’un travail de deuil, surtout lorsqu’il commence à peine ? Cette question du “don” (quel mot incongru !) va-t-elle compliquer votre travail de deuil par la suite ? Qu’en pensent les personnels de santé face à vous ? Ils ont l’air si sûr d’eux, alors que vous êtes, vous-même(s), en plein marécage, pris à la gorge par mille et une incertitudes, mille et une pensées contradictoires. Ce qu’on vous sert là, c’est le conte des mille et un cauchemars. Allez-vous faire ce sacrifice, pardon, ce Don ?
Vous savez désormais que les soignants ne sont pas aussi sûrs d’eux qu’ils pourraient en avoir l’air. Si vous souhaitez recevoir l’intégralité du questionnaire OPTIDO, m’adresser un mail à cath.coste@laposte.net (sujet : OPTIDO). Vous pouvez aussi lire une analyse complète de l’enquête :
Sachez que cette analyse, postée la semaine dernière sur mon blog "éthique et transplantation d’organes", a généré 400 connections par jour à elle seule - de la part des soignants ; non du grand public, non "éclairé" : le "consentement présumé" qui fait, sur le plan légal, que nous sommes tous présumés consentir au don de nos organes vitaux à notre décès est une fiction juridique.
* Période d’ischémie chaude
Ce terme désigne le délai entre l’arrêt cardiaque et l’instauration des mesures de conservation des organes. Le début de la période d’ischémie chaude varie dans la pratique ; par exemple, ce délai commence à partir de l’asystole, de l’interruption du maintien des fonctions vitales ou de l’atteinte de seuils vitaux définis à l’avance. Le début de la perfusion froide est généralement considéré comme la fin de la période d’ischémie chaude. La définition de la période d’ischémie chaude a des répercussions importantes sur la viabilité des organes aux fins de transplantation.
Période d’ischémie froide
Intervalle entre le début de la conservation d’un organe prélevé et sa transplantation (greffe).
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